Manifestation en Turquie: Les affrontements se multiplient à Istanbul

PROTESTATION Des milliers de manifestants défilent depuis vendredi pour protester contre le gouvernement turc...

J. C. (avec AFP)
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Des manifestants ont défilé vendredi 31 mai 2013 à Istanbul pour protester contre le gouvernement turc.
Des manifestants ont défilé vendredi 31 mai 2013 à Istanbul pour protester contre le gouvernement turc. — TOPSHOTS/AFP PHOTO/BULENT KILIC

La tension est montée d'un cran dans la nuit. La police  turque a fait usage samedi matin de gaz lacrymogènes aux abords de la  place Taksim, dans le centre d'Istanbul, pour disperser plusieurs  centaines de manifestants au deuxième jours de violentes manifestations  contre le gouvernement turc, a constaté un journaliste de l'AFP.

D'autres incidents signalés à Besiktas

Après un long face-à-face avec des manifestants qui tenaient  une barricade dans l'avenue Istiqlal, une artère piétonne et commerçante  qui mène à la place Taksim, les forces de l'ordre ont tiré une salve de  grenades lacrymogènes pour disperser la foule. D'autres incidents ont été signalés un peu plus tôt dans la  matinée dans le quartier de Besiktas, lorsqu'un groupe de manifestants  venus du la rive anatolienne de la mégapole turque a traversé un pont  sur le barrage et a été dispersé par la police, ont rapporté les médias  turcs.

 

Ce mouvement de protestation, l'un des plus importants  dirigés contre le pouvoir islamo-conservateur depuis son entrée en  fonction en 2002, est parti d'une manifestation contre un projet  d'aménagement urbain contesté à Istanbul et a fait plusieurs dizaines  dizaines de blessés vendredi à Istanbul.

En fin de matinée, les grands axes menant à la place Taksim  étaient barrés par d'importantes forces de police. Au terme d'une journée et d'une nuit d'émeutes, cette place,  célèbre pour être un des rendez-vous traditionnels de la contestation à  Istanbul, et les rues environnantes étaient jonchées samedi matin de  débris et leurs commerces n'ont rouvert leurs portes que très prudemment  aux riverains et aux touristes. Des dizaines de manifestants ont été blessés au cours des  affrontements de vendredi, Amnesty International évoquant pour sa part «plus d'une centaine» de blessés.

Protestation politique

Les autorités n'ont donné aucun décompte précis. Vendredi en  fin de journée, le gouverneur de la ville Huseyin Avni Mutlu s'est  contenté d'indiquer que 12 personnes étaient toujours hospitalisées en  fin de journée, dont une femme victime d'une fracture du crâne, et qu'au  moins 63 personnes avaient été interpellées.

Le mouvement est parti vendredi à l'aube avec l'intervention  musclée de la police pour déloger quelques centaines de militants qui  occupaient depuis trois jours le parc Gezi, sur la place Taksim, pour y  empêcher le déracinement de 600 arbres dans le cadre d'un projet  d'aménagement urbain très contesté.



Ameutés par les réseaux sociaux, les militants associatifs  ont afflué pour prêter main forte aux manifestants et dénoncer la  politique du gouvernement islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002.  Les affrontements se sont poursuivis jusqu'au petit matin. «Les arbres, c'est juste la goutte d'eau qui fait déborder le  vase. Les gens en ont ras-le-bol de tout ce que ce gouvernement leur  fait», a déclaré dans la nuit un jeune manifestant.

Dès vendredi soir, la contestation partie d'Istanbul s'est  propagée à d'autres villes du pays, comme à Izmir (ouest), Antalya (sud)  ou la capitale Ankara, où des incident sont opposé la police à des  manifestants qui voulaient marcher sur le parlement. Partout, les manifestants ont dénoncé la répression à  Istanbul et accusé le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan d'atteintes  aux libertés.

Erdogan accusé de vouloir «islamiser» la société turque

L'opposition politique a pris le relais de ces critiques en  s'affichant avec les protestataires. Le président du Parti républicain  du peuple (CHP), le principal rival du gouvernement, Kemal Kiliçdaroglu,  a appelé Erdogan à retirer la police des rues d'Istanbul. A l'appel des réseaux sociaux et du CHP, une manifestation de  protestation est prévue samedi après-midi sur la rive asiatique  d'Istanbul.

Si le revenu par habitant a triplé en Turquie depuis  l'arrivée au pouvoir de son Parti de la justice et du développement  (AKP) en 2002, Erdogan est accusé de dérives autoritaires et de  vouloir «islamiser» la société turque. La semaine dernière, le vote d'une loi restreignant la  consommation et la vente d'alcool a ainsi suscité l'ire des milieux  libéraux. Muet sur ces événements depuis vendredi, le chef du  gouvernement avait fait savoir mercredi qu'il ne reculerait pas. «Faites  ce que vous voulez, nous avons décidé», avait-il lancé à ses  détracteurs.