Bangladesh: L'industrie textile ébranlée après l'effondrement d'un immeuble à Dacca

MONDE Des centaines d'usines vont être fermées «jusqu'à nouvel ordre»...

A.Ch. avec AFP
— 
Les recherches se poursuivaient le 11 mai 2013 sous les décombres de l'usine textile effondrée le 24 avril au Bangladesh, près de Dacca.
Les recherches se poursuivaient le 11 mai 2013 sous les décombres de l'usine textile effondrée le 24 avril au Bangladesh, près de Dacca. — KHAN PALASH/SIPAUSA/SIPA

Après l’effondrement d’une usine textile près de Dacca, au Bangladesh, qui a fait 1.127 morts, les ouvriers des «ateliers de la misère» n’ont pas l’intention de laisser les industriels enterrer l’affaire. Le vice-président de l'Association des fabricants et exportateurs de textile a déclaré ce lundi à l’AFP que des centaines d'usines du secteur allaient devoir fermer pour une durée indéterminée en raison de «l'agitation» d'ouvriers. «Nous avons pris cette décision pour assurer la sécurité de nos usines», a déclaré Shahidullah Azim.

«Pratiquement aucun travail» depuis deux semaines

Dans cette zone industrielle, située à une trentaine de kilomètres de Dacca, se trouvent certaines des usines les plus importantes du pays, qui en compte 4.500. Selon Shahidullah Azim, il n'y a eu «pratiquement aucun travail» dans ces usines au cours des deux dernières semaines après le début de manifestations d'ouvriers en colère contre les conditions de travail et de sécurité. Selon le chef de la police d'Ashulia, Badrul Alam, la zone industrielle abrite environ 500 usines, dont une centaine d'usines-clés, qui fabriquent de la confection pour des marques occidentales telles que l'Américain Walmart, le Suédois H&M, l'Espagnol Inditex ou le Français Carrefour. «Dans 80% des usines, les ouvriers ont débrayé aujourd'hui (lundi) pour demander des hausses de salaires», a indiqué Badrul Alam à l'AFP, précisant qu'ils réclamaient aussi l'exécution du propriétaire de l'immeuble qui s'est effondré le 24 avril. 

Le géant suédois H&M a pris les devants afin d’éviter que son image ne pâtisse de la catastrophe: le groupe a annoncé lundi avoir signé un accord à l’initiative des syndicats pour améliorer la sécurité des usines textiles au Bangladesh. Cet accord prévoit entre autres qu’un «inspecteur en chef» indépendant des entreprises et des syndicats «conçoive et mette en oeuvre un programme d'inspection de la sécurité incendie crédible et efficace». Il prévoit également «un ou plusieurs experts qualifiés» devant «mener à bien un examen complet et rigoureux des normes et règlements actuels dans le bâtiment pour les entreprises de prêt-à-porter».

«Nous ne voulons pas vendre du travail d'esclaves»

Mais pour le prix Nobel de la paix et «père» du microcrédit Muhammad Yunus, l’urgence est aussi d’augmenter les salaires des ouvrières du textile: «Nous ne voulons pas vendre du travail d'esclaves pour construire notre économie. Nous voulons vendre nos talents», a déclaré Muhammad Yunus, le fondateur de la banque de microcrédit Grameen Bank, lors d'un colloque à Dacca. Le ministre bangladais du Textile avait annoncé dimanche la mise en place d’une commission pour augmenter le salaire minimum des ouvriers, qui frôle actuellement les 30 euros par mois.

L'effondrement de l’immeuble de neuf étages à Savar, dans la banlieue de Dacca, est la pire tragédie industrielle du pays. Le bâtiment abritait cinq ateliers de confection et employait plus de 3.500 ouvriers du textile. Certains avaient signalé la veille du drame des fissures sur le bâtiment mais leurs responsables leur avaient demandé de reprendre le travail. Le Bangladesh est le deuxième exportateur au monde de vêtements en raison de la modicité des salaires et d'une main-d'oeuvre abondante. Ce secteur-clé de l'économie, qui génère 29 milliards de dollars par an, représentait l'an dernier 80% des exportations du pays.