Allemagne: Ouverture d'une enquête contre un responsable turc soupçonné d'espionnage contre des partisans de Gülen

JUSTICE Une première enquête contre X avait été ouverte mardi...

Manon Aublanc avec AFP
— 
L'opposant turc Fethullah Gülen le 18 juillet 2016
L'opposant turc Fethullah Gülen le 18 juillet 2016 — THOMAS URBAIN / AFP

La justice allemande a ouvert une enquête contre un dirigeant d’une organisation religieuse gouvernementale turque, soupçonné d’avoir demandé à ses membres d’espionner, en Allemagne et dans plusieurs pays, des partisans de l’opposant turc Fethullah Gülen, affirment des médias allemands ce vendredi.

Le Parquet fédéral, qui n’était pas joignable ce vendredi soir, avait déjà annoncé mardi avoir ouvert une enquête contre X en réaction aux soupçons d’espionnage pesant sur Ankara.

Des imams, basés en Allemagne, auraient espionné des pro-Gülen

Le même jour, un responsable social-démocrate allemand avait révélé qu’Ankara avait demandé à Berlin de l’aider à espionner 300 personnes et organisations à travers l’Allemagne, jugées proches du mouvement du prédicateur Fethullah Gülen, accusé par Ankara d’avoir fromenté le putsch raté de l’été dernier.

Ce vendredi, le journal Süddeutsche Zeitung et les chaînes de télévision publique régionales NDR et WDR ont annoncé que le Parquet fédéral avait ouvert le 13 mars une enquête contre Halife Keskin, patron de la section Relations étrangères de la Direction des Affaires religieuses en Turquie (Diyanet), qui dépend des services du Premier ministre turc. Selon les trois médias, la justice allemande le soupçonne d’avoir demandé à des membres de Diyanet basés à l’étranger, notamment à des imams en Allemagne, de rassembler des informations sur les personnes jugées proches du mouvement Gülen.

Des surveillances auraient été effectuées dans 35 pays 

Diyanet était déjà plusieurs semaines dans le viseur de la justice allemande : mi-février, les appartements de quatre religieux musulmans, soupçonnés d’avoir espionné en Allemagne des pro-Gülen, avaient été perquisitionnés. Ils étaient soupçonnés d’avoir agi suite à une injonction de Diyanet datant du 20 septembre. L’hebdomadaire allemand Der Spiegel affirme également vendredi que Diyanet a demandé aux ambassades et aux consulats turcs « dans 35 pays » de rassembler des informations sur les partisans de Fethullah Gülen. Der Spiegel cite ainsi des pays comme « la Mauritanie, la Mongolie, le Nigeria ou l’Australie ».

Dans des documents envoyés à Ankara, les représentants diplomatiques turques ont ainsi détaillé par le menu « les activités d’écoles, d’associations ou de médias supposées proches de Gülen ». Ils ont également dressé des listes nominatives de ses présumés soutiens, écrit Der Spiegel. Les relations entre la Turquie et l’Allemagne, ternies sur de nombreux fronts depuis la vaste répression engagée par Ankara après le putsch, se sont fortement dégradées en mars après l’annulation de meetings favorables au président Recep Tayyip Erdogan par plusieurs villes allemandes. Le chef de l’Etat turc avait alors accusé la chancelière Angela Merkel de « pratiques nazies », suscitant l’indignation de Berlin.