Tournée en Asie: Donald Trump sera-t-il l'éléphant dans le magasin de porcelaine diplomatique?

MONDE Le président américain, réputé impulsif, devra éviter les écueils géopolitiques pendant cette visite de dix jours dans cinq pays asiatiques...

M.C. avec AFP
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Donald Trump descend d'Air Force One, le 15 mars 2017, dans le Michigan.
Donald Trump descend d'Air Force One, le 15 mars 2017, dans le Michigan. — DUANE BURLESON/AP/SIPA

Ils auront beau avoir méticuleusement planifié sa tournée asiatique, les conseillers de Donald Trump se posent peut-être une question : le président américain réputé impulsif saura-t-il gérer le protocole diplomatique et éviter les écueils géopolitiques tout en s’abstenant de se répandre sur Twitter ?

La Corée du Nord et les échanges commerciaux figurent en bonne place de cette tournée marathon qui le conduira pendant 12 jours dans cinq pays. Un agenda chargé qui le verra participer à des sommets avec des communistes, à une réception à la cour impériale du Japon et bien sûr, disputer un parcours de golf. Revue des pièges tendus pendant cette visite au président, qui a déjà fait savoir qu’il utiliserait « le langage qu’il veut ».

  • Eviter les poignées « à la Trump »

Les dirigeants américain et japonais sont si proches qu’un analyste a laissé entendre que Donald Trump ne se rend dans l’archipel que pour jouer au golf avec Shinzo Abe. Situation internationale oblige, ils se sont contentés de neuf trous quand ils avaient réalisé en Floride un parcours de 27 trous. Un parcours (de golf) qui ne devait pas poser de difficulté majeure, malgré les propos hasardeux de Donald Trump sur les samouraïs. Peut-être faudra-t-il éviter cette interminable poignée de main (19 secondes) imposée au Premier ministre nippon en février dernier :

  • Ne pas trébucher face à l’empereur du Japon

Donald Trump rencontrera également l’empereur Akihito, un champ de mines protocolaire potentiel qui avait fait trébucher Barack Obama en 2009. Le président américain de l’époque s’était profondément incliné devant l’empereur de 83 ans, s’attirant les foudres des conservateurs américains.

Le président américain Barack Obama salue l'empereur du Japon et son épouse à Tokyo le 14 novembre 2009.
Le président américain Barack Obama salue l'empereur du Japon et son épouse à Tokyo le 14 novembre 2009. - REUTERS/ Jim Young

 

  • Rester sur les rails face à l’Assemblée sud-coréenne

Donald Trump doit ensuite s’exprimer devant l’Assemblée nationale sud-coréenne, et certains craignent qu’il ne prenne des libertés avec le programme prévu et n’attise ainsi encore davantage les tensions autour des ambitions nucléaires de la Corée du Nord. « Si Trump dit quoi que ce soit qui provoque la Corée du Nord, cela pourrait exacerber encore les tensions militaires », juge Koo Kab-Woo, professeur à l’Université des études nord-coréennes de Séoul.

  • Ne pas froisser la Corée ou le Japon

Séoul est la deuxième étape après le Japon et Donald Trump devra s’attacher à ne pas donner l’impression de privilégier l’un ou l’autre allié, dont les relations sont tendues pour des raisons historiques. Les liens entre Donald Trump et le président sud-coréen de centre-gauche Moon Jae-In, accusé de « conciliation » avec le Nord, sont beaucoup plus fraîches qu’avec Shinzo Abe.

  • Tweeter par-dessus la censure chinoise ?

Pékin s’apprête à accueillir Donald Trump en très grande pompe, et à lui offrir plus de cérémonial que d’ordinaire. Garde militaire d’honneur, banquet officiel et des milliards de dollars d’accords commerciaux dont le président américain pourra se vanter sur Twitter, la Chine ne va rien laisser au hasard.

Un protocole très élaboré qui survient dans un contexte de tensions sur toute une série de sujets, du vaste déficit commercial américain à la gestion par Pékin de Pyongyang, son voisin imprévisible. « C’est un homme puissant », a dit Donald Trump récemment du président chinois. « Il se trouve que je pense que c’est un type très bien ».

Donald Trump pourra-t-il briser la grande muraille électronique et aller sur Twitter, qui est bloqué en Chine ? Comme la presse lui posait cette question, le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Zheng Zeguang a répondu : « vous n’avez pas à vous inquiéter de la façon dont le président Trump communiquera avec l’extérieur ».

  • Ne pas s’enliser dans la guerre du Vietnam

Donald Trump a échappé à la conscription pendant la guerre du Vietnam. Mais pour cette visite dans la nation du Sud-Est asiatique, la question des échanges sera primordiale. Les observateurs s’attendent à ce qu’il fasse l’éloge de la doctrine « L’Amérique d’abord » et qu’il appelle à des accords bilatéraux et au libre-échange en faveur des biens américains lors d’un sommet du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (Apec).

Il rencontrera également plusieurs membres de l’accord de libre-échange Asie-Pacifique (TPP), qui sont toujours estomaqués par son retrait abrupt du vaste traité, qu’il avait dénoncé comme « tueur » pour les emplois américains.

  • Eviter les noms d’oiseaux du président philippin

Aux Philippines, ce que dira Trump sur la campagne antidrogue controversée de Rodrigo Duterte sera scruté de près. Cette campagne a fait des milliers de morts et les défenseurs des droits de l’Homme ont évoqué un possible crime contre l’humanité. Le dirigeant philippin, connu pour ses tirades ponctuées de grossièretés, avait qualifié Barack Obama de « fils de pute » pour avoir critiqué la répression antidrogue et les relations bilatérales sont devenues glaciales.

Le chef de la Maison Blanche a lui salué lors d’un échange téléphonique qui a hérissé les ONG de défense des droits de l’Homme le « travail incroyable sur le problème de la drogue » du dirigeant philippin. Le moment le plus dramatique de la visite pourrait survenir au moment de la rencontre entre les deux présidents. Rodrigo Duterte a coutume d’accueillir ses visiteurs avec un geste de salut le poing fermé et de les enjoindre de lui retourner la pareille. Les opposants au président philippin comparent ce geste au salut nazi et affirment qu’il illustre son dédain pour les droits de l’Homme.