Présidentielle américaine : « Fraude », « Deep state » et « Fake News »… Les supporters de Donald Trump ne rendent pas les armes
REPORTAGE En Californie, comme dans le reste du pays, les partisans du président américain n'acceptent pas sa défaite
- Donald Trump n'a toujours pas reconnu sa défaite à l'élection présidentielle.
- Ce week-end, des dizaines de milliers de supporters du président américain ont manifesté aux Etats-Unis.
- 20 Minutes est allé à leur rencontre à Yorba Linda, en Californie.
De notre correspondant aux Etats-Unis,
A l’intersection qu’ils ont renommée le « carrefour des patriotes », ils refusent de capituler. Alors que Donald Trump n’a toujours pas reconnu sa défaite, douze jours après l’élection présidentielle, des dizaines de milliers de supporters du président américain ont manifesté dans de nombreuses villes américaines, ce week-end. Dimanche, une centaine de partisans étaient rassemblés à Yorba Linda, dans le comté d’Orange, le fief californien de Richard Nixon, dans le cadre de la mobilisation « Stop the steal ». Comme Donald Trump, ils dénoncent un « vol des démocrates », les « mensonges des Fake News » et la « complicité du Deep state ».
Depuis l’annonce de la victoire de Joe Biden, le restaurant Mimi’s Cafe, à deux pas de la bibliothèque présidentielle de Richard Nixon, est devenu le quartier général des « trumpistes », dans une ville qui a massivement voté pour lui. Avec sa casquette « Make America Great Again » et son t-shirt « 2e amendement : la liberté ou la mort », Ian donne de la voix au mégaphone. « Je suis là pour soutenir notre président et dénoncer la fraude des démocrates qui sont en train de nous voler l’élection », explique-t-il. Le quinquagénaire reprend les « talking points » présidentiels. Selon lui, « des personnes décédées ou avec une fausse adresse ont voté en masse », et il assure que le logiciel de Dominion Voting Systems, qui équipe des machines à voter de 28 Etats, a modifié des « millions » de résultats en faveur de Joe Biden.
Trump, seul contre tous
Ses certitudes se heurtent à la réalité. Sans preuve crédible, les avocats de Donald Trump ont essuyé une vingtaine de défaites pour une seule victoire devant les tribunaux. L’agence de cybersécurité, qui dépend du département de la Sécurité intérieure, a démenti en bloc toute fraude et assuré qu’aucun vote n’a été changé. La discussion s’anime et Michael se joint à la conversation. Pour ce livreur, l’explication est simple : « Il y a une complicité du Deep state (Etat profond) qui n’a jamais accepté la légitimité de notre président. Il est seul face aux mensonges de Fake News et à la censure de Facebook ».
Jessie s’affaire avec son frère sur leur stand de produits dérivés : 20 dollars le drapeau, 30 dollars la casquette « Keep America Great ». Il rejette catégoriquement que Joe Biden ait pu obtenir un nombre record de voix après « s’être terré dans sa cave ». « Il a fait des discours devant moins de 20 personnes et on veut nous faire croire qu’il a obtenu 78 millions de votes ? Come on ! » Le vendeur espère qu’une intervention de la Cour suprême en Pennsylvanie, et des recomptes en Géorgie et dans le Wisconsin pourront renverser l’élection, mais il est « pessimiste ». Malgré leur colère et leurs doutes, Jessie, Michael et Ian sont malgré tout catégoriques : si Donald Trump reconnaît sa défaite, ils accepteront la légitimité de Joe Biden comme président. « C’est plus que ce que les démocrates ont fait pendant quatre ans avec la présidence de Donald Trump », ironise Ian.
« Je ne sais plus quoi croire »
Les drapeaux américains et « Trump-Pence 2020 » flottent sous le ciel bleu, et une voiture klaxonne en passant, sous les cris des manifestants. Propriétaire d’un salon de coiffure « mis à genoux par le confinement du gouverneur Newsom », Wendy n’a « aucune confiance » dans les résultats officiels. « Je sais que mon vote n’a pas encore été compté. Combien d’autres ont été oubliés en Géorgie ou en Arizona ? », demande-t-elle. Avant de reconnaître qu’en Californie, il faut en général plusieurs semaines pour dépouiller le vote par correspondance, avec une validation tardive des résultats le 11 décembre.
Pour de nombreux manifestants, c’est la remontée de Joe Biden qui ne passe pas. « Le soir de l’élection, je suis allée me coucher, et Donald Trump avait plus de 100.000 voix d’avance dans le Wisconsin et dans le Michigan. Quand je me suis levée, Joe Biden était comme par magie passé devant », s’énerve la coiffeuse. L’explication est pourtant simple : les Etats du Midwest ont d’abord dépouillé les bulletins déposés en personne dans l’isoloir le 3 novembre, qui étaient massivement pro-Trump, avant de comptabiliser le vote par correspondance, que Joe Biden a remporté avec 60 ou 70 % dans des villes comme Milwaukee ou Detroit. Wendy écoute patiemment ces explications et soupire : « Je lis tellement de choses en ligne. Je ne sais plus quoi croire. » Le travail de sape de Donald Trump a payé.