Ouzbékistan : Une large victoire du président sortant attendue aux élections ce dimanche

PRESIDENTIELLE Ses détracteurs l’accusent d’avoir écarté toute opposition réelle lors de l’élection, faisant peu de doute sur l’issue du vote

M.F avec AFP
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Chavkat Mirzioïev, président de l'Ouzbékistan depuis 2016.
Chavkat Mirzioïev, président de l'Ouzbékistan depuis 2016. — GREG BAKER / AFP

Les Ouzbeks étaient invités à se rendre aux urnes ce dimanche pour élire leur représentant. Mais c’est sans grande surprise, que Chavkat Mirzioïev, le président sortant, devrait sortir vainqueur de ces élections présidentielles. Agé de 64 ans, il dirige le pays le plus peuplé d’Asie centrale depuis 2016, est salué pour avoir aboli le travail forcé, ouvert l’économie et libéré des opposants torturés par son impitoyable prédécesseur, Islam Karimov.

Récemment, il a cependant renoué plus avec des habitudes du passé, réprimant plusieurs personnalités critiques. Ses détracteurs l’accusent aussi d’avoir écarté toute opposition réelle lors de l’élection. Pour cette élection, Chavkat Mirzioïev affrontait quatre candidats considérés comme fantoches et qui se sont abstenus de le critiquer pendant la campagne. Pour la majorité des observateurs, le résultat du vote est donc joué d’avance.

« Je n’aime aucun des choix proposés »

A peine cinq heures après l’ouverture des bureaux, la Commission électorale indiquait dimanche que la participation dépassait déjà les 50 %. Le scrutin doit se conclure à 15H00 GMT. En 2016, Chavkat Mirzioïev avait remporté l’élection avec 88,6 % des voix et une participation de 87 %. Des résultats semblables à ceux d’Islam Karimov, au pouvoir pendant 27 ans et qui avait fait de l’Ouzbékistan l’un des pays les plus autoritaires au monde.

A Tachkent, la capitale, nombre d’électeurs abordaient ainsi l’élection de dimanche sans enthousiasme. « Je n’aime aucun des choix proposés », a déclaré Georgy, un homme âgé de 45 ans ayant requis l’anonymat. Il a ajouté qu’il voterait « contre eux tous, y compris lui », une allusion à Chavkat Mirzioïev. Zera, une femme de 55 ans, dit soutenir le président sortant, tout en exprimant sa crainte au sujet de l’Afghanistan, pays voisin. « Ce pays m’inquiète beaucoup depuis qu’ils (les talibans) ont pris le pouvoir. »

Répression croissante de l’opposition

Frontalier de l'Afghanistan, l’Ouzbékistan est situé dans une région aussi difficile que stratégique, où la Russie et la Chine exercent une forte influence. Ce pays enclavé, qui compte environ 34 millions d’habitants, était autrefois une étape majeure sur l’antique Route de la Soie, une situation qui a fait la fortune de cités comme Samarcande et Boukhara. Cinq ans après la mort de Karimov, l’Ouzbékistan a sans aucun doute l’air plus libre. Chavkat Mirzioïev a notamment mis fin au travail forcé dans les champs de coton, y compris de milliers d’enfants, une mesure mondialement saluée.

Mais les deux dernières années de son premier mandat ont été marquées par la répression croissante de voix critiques. Un universitaire perçu comme l’un de ses rares véritables opposants, Khidirnazar Allakoulov, a été interdit de se présenter à la présidentielle. La pandémie a aussi enrayé la forte croissance économique, plongeant le tourisme dans l’abîme et alimentant le mécontentement populaire. Le chômage et le coût de la vie ont nettement augmenté. Fait rarissime, des manifestations ont même éclaté l’an dernier en réaction à des pénuries énergétiques.

Pour Temour Oumarov, spécialiste de l’Asie centrale, Chavkat Mirzioïev est face à une équation délicate : continuer de réformer sans toucher au système autoritaire hérité de Karimov et dont l’élite profite. « La corruption existe toujours au sommet du gouvernement, mais le pouvoir ferme les yeux », dit-il. Mais, « en parallèle, la société est plus dynamique qu’autrefois et ne sera pas contente si le gouvernement ne continue pas les réformes. » Le mois dernier, le président Mirzioïev a argué que la définition de la démocratie en Ouzbékistan n’était pas la même que dans d’autres pays. Et il a mis en garde contre l’instabilité.