Centrafrique: Où en est la situation?
Vingt-sept musulmans ont été tués jeudi par des milices d'auto-défense chrétiennes dans un village de l'ouest de la République centrafricaine, a déclaré ce vendredi à Genève une porte-parole du Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme. Ces violences interreligieuses interviennent alors que, selon un nouveau bilan donné ce vendredi à Genève par le Haut-commissariat aux réfugiés, une agence de l'ONU, les violences dans le pays sont à l'origine de 600 morts et 159.000 déplacés.
Quelle est la situation humanitaire?
Plus de 600 morts, 159.000 déplacés, selon le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies. «Dans la capitale, Bangui, les combats et les violences sectaires de la semaine écoulée ont mis sur la route quelque 159.000 personnes, et provoqué la mort de 450 personnes, ainsi que de 160 autres dans d'autres régions du pays.» C’est dans la capitale aussi que plus de 45.000 personnes vivraient des conditions sanitaires effroyables sur le site de l’aéroport, selon l’ONG Médecins sans frontières (MSF) qui a adressé jeudi une lettre ouverte à Valerie Amos, secrétaire générale adjointe des Nations unies chargée des affaires humanitaires, pour réclamer des mesures d'urgence.
Est-ce un conflit religieux?
«Selon les informations que nous avons reçues, 27 musulmans ont été tués par des milices d'auto-défense, dites anti-Balaka, dans le village de Bohong», à 75 km de Bouar, a dit à la presse Ravina Shamdasani, une porte-parole du Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme, décrivant «un cercle d'attaque et de représailles continues». «On assiste à des représailles ciblées à la fois contre des villages chrétiens et musulmans, et les civils en sont les premières victimes», observe aussi Human Rights Watch. La population centrafricaine, composée à 80% de Chrétiens, serait, depuis le coup de d’Etat de la Séléka (à majorité musulmane) en mars 2012, prise dans un engrenage de violences interreligieuses, qualifiée par le département d’Etat américain de « prégénocidaire ». Une analyse qui n’est pas partagée par tous les experts de la région, qui conviennent néanmoins de tensions et violences croissantes provoquées par l’instabilité politique du pays.
Quel est le rôle de l’armée française?
François Hollande, le président de la République, qui a décidé de l’envoi de la Force Sangaris dans la foulée du feu vert de l’ONU le 5 décembre 2013, a fixé aux troupes françaises pour objectif de « trouver une solution humanitaire qui passera par une phase sécuritaire, qui débouchera ensuite sur une transition politique» «avant 2015». Mais, pour les 1600 hommes envoyés sur place, l’opération s’avère périlleuse. Deux soldats sont même décédés le 10 décembre 2013. Pour François Géré, directeur de l’Institut français d’analyses stratégiques interrogé par 20 Minutes, « L’opération française est épouvantable car la confusion est totale, le pays est en proie au chaos politique et militaire».
Que font l’ONU et les forces africaines?
«Hollande a raison d’intervenir» en Centrafrique. Pour Kofi Annan, le prix Nobel de la Paix 2001 et ancien secrétaire général de l’ONU, «On ne peut pas s’assoir quand des gens sont en train d'être tués. La communauté internationale doit agir, mais l'ONU est lente, il faut trois ou quatre mois pour constituer une force onusienne. Or, il faut intervenir vite. Alors la France et le président Hollande ont raison d’intervenir» en Centrafrique. Quant aux armées africaines, mal entraînées, mal équipées, elles ne sont pas autonomes, du coup, dans l’Afrique francophone, « c’est un peu l’armée française qui joue le rôle de l’armée nationale », considère le politologue Michel Galy, interrogé par 20 Minutes.