Marseille: Sylvain Saadoun condamné à six mois avec sursis pour dénonciations mensongères

JUSTICE Cette condamnation ne sera pas inscrite à son casier judiciaire...

Mickael Penverne
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Tzion Sylvain Saadoun.
Tzion Sylvain Saadoun. — AFP

Sylvain « Tsion » Saadoun a été condamné jeudi à six mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Marseille, qui a suivi les réquisitions du procureur. Cet enseignant juif, âgé de 58 ans, a été déclaré coupable de dénonciations mensongères. Le 18 novembre 2015, il avait déclaré à la police avoir subi une agression violente à caractère antisémite dans le 13e arrondissement.

Ce soir-là, Sylvain Saadoun quitte son domicile pour se rendre à la synagogue du quartier. Il emprunte la traverse des cyprès, une artère étroite et mal éclairée, quand trois individus arrivent en scooter et l’interpellent. Ils lui demandent s’il est juif ou musulman - Sylvain Saadoun portait une kippa. Ils se mettent à l’insulter, à le menacer de mort puis à le frapper. D’abord, à coups de poing et de pied puis, à coups de couteau dans l’abdomen, sur les jambes et les avant-bras.

Pas de concordance

Un des agresseurs lui exhibe son tee-shirt avec le drapeau de Daesh. Un autre lui montre son téléphone portable avec la photo de Mohamed Merah. Et le troisième filme l’agression. Sylvain Saadoun ne doit la vie sauve qu’au passage d’une voiture au bout de la traverse qui met en fuite les agresseurs. L’affaire, qui intervient cinq jours après les attentats de Paris, provoque une très vive émotion à Marseille et rencontre un écho médiatique national et international. Le problème, c’est que les policiers ont rapidement des doutes sur la véracité des propos de l’enseignant de l’école Yavné.

Le premier certificat médical, établi à l’hôpital militaire de Lavéran, évoque des « plaies superficielles », « régulières » et « de type scarification ». Un second certificat médical établi par l’unité médico-judiciaire de l’hôpital de La Timone évoque des blessures « qui ont la même profondeur ». Les pompiers, qui ont l’habitude des agressions à l’arme blanche, font part également de leurs soupçons aux enquêteurs. L’un d’entre eux s’étonne, par exemple, qu’il n’y ait pas eu d’intention de « planter » le couteau.

Enfin, un dernier médecin, qui travaille sur les photos de la victime, observe qu’il n’y a pas de concordance entre les entailles des vêtements et les blessures. Les premières sont verticales et les secondes horizontales. Il en conclut que l’hypothèse la plus probable est une « automutilation ». Convoqué par les enquêteurs, Sylvain Saadoun maintient pourtant ses déclarations. Jeudi, à la barre du tribunal, il l’a répété : « Ma version est toujours la même (…). Je ne vois pas quel intérêt j’aurais eu à m’automutiler », indique-t-il d’une voix claire.

Comme un gosse

Les policiers ont pourtant une hypothèse. L’enseignant se serait fait ces blessures pour tenter de retenir sa femme qui s’apprêtait à le quitter. Appelée à la barre, son épouse a confirmé le processus de séparation qui durait « depuis un an et demi ». « Mais je le crois incapable » de dénonciations mensongères, a-t-elle ajouté. Le procureur rappelle alors que l’enseignant avait subi une intervention chirurgicale quelques semaines auparavant. Et « comme une bonne épouse, elle est restée à son chevet » pendant sa convalescence. Mais, une fois rétabli, « elle lui a dit qu’elle allait le quitter ».

Selon l’accusation, cette agression n’a donc « jamais existé ». Un, parce que « la violence verbale des agresseurs », qui ont menacé de mort Sylvain Saadoun, « entre en contradiction avec les actes (…) et la précision quasi-chirurgicale de ne pas faire trop mal ». Deux, parce qu'en fait, l’enseignant a cherché à attirer l’attention de celle qu’il aimait. « Un peu comme un gosse, quoi (...). Le problème, c’est qu’il n’a pas eu l’intelligence de penser que cela allait prendre de telles proportions », a conclu le procureur.