Etats-Unis : Arrestation, menottes, manifestations… Comment se déroulerait une inculpation de Donald Trump ?
Décryptage Accusé d’avoir acheté le silence de Stormy Daniels, une ex-star du porno juste avant l’élection de 2016, Donald Trump pourrait devenir le premier ex-président poursuivi au pénal
- Donald Trump a dit s’attendre à être arrêté mardi et a appelé ses partisans à manifester.
- L’ancien président américain pourrait être inculpé pour avoir acheté le silence de Stormy Daniels, une ex-star du porno avant l’élection de 2016.
- Mais même une condamnation ne pourrait pas l’empêcher de se présenter à la présidentielle ou d’être élu.
Un séisme politico-judiciaire menace de secouer l’Amérique à tout moment. Accusé d’avoir acheté le silence de l’ex-star du porno Stormy Daniels juste avant la présidentielle de 2016, Donald Trump a assuré sur les réseaux sociaux qu’il serait arrêté mardi.
Si la date est incertaine – selon Fox New, cela ne serait pas avant la semaine prochaine – et dépend des conclusions d’un grand jury de Manhattan, les autorités se préparent à un scénario qui serait historique : un ancien président américain n’a jamais été poursuivi au pénal.
Donald Trump sera-t-il arrêté ?
Dans une affaire aussi sensible, il est peu probable que des policiers viennent frapper à la porte de Mar-a-Lago en Floride et qu’il soit ensuite extradé vers l’Etat de New York. Les avocats de Donald Trump ont sans doute négocié avec les autorités judiciaires new-yorkaises pour que leur client se rende et se présente volontairement au tribunal, sous la protection du Secret service. Avant cela, l’ancien locataire de la Maison-Blanche devra passer par le bureau du procureur de Manhattan pour que ses empreintes digitales soient enregistrées, et qu’il soit photographié. C’est le fameux mug shot.
Donald Trump ne devrait pas être escorté menotté sous les flashes des photographes (la perp walk), car le procureur Alvin Bragg voudra éviter au maximum toute optique de vendetta politique. De l’autre côté de la rue, il sera présenté à un juge au tribunal, qui lui annoncera les charges officiellement retenues contre lui. C’est l’arraignment, la lecture de l’acte d’accusation. Donald Trump décidera ensuite de plaider coupable ou non coupable, et il devrait ressortir libre.
Y aura-t-il des manifestations ?
Sur Truth Social, Donald Trump a appelé ses partisans à manifester. Pour l’heure, il ne semble pas y avoir une mobilisation massive sur les réseaux sociaux pour organiser une protestation comme lors de l’assaut du Capitole. Le Speaker de la Chambre, Kevin McCarthy, a appelé au calme, tandis que l’élue Marjorie Taylor Greene a assuré que Donald Trump appelait à des manifestations « pacifiques ».
De quoi est accusé Donald Trump ?
Juste avant l’élection de 2016, l’ex-star du porno Stormy Daniels s’apprêtait à faire la tournée des plateaux télé pour affirmer qu’elle avait eu une liaison avec Donald Trump dix ans plus tôt. L’ex-avocat et « fixeur » du candidat républicain, Michael Cohen, lui avait alors versé 130.000 dollars pour acheter son silence. Cohen affirme avoir agi sur ordre de Donald Trump, qui l’a ensuite remboursé.
Si un tel versement n’est pas illégal en soi, Donald Trump est soupçonné de fausses déclarations pour avoir fait passer ce paiement comme des frais d’avocat. Reste à savoir si les procureurs le poursuivront pour un simple misdemeanor, un délit passible d’une amende, ou pour une felony, un crime passible de quatre ans de prison. Pour cela, les procureurs devraient prouver que Donald Trump a enfreint la loi sur le financement électoral. C’est une tâche compliquée : face à des accusations similaires, l’ex-candidat démocrate John Edwards avait échappé à une condamnation. Le jury n’avait pas réussi à se mettre d’accord à l’unanimité.
Quel impact pour la présidentielle de 2024 ?
Déjà en campagne, Donald Trump dénonce, comme à son habitude, une « chasse aux sorcières ». Mais ni une inculpation, ni même une condamnation, ne l’empêcherait de se présenter ou d’être élu – et pourrait même galvaniser ses partisans. Une inéligibilité ne peut être décidée que par le Congrès après une condamnation par le Sénat lors d’un impeachment, ou, en théorie, en invoquant le 14e amendement sur les insurrections.
Un éventuel procès pourrait toutefois compliquer la logistique de la campagne de Trump et offrir des angles d’attaque à ses adversaires. Lundi, le gouverneur de Floride Ron DeSantis, considéré comme son rival le plus dangereux, a ironisé, assurant qu’il ne pouvait pas faire de commentaire sur « un paiement pour acheter le silence d’une pornstar à propos d’une liaison présumée ». La guerre est lancée.