Suède: les sociaux-démocrates s'apprêtent à revenir au pouvoir
La Suède devrait connaître l'alternance lors des élections législatives de dimanche, qui devraient voir la victoire des sociaux-démocrates et une poussée de l'extrême droite, en position de brouiller les cartes.
Après huit ans de règne d'une coalition de centre droit, le scrutin devrait porter au poste de Premier ministre Stefan Löfven, 57 ans, un ancien dirigeant syndical aux origines modestes qui n'a jamais été ni élu ni ministre.
Selon un dernier sondage réalisé par Demoskop et paru vendredi, le parti social-démocrate serait en tête avec 29,2% des voix.
Un tel score serait parmi les plus faibles de l'histoire de ce parti qui a largement dominé la vie politique de la Suède, avec des figures comme Olof Palme, et façonné son modèle social et économique.
La tâche de M. Löfven, homme doué pour le rassemblement mais peu charismatique, s'annonce déjà compliquée. Car les votes tels que les prévoient les sondages devraient le confronter à un Parlement fragmenté, où son gouvernement sera très probablement minoritaire.
«Les sociaux-démocrates semblent s'être fixé un but de 35% des votes. Et on dirait qu'ils ne vont pas l'atteindre. Ce serait un problème pour le leadership de Stefan Löfven», estime Mikael Sundström, professeur de science politique de l'université de Lund.
Avant même d'avoir pris le pouvoir, la coalition que M. Löfven devrait constituer avec les Verts et le Parti de gauche est vue comme bancale, traversée par des divergences sur des questions aussi délicates que l'énergie, la défense, la place du secteur privé dans la santé et l'éducation ou l'urgence qu'il y aurait à défaire les réformes libérales du gouvernement sortant.
Vendredi soir, lors de l'ultime débat électoral à la télévision publique, les cravates rouges portées par les chefs des trois partis de gauche, qu'elles aient été concertées ou non, atténuaient l'impression de désunion.
«Il doit y avoir plusieurs ingrédients dans une stratégie pour l'emploi. Investir dans le rail et le logement. Voilà qui donne du travail ici et maintenant. Voilà qui renforce la Suède», a martelé M. Löfven.
Le leader social-démocrate, dont la campagne a été consensuelle, avec comme slogan «Une Suède meilleure, pour tous», s'est voulu offensif, mais n'avait pas l'éloquence d'adversaires rompus à cet exercice.
- Montée de l'extrême droite -
L'autre souci de la gauche est la montée des Démocrates de Suède (extrême droite), entrés au Parlement en 2010 avec 5,7% des voix, et en mesure de doubler ce score. S'ils ont beaucoup voté avec la coalition de droite sortante, qui était minoritaire au Parlement, ils seront moins conciliants avec la gauche.
D'après M. Sundström, même si «personne ne veut coopérer avec eux», ce parti séduit des électeurs opposés au consensus pro-immigration.
L'élection marquera sans doute la fin du règne de Fredrik Reinfeldt, 49 ans, Premier ministre depuis 2006. Celui-ci devrait rester dans l'histoire pour sa gestion habile des effets de la crise économique mondiale et sa capacité à imposer, sans heurter le consensus social, la politique pro-entreprise et la discipline budgétaire qu'il avait promises.
Le parti des Modérés (conservateur et libéral) de M. Reinfeldt devrait arriver deuxième dimanche, avec 20 à 25% des voix.
Même si le Premier ministre reste apprécié des électeurs de droite, il subira la lassitude de l'électorat face à la rigueur. Les électeurs jeunes notamment semblent les plus désireux d'un changement.
La coalition sortante «a peut-être fait une erreur en disant que nous devons faire des économies. Dans une économie qui a toujours un chômage relativement élevé cela n'a pas beaucoup de sens pour beaucoup de gens», estime Lars Magnusson, professeur de politique économique à l'université d'Uppsala.
Les législatives suédoises se déroulent en un seul tour, avec des listes par région. Franchir un seuil de 4% est nécessaire pour être représenté au Parlement.
Les huit formations du Parlement sortant sont bien parties pour y parvenir : trois de gauche (sociaux-démocrates, Verts et Parti de gauche), quatre de la coalition gouvernementale (Modérés, Parti populaire libéral, Parti du centre et chrétiens-démocrates) et une d'extrême droite (Démocrates de Suède). Le parti Initiative féministe pourrait éventuellement faire son entrée pour la première fois, même si les sondeurs lui prédisaient vendredi un échec.
Les bureaux de vote ferment à 20H00 (18H00 GMT) dimanche. Un institut de sondage, YouGov, a promis de premières estimations quatre heures avant cela.