Attentat à Berlin: «Il est important de garder notre liberté, même s’il faut parfois en payer le prix»
SECURITE A la suite de l'attentat de lundi, l'Allemagne a pris peu de mesures et les habitants de la capitale reprennent une vie normale…
Pas de sacs fouillés à l’entrée des centres commerciaux, pas d’état d’urgence déclenché… A Berlin, les marchés de Noël ont rouvert et la vie a repris son cours. « On ne ressent aucune différence dans les magasins. Aujourd’hui, j’ai fait des courses et je suis allée à la salle de sport mais personne ne m’a parlé de l’attentat », raconte Johann-Vincent, un Berlinois de 27 ans, étudiant en musique.
Ce jeudi matin, le marché de Noël de Breitscheidplatz, où a eu lieu lundi soir l’attentat à la voiture-bélier qui a fait 12 morts, a même été rouvert après une cérémonie en l’honneur des victimes. « C’est très important de ne pas perdre notre joie de vivre. Ces dernières heures, nous avons été dans le deuil. Mais maintenant, même les familles de victimes veulent que le marché redevienne un lieu d’échange et de paix », explique de sa voix nouée Klaus-Jürgen Meier, le directeur de la société AG City, organisatrice du marché de Noël.
Normal de ne pas se faire fouiller
Dans les rues, Johann-Vincent remarque tout de même plus de policiers en faction avec des armes. « Quand je vois ça, je dois dire que ça m’interpelle quand même. Il y a aussi de gros camions qui stationnent devant les magasins pour faire barrage. Mais je pense que c’est plus une mesure symbolique qu’autre chose », poursuit le jeune homme, qui étudie non loin du lieu de l’attentat. Mais Johann-Vincent ne s’est pas fait fouiller son sac lorsqu’il est allé au cinéma mercredi soir. Et il trouve que c’est normal.
« A Berlin, les fouilles ne sont pas ancrées dans les mœurs comme à Paris. Mis à part aux abords des marchés de Noël et dans les festivals, la sécurité n’est pas renforcée », rappelle Eileen Keller, spécialiste des relations franco-allemandes. Une situation qui ne choque pas l’organisateur du marché de Noël, Klaus-Jürgen Meier. « Il est important de garder notre liberté, même s’il faut parfois en payer le prix. »
Les Allemands peu enclins aux mesures de sécurité
Si les mesures de sécurité peuvent sembler minimes comparées à celles prises après les attentats de Paris, c’est parce que la politique de sécurité allemande est bien différente de la nôtre, selon Jean-Paul Hanon, enseignant chercheur aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan. « Les Allemands ont un faible niveau d’acceptation en matière de sécurité. La mise en place d’un état d’urgence est peu probable, car historiquement, cela leur rappellerait de mauvais souvenirs. Je pense notamment aux troupes de polices nazies puis celles de la Stasi. »
Une impression que confirme Johann-Vincent, qui a visité Paris en février. « J’étais franchement choqué quand j’ai dû ouvrir mon sac à dos pour pouvoir entrer où que ce soit. »
En plus des raisons historiques, Jean-Paul Hanon attribue aussi cette mentalité au rôle que joue la police en Allemagne. « C’est une police de proximité, qui bénéficie d’une très bonne image auprès de la population. Elle est présente sur le terrain pour protéger et défendre, mais sans contrôle au faciès et sans répression, comme chez nous. » Si la présence de la police se fait peu sentir dans les lieux publics, plusieurs opérations antiterroristes sont néammoins en cours dans le pays pour retrouver Anis Amri, un demandeur d’asile tunisien de 24 ans, soupçonné d’être l’auteur de l’attentat, le plus grave jamais revendiqué par le groupe Etat islamique (EI) dans le pays.