VIDÉO. Languedoc: Pourquoi les viticulteurs sont saoulés par les vins espagnols
AGRICULTURE•En début de semaine, des militants ont déversé des centaines de litres de vin sur la chaussée, dans l’Aude et le Gard…Nicolas Bonzom
Dans le Languedoc, les viticulteurs ne décolèrent pas. Depuis le début de la semaine, à Narbonne (Aude) dans la nuit de lundi à mardi et au péage de Gallargues (Gard) mardi, ils ont déversé plusieurs centaines de litres de vin rouge sur la chaussée… Peu avant, certains d’entre eux avaient fait irruption dans des rayons de supermarchés.
C’est la concurrence jugée « déloyale » des vins étrangers, notamment ceux venus d’Espagne, qui est au centre des protestations. « Certains ont les reins assez solides et parviennent à résister. Pour d’autres, c’est une catastrophe », souligne François-Régis Boussagnol, président du syndicat héraultais des vignerons indépendants.
Des contraintes de production très différentes
Si en Languedoc, mais aussi dans d’autres grandes régions viticoles, les viticulteurs souffrent, c’est parce qu’en France et au-delà des Pyrénées, quand on fait du vin, on ne se bat absolument pas avec les mêmes armes. Et ce, même si « la France et l’Espagne sont dans la même Union européenne », gronde un viticulteur.
« Nous avons des contraintes de production différentes, notamment dans l’utilisation de produits phytosanitaires pour traiter les vignes, assure Lionel Puech, viticulteur à la Rouvière, coprésident des Jeunes agriculteurs du Gard, qui se sont mobilisés mardi à Gallargues. En Espagne, certains produits sont autorisés, alors qu’en France, ils sont interdits parce qu’ils sont nocifs. A la place, nous avons des produits de substitution beaucoup plus chers. Sans compter les charges, qui ne sont pas les mêmes… »
Des vins de table français ? Non, espagnols
Alors qu’en France, le prix moyen à l’hectolitre est de 80 euros, en Espagne, il tombe à 32 euros… Conséquence : les gros négociants ou les distributeurs français optent peu à peu ces dernières années pour du vin espagnol, pour concevoir leurs vins de table…
« Certains n’ont même pas changé leur nom sur l’étiquette », gronde François-Régis Boussagnol. Ainsi, des bouteilles dont l’appellation sonne pourtant très française sont en fait conçues avec du vin… espagnol. « On y voit un château ou un beau paysage… On compte évidemment sur le consommateur pour être vigilant et faire le bon choix », note Anaïs Amalric, viticultrice près d’Uzès, coprésidente des Jeunes agriculteurs du Gard.
Du vin de 2015 encore en stock
Ainsi, huit millions d’hectolitres de vins étrangers arrivent tous les ans en France, dont six millions proviennent d’Espagne. Six millions, c’est à peu près la moitié du volume produit par les viticulteurs dans le Languedoc-Roussillon.
Et si la colère monte ces dernières semaines, c’est notamment parce que, face à la concurrence venue d’Espagne, de nombreux viticulteurs du Languedoc ne sont toujours pas parvenus à écouler leurs stocks de vin de… 2015. Si rien ne bouge, les viticulteurs le promettent : ils pourraient bien passer une fois encore à l’offensive.