« C'est du lelouch, ce truc ! »
En novembre, l'aile D du palais de justice de Tours a été transformée pendant quelques jours en plateau de tournage. Devant les caméras d'Arte, Philippe Torreton, dans le rôle de Paul Villers, mari accusé du meurtre de sa femme. Mais aussi Me Françoise Cotta, vraie avocate pénaliste dans la vie, qui a la charge de le défendre, ou Jean-Claude Kross, procureur général à la retraite, qui a remis sa robe d'hermine le temps d'un tournage. Le projet s'appelle « Intime conviction ».
Des pointures judiciaires
En septembre 2013, la chaîne diffusera un téléfilm racontant l'histoire de Paul Villers et laissant en suspens la question de sa culpabilité. La suite se déroulera sur le site Web d'Arte. Là, les internautes seront invités à se glisser dans la peau d'un juré, à regarder jour après jour le déroulement du procès de Paul Villers, tel qu'il a été tourné dans la salle d'audience de Tours. A eux de se forger une intime conviction. « C'est un truc de dingue, explique Françoise Cotta entre deux prises. On est tous schizophrènes, on a oublié qu'on n'était pas dans un vrai procès. Moi, j'appelle Torreton “Paul”, pas “Philippe” ! Le matin, je ne comprends pas quand on me dit qu'il faut passer au maquillage. » Même impression pour Jean-Claude Kross : « Quand j'étais procureur dans le procès des écoutes de l'Elysée, j'avais un lumbago. Et bien là, j'ai à nouveau mal au dos. » Tous jouent tellement le jeu que l'après-midi, une querelle opposera les avocats pour déterminer qui plaidera le premier. Laissant le producteur un brin médusé devant un scénario qu'il ne contrôle plus. « La difficulté, note Denis Poncet, c'est d'articuler scénario et fiction. Parfois, les avocats poussent hyper loin les témoins joués par des acteurs, qui ne savent plus quoi répondre. » Seule différence, selon le procureur, « le soutien de la prod. L'autre jour, je n'avais pas eu le temps d'acheter un bouquet de fleurs pour une invitation. Ils s'en sont occupés ! » Vrai tribunal, vrais magistrats, faux personnages « C'est du Lelouch, ce truc ! » s'exclame-t-il.
philippe torreton
Ce matin-là, Paul Villers, mari accusé de meurtre, interprété par Philippe Torreton, quitte la barre pendant l'audience, « écœuré par le spectacle ». De l'avis des professionnels de la justice, le comédien « est extraordinaire ». Lui profite de la pause déjeuner pour confier son « intérêt pour la notion d'intime conviction, pas simple à appréhender ».