Procès d’Harvey Weinstein : L’ex-producteur accusé de s’être servi de son pouvoir pour violer des femmes

ETATS-UNIS Jugé pour des agressions sexuelles dénoncées par cinq femmes, Harvey Weinstein risque jusqu’à 140 ans de prison dans un second procès qui pourrait avoir de l’importance s’il gagnait en appel à New York

20 Minutes avec AFP
Harvey Weinstein le 4 octobre 2022 au tribunal de Los Angeles
Harvey Weinstein le 4 octobre 2022 au tribunal de Los Angeles — Etienne Laurent/AP/SIPA

Cinq ans après le déferlement #MeToo qui l’a fait tomber, on est loin de l’effervescence médiatique. Pour l’ouverture des débats du second procès d’Harvey Weinstein, lundi, seules une demi-douzaine de caméras l’attendaient devant l’entrée du tribunal, à Los Angeles. Mais le producteur déchu est arrivé par une entrée souterraine, loin des flashs, et son avocat Mark Werksman n’a pas dit un mot en passant devant la presse.


Lors des opening statements, il a assuré que son client avait profité de la culture hollywoodienne de la « promotion canapé ». Le procureur Paul Thompson, à l’inverse, a brossé le portrait d’un producteur « tout puissant », qui s’est servi de son pouvoir pour violer ou agresser sexuellement cinq femmes. Et plusieurs autres, qui seront autorisées à témoigner au cours des deux prochains mois, tout comme l’acteur Mel Gibson, à qui une des accusatrices de Weinstein s’était confiée.

Jusqu’à 140 ans de prison

L’ancien roi du cinéma, âgé de 70 ans, aux grands succès primés comme Pulp Fiction ou The Artist, a déjà été condamné à New York où il purge depuis 2020 une peine de 23 ans de prison, également pour viol et agression sexuelle. Un verdict qui fut un événement fondateur pour le mouvement #Metoo né il y a tout juste cinq ans aux Etats-Unis et qui déclencha une déferlante mondiale toujours en cours contre les violences sexuelles faites aux femmes.

Cette fois Harvey Weinstein fait face à onze chefs d’accusation pour des faits présumés de viols et d’agressions sexuelles commis sur cinq femmes dans des hôtels de Beverly Hills et de Los Angeles entre 2004 et 2013.

Sa stature ultra-massive et son énorme influence sur l’industrie du cinéma lui ont fait croire qu’il avait tous les droits pour agresser ses victimes dans des chambres d’hôtels, a tonné le procureur adjoint de Los Angeles. Ces femmes « avaient peur qu’il détruise leurs carrières si elles racontaient ce qu’il leur infligeait », a dénoncé Paul Thompson qui va devoir convaincre pendant deux mois un juré populaire de neuf hommes et trois femmes qui décidera d’aggraver ou non le sort de l’ancien faiseur de rois du cinéma américain.

Huit femmes devraient se présenter à la barre et « chacune indépendamment l’une de l’autre, sans se connaître », a assuré Thompson. Les jurés devraient entendre le témoignage de victimes qui suppliaient Weinstein de cesser de les violer, alors qu’il les forçait selon l’accusation à lui faire des fellations ou à le regarder se masturber.

« Il est grand, massif, en surpoids et dominateur », avait témoigné l’une d’elle auprès des enquêteurs pour expliquer sa soumission, sa terreur et son silence. « J’avais peur que si je n’étais pas bien sage, il m’arriverait quelque chose dans la chambre ou à l’extérieur à cause de son pouvoir » dans le milieu du cinéma, avait raconté une autre femme.

Weinstein était si influent et si redouté qu’il affichait sa « puissance avec des candidats à la présidentielle » américaine, a dénoncé le procureur en montrant une photo du producteur au côté de la démocrate Hillary Clinton battue en 2016 par Donald Trump.

« Promotion canapé »

Parmi les cinq accusatrices - qui déposeront toutes à Los Angeles sous le pseudonyme de « Jane Doe »- figure Jennifer Siebel Newsom, épouse du gouverneur démocrate de Californie Gavin Newsom. S’il est reconnu coupable, Harvey Weinstein - qui a plaidé non coupable pour tous les chefs d’accusation - pourrait être condamné à 140 années supplémentaires derrière les barreaux.

L’avocat de Weinstein a assuré qu’il prouverait que toutes les relations étaient consenties.  « A Hollywood, le sexe est transactionnel. C’est la culture de la promotion canapé. Il en a profité, elles aussi. Elles ont couché avec lui car il était puissant ».

Après un rejet initial par la justice, la Cour suprême de New York a finalement autorisé en août l’ancien producteur à faire appel de sa condamnation de 2020, donnant une nouvelle dimension au procès de Los Angeles.