VIDEO. Japon: Le sumo pris à bras-le-corps par un nouveau scandale

POLEMIQUE Une plainte a été déposée contre le champion Harumafuji, accusé d’avoir frappé un autre lutteur avec une bouteille de bière…

Mathias Cena
Le yokozuna Harumafuji à Dazaifu, le 14 novembre 2017.
Le yokozuna Harumafuji à Dazaifu, le 14 novembre 2017. — AP/SIPA
  • Une star du sumo est accusé d'avoir agressé un lutteur avec une bouteille de bière.
  • Une plainte a été déposée ce mercredi.
  • Ce n'est pas la première fois que le monde du sumo doit faire face à des comportements violents.

De notre correspondant à Tokyo,

C’est un scandale majeur qui se profile dans le monde feutré du sumo. Le yokozuna (plus haut rang de ce sport) Harumafuji, de nationalité mongole, est soupçonné d’avoir frappé un autre lutteur à la tête avec une bouteille de bière au cours d’une soirée arrosée, une conduite jugée indigne de la part de l’un des champions de la discipline, tenus à un comportement exemplaire.

L’affaire, révélée mardi par un tabloïd nippon au troisième jour d’un tournoi de sumo, a pris une tournure officielle ce mercredi avec la plainte déposée par le maître « d’écurie » de la victime, le lutteur Taka-no-iwa, lui aussi de nationalité mongole.

Taka-no-iwa consultait son smartphone pendant qu’on lui parlait

Les faits se seraient déroulés au cours d’une soirée arrosée le 25 octobre dernier, alors que la tournée en province des lutteurs faisait étape dans le département de Tottori (ouest du Japon). Harumafuji, 33 ans, qui venait de mettre en garde Taka-no-iwa au sujet du respect dû aux aînés, n’aurait pas apprécié que son jeune compatriote de 27 ans continue à consulter son smartphone pendant qu’il lui parlait.

Exaspéré, Harumafuji aurait alors frappé Taka-no-iwa à la tête avec une bouteille de bière, avant de lui asséner « 20 à 30 coups de poing », d’après des témoins cités par le journal Sankei. Selon les médias japonais, une dizaine de personnes, principalement des lutteurs mongols et japonais, étaient présentes.

Le yokozuna a présenté mardi ses excuses devant les journalistes qui se pressaient sur son lieu d’entraînement. Invoquant une blessure au coude gauche, il a déclaré forfait le même jour pour le tournoi, qui a lieu à Fukuoka, sur l’île de Kyushu (sud du Japon) jusqu’au 26 novembre. La fédération de sumo a diligenté une enquête interne, mais ne devrait pas annoncer de sanction avant la fin du tournoi.

Interrogations sur la révélation tardive de l’affaire

L’affaire fait grand bruit au Japon, où des tabloïds appelaient mercredi à l’arrestation de Harumafuji, l’un des quatre yokozuna en activité, dont trois sont de nationalité mongole. Elle a même été évoquée mercredi au point presse quotidien du porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga. « Il est important que l’on sache ce qu’il s’est vraiment passé », a déclaré celui-ci. « Beaucoup de gens souhaitent que les lutteurs donnent le meilleur d’eux-mêmes à l’entraînement et qu’ils se conduisent en ayant à l’esprit la longue histoire » de ce sport.

« Quelle que soit la raison, la violence est inexcusable, d’autant plus quand il s’agit d’un yokozuna, qui doit faire preuve de dignité » et montrer l’exemple aux jeunes lutteurs, estime le quotidien de droite Yomiuri dans un éditorial. Alors que les faits remontent à fin octobre, le journal s’interroge sur la révélation tardive de cette affaire et sur de possibles tentatives de l’étouffer, et se demande si la fédération est réellement capable d’enquêter objectivement sur cette affaire, susceptible de lui causer un grand tort.

« Un yokozuna ne peut absolument pas se comporter comme ça »

Le sumo, qui connaît depuis quelques années un regain de popularité, a eu du mal à mettre derrière lui une série de scandales de matchs truqués, de liens avec les yakuzas et de violence, culminant en 2007 avec la mort d’un lutteur de 17 ans sous les coups de bouteille de bière de son maître. Celui-ci avait été condamné à cinq ans de prison pour négligence ayant entraîné la mort.

« On buvait beaucoup au cours de ces soirées entre lutteurs mongols, mais pas une fois il n’y a eu de querelle ni de violence », affirme l’ancien lutteur Kyokushuzan à l’agence de presse Kyodo, jugeant qu’« un yokozuna ne peut absolument pas se comporter comme ça ». D’après la même source, plusieurs maîtres d’écuries (il en existe 45 en tout) estiment qu’il « n’y a pas d’autre solution » pour Harumafuji que de mettre un terme à sa carrière.