Ouïghours: Nike dans la tourmente en Chine après le boycott du coton du Xinjiang

DROITS HUMAINS Un communiqué de Nike s'engageant à ne pas utiliser de coton du Xinjiang, où les Ouïghours sont internés dans des « camps » et soumis à du « travail forcé », est opportunément réapparu cette semaine sur le réseau social chinois Weibo, déclenchant une polémique

B.D. avec AFP
Ouïghours: Nike dans la tourmente en Chine — 20 Minutes

C’est au tour de Nike. La célèbre marque de prêt-à-porter est la dernière en date à subir les foudres de la Chine après le boycott du coton du Xinjiang. La région, longtemps frappée par des attentats attribués à des séparatistes ou des islamistes ouïghours, est placée sous la surveillance policière drastique de Pékin depuis quelques années. Selon des études publiées par des instituts américains et australien, au moins un million de Ouïghours  ont été internés dans des « camps » et certains soumis à du « travail forcé », notamment dans des champs de coton de la région.

La Chine juge ces rapports remplis de « fausses informations » et assure que les « camps »  sont des « centres de formation professionnelle » destinés à apporter un emploi à la population afin de l’éloigner de la tentation de l’extrémisme. En 2020, Nike avait publié un communiqué dans lequel l’entreprise se déclarait « préoccupée » par ces accusations de « travail forcé ». Le géant américain s’était engagé à ne pas utiliser de coton du Xinjiang, grande zone de production mondiale qui fournit de nombreux mastodontes du textile.

Représailles

Ce communiqué de Nike est opportunément réapparu cette semaine sur le réseau social chinois Weibo, déclenchant une polémique également alimentée par l’imposition lundi par l’Union européenne, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et le Canada de sanctions contre la Chine vis-à-vis du traitement des Ouïghours. En représailles, Pékin a sanctionné des personnalités et organismes européens.

La polémique visant Nike grandissant sur les réseaux sociaux, un acteur et une actrice très connus en Chine, Wang Yibo et Tan Songyun, ont annoncé ce jeudi couper leurs liens avec la marque, dont ils étaient les ambassadeurs. « Les intérêts du pays passent avant tout. Nous sommes fermement opposés à toutes les actions malveillantes visant à salir ou à répandre des rumeurs sur la Chine », a indiqué l’agence chargée des intérêts de Tan Songyun.

H & M aussi

H & M est quant à elle emportée depuis mercredi déjà dans cette tempête médiatique en raison d’un communiqué similaire à celui de Nike sur le coton du Xinjiang. Signe d’une possible intervention du pouvoir, c’est la Ligue de la jeunesse communiste, une organisation affiliée au Parti communiste, qui avait lancé les hostilités sur Weibo. « Diffuser des rumeurs et boycotter le coton du Xinjiang, tout en espérant faire de l’argent en Chine ? Vous rêvez ! », avait-elle écrit en publiant les copies d’écran du communiqué de H & M, déclenchant la polémique. Les produits de la marque ont depuis été retirés des principaux sites chinois de vente en ligne. Ses magasins restent toutefois ouverts.

Interrogé sur le fait de savoir si Pékin orchestrait toute cette polémique, le ministère chinois des Affaires étrangères a démenti ce jeudi toute responsabilité. « Le marché chinois est ce qu’il est. Nous n’avons nul besoin de nous lancer dans des intimidations » contre ces entreprises, a indiqué la porte-parole Hua Chunying lors d’un point-presse régulier. « Une chose est toutefois certaine : les Chinois n’autoriseront probablement pas des étrangers à profiter des largesses de la Chine tout en la critiquant. »

Zara bientôt visé ?

L’institut Aspi, financé par les autorités australiennes mais aussi étrangères (notamment américaines), accusait H & M dans son rapport de s’être approvisionné auprès de structures utilisant de la main-d’œuvre ouïghoure provenant de « camps de rééducation ».

H & M Chine a déclaré mercredi qu’il n’endossait « aucune position politique ». Nike n’avait pas répondu dans l’immédiat à une demande de commentaire de l’AFP. Sur Weibo, d’autres noms de marques ayant pris des positions similaires à Nike et H & M commençaient à circuler jeudi : Uniqlo, Zara, Gap ou encore Adidas, laissant entrevoir de potentielles sanctions.