Disparition de l'ex-patron d'Interpol: «Je ne suis pas sûre qu'il soit vivant», estime sa femme

CHINE Elle assure avoir reçu plusieurs coups de téléphone menaçants qui lui font penser qu'elle est «prise pour cible»...

20 Minutes avec AFP
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Grace Meng, l'épouse de l'ancien directeur d'Interpol, s'est exprimé devant les journalistes, à Lyon, le 7 octobre 2018, dans les bureaux d'Interpol.
Grace Meng, l'épouse de l'ancien directeur d'Interpol, s'est exprimé devant les journalistes, à Lyon, le 7 octobre 2018, dans les bureaux d'Interpol. — JEFF PACHOUD / AFP

Après la disparition troublante de Meng Hongwei, l’ex-patron d’Interpol accusé de corruption en Chine, sa femme, Grace Meng, déclarant craindre pour sa propre sécurité, a accusé le gouvernement chinois de « persécution ».

La femme de l’ancien directeur a accordé une interview exclusive à la chaîne britannique BBC. « Je pense que c’est de la persécution politique. Je ne suis pas sûre qu’il soit vivant », a-t-elle expliqué dans cette interview, réalisée en France où se trouve le siège d’Interpol, et interview diffusée jeudi. Des déclarations rarissimes quand on sait que la campagne anticorruption menée en Chine se déroule en général dans le plus grand secret.

« Ils sont cruels. Ils sont infâmes »

Meng Hongwei a disparu fin septembre à son retour dans son pays. Après l’ouverture d’une enquête par le gouvernement chinois, il avait démissionné, le 7 octobre dernier, de son poste de directeur d’Interpol Chine. Meng Hongwei, qui est en théorie toujours vice-ministre chinois de la Sécurité publique, est notamment suspecté d’avoir « accepté des pots-de-vin ».

« J’ai dit (à mes enfants) que papa était parti pour un long déplacement professionnel », raconte Grace Meng au bord des larmes. Son visage reste dans l’ombre durant tout l’entretien. Elle assure avoir reçu plusieurs coups de téléphone menaçants qui lui font penser qu’elle est « prise pour cible » en France. « Ils sont cruels. Ils sont infâmes », affirme Grace Meng à propos des autorités chinoises. « Je dois me dresser contre cela et je ne veux pas que d’autres femmes ou enfants vivent ce que je vis. »

Des déclarations inédites, source d’embarras pour Pékin

La Commission nationale de supervision, qui enquête sur Meng Hongwei, peut garder des suspects au secret pendant six mois, sans prévenir leur famille ni leur donner accès à un avocat. Plus de 1,5 million de cadres ont été sanctionnés dans le cadre de la campagne anticorruption lancée par Xi Jinping, en 2012 lors de son arrivée au pouvoi. Ses détracteurs affirment qu’elle a aussi été mise à profit pour éliminer des opposants internes.

Les proches de responsables déchus sont en général empêchés de s’exprimer par les autorités chinoises. Les propos de Grace Meng devant des caméras de télévision sont donc inhabituels et représentent sans aucun doute une source d’embarras pour Pékin. L’élection de Meng Hongwei à la tête d’Interpol fin 2016 avait été vécue comme une victoire pour la Chine, en dépit des inquiétudes que cela avait fait naître parmi les défenseurs des droits de l’homme.