Nagorny Karabakh : Le point sur les pourparlers entre les séparatistes et l’Azerbaïdjan
CONFLIT Entre accusation de « nettoyage ethnique » de la part de l’Arménie et tirs dans la capitale sécessionniste, la tension n'est pas totalement retombée
L’horizon de la fin des combats reste flou au Nagorny Karabakh. Alors que se sont déroulés ce jeudi des pourparlers de paix entre l’Azerbaïdjan et les séparatistes arméniens, des tirs ont retentis en milieu de matinée dans la capitale de la région, Stepanakert. Les deux camps se sont accusés d’avoir rompu le cessez-le-feu, tandis que la communauté internationale s’en mêle. Les pourparlers ont duré deux heures, et pourraient reprendre bientôt.
Qui a dit quoi ? Qui a fait quoi ? 20 Minutes fait le point pour vous.
Que s’est-il passé ce jeudi matin à Stepanakert ?
Des tirs ont retenti dans la capitale de la région séparatiste vers 12h15 heure locale (9h15 en France), selon un correspondant de l’AFP présent sur place. Leur origine reste inconnue, mais l’Azerbaïdjan s’est rapidement défendu d’avoir attaqué la ville après des accusations de la part des séparatistes. « Les forces armées azerbaïdjanaises ont utilisé différentes armes depuis les environs de Stepanakert, violant l’accord sur le cessez-le-feu », ont indiqué les séparatistes sur X, l’ex-Twitter, ce que le ministre azerbaïdjanais de la Défense a qualifié de « désinformation ».
Plus tard dans la journée, un responsable local rapportait que les rues de Stepanakert sont « remplies de personnes déplacées, affamées et apeurées ».
Où en sont les pourparlers de paix ?
Cette agitation dans la capitale du Nagorny Karabagh n’a pas empêché les pourparlers entre l’Azerbaïdjan et les séparatistes arméniens de se tenir dans la ville azerbaïdjanaise de Yevlakh, après la victoire militaire éclair de Bakou. Sur des images diffusées par l’agence de presse officielle azerbaïdjanaise Azertag, six hommes en costume se trouvaient autour d’une table pour négocier une réintégration du territoire sécessionniste, en majorité peuplé d’Arméniens, à l’Azerbaïdjan. Parmi eux, un représentant du Nagorny Karabakh est visible, David Melkoumian.
Selon le dernier bilan des séparatistes arméniens, l’opération militaire azerbaïdjanaise, qui s’est achevée en 24 heures mercredi à la mi-journée, a fait au moins 200 morts et 400 blessés. Acculés par la puissance de feu des unités azerbaïdjanaises et la décision de l’Arménie de ne pas leur venir en aide, les séparatistes ont accepté de rendre toutes leurs armes et de participer à de premiers pourparlers sur « la réintégration » à l’Azerbaïdjan du Nagorny Karabakh. A la veille de ces négociations, Hikmet Hajiev, un conseiller du président azerbaïdjanais, a assuré que l’Azerbaïdjan avait « pour objectif la réintégration pacifique des Arméniens du Karabakh » et une « normalisation » des relations avec l’Arménie.
Les discussions se sont achevées au bout de deux heures. Aucune conférence de presse n'était prévue à l'issue. Mais les séparatistes ont indiqué plus tard par communiqué être « prêts à poursuivre les pourparlers ». Bakou estime que ces échanges ont été « constructifs », et espère qu'une nouvelle réunion se tiendra « le plus rapidement possible ».
Qu’en dit l’Arménie ?
Trois ans après sa défaite militaire, déjà, contre l’Azerbaïdjan, l’Arménie avait annoncé qu’elle ne se porterait pas au secours de l’enclave, pourtant peuplée d’Arméniens. Mais les tensions avec l’Azerbaïdjan sont toujours vives. « Des unités des forces armées azerbaïdjanaises ont tiré à l’arme légère sur les avant-postes de combat arméniens près de Sotk », dans une région frontalière, a ainsi indiqué le ministère arménien de la Défense dans un communiqué mercredi soir.
Devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, l’Arménie a même dénoncé un « crime contre l’humanité ». « L’Arménie n’a cessé d’informer ce Conseil de l’imminence d’un nettoyage ethnique. Aujourd’hui, il est en cours. (…) Il ne s’agit pas d’une simple situation de conflit, mais d’un crime contre l’humanité qui doit être traité comme tel », a déclaré l’ambassadeur arménien, Andranik Hovhannisyan. Ce jeudi en fin de matinée, le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a toutefois tenté de faire retomber la tension. « Il faut apprécier la paix et il ne faut pas confondre paix, trêve et cessez-le-feu. La paix est un environnement dénué de conflits inter-étatiques, inter-ethniques. Ce chemin n’est pas facile, mais il nous faut l’emprunter », a-t-il dit dans une adresse à la Nation à l’occasion de la fête de l’Indépendance arménienne.
Il y également indiqué que « le régime de cessez-le-feu au Nagorny Karabakh tient globalement, il y a eu des violations isolées mais globalement, la situation est stable ».
Quelles sont les autres réactions internationales ?
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a réaffirmé ce jeudi son « soutien sans réserve » à Bakou lors d’un entretien téléphonique avec son homologue azerbaïdjanais Ilham Aliev, a annoncé la présidence turque. De son côté, Vladimir Poutine a demandé au président azerbaïdjanais le respect des droits des Arméniens du Karabakh. Une position qui peut s’expliquer par la mort de soldats russes, lesquels assurent en temps normal une force de paix, visés par des tirs azerbaïdjanais. Le président azerbaïdjanais s’est excusé auprès de son homologue russe, affirme le Kremlin.
Mercredi soir, la Maison Blanche faisait part de son inquiétude sur la « dégradation de la situation humanitaire », alors que des milliers d’Arméniens ont été déplacés lors du conflit. Emmanuel Macron a lui « condamné le choix fait par l’Azerbaïdjan de recourir, hier (mardi), à la force, au risque d’aggraver la crise humanitaire », et demande au président azerbaïdjanais « de donner des garanties sur les droits et la sécurité des habitants du Karabakh ».