Journée des droits des femmes: Supporter l'OM quand on est une femme, encore compliquée en 2016?
FOOTBALL Il y a de plus en plus de supportrices au Vélodrome...
Faites le test. Tapez « supportrice OM » dans Google Images. Ça vous donnera une réponse rapide à balancer à ceux qui se demandent à quoi sert la journée des droits des femmes. Pour la science, 20 Minutes a testé, voilà le résultat :
Le moteur de recherche nous suggère même de reformuler notre requête en « supportrice OM sexy », comme vous pouvez le voir en haut à gauche. Même sans tenter le diable, les premiers résultats sont assez clairs : A part la tenniswoman retraitée Marion Bartoli, soutien inconditionnel du club, et Christine Vallette, Ultra décédée en décembre, on ne voit que des femmes à moitié nues dans des positions lascives, un ballon entre les cuisses ou un logo tatoué sur la fesse.
Les « cagoles » ont lancé le mouvement chez les MTP
A Marseille pas plus qu’ailleurs, les femmes en lien avec le foot sont souvent réduites aux « Wags » (wives & girlfiends/épouses et petites amies), acronyme donné aux compagnes de footballeurs. Et bien qu’en passe d’atteindre la D1, les féminines de l’OM cartonnent encore dans l’ombre. Pourtant, au Vélodrome particulièrement, le stade se féminise. « Il y a plein de femmes au stade », assure Cécile Hibernac, supportrice MTP (Marseille Trop Puissant), depuis une trentaine d’années. Le 8 mars 1997, Cécile a créé avec une poignée d’autres nanas dingues de l’OM, les « cagoles ». Un groupe de supporters composé uniquement de femmes.
« On a décidé de se lancer le 17 mai, pour un OM-PSG, se souvient la fan. C’était pour délirer, pour faire une surprise à Depé qui nous rendait toutes chèvres. » Ce soir du printemps 97, elles ont débarqué dans le virage nord, paillettes et plumes sur la tête, alors que la sono crachait du Donna Summer. Une histoire de bande de potes, plus que de revendications, pour celle qui va au stade depuis qu’elle est enfant, « qu’avec des mecs ».
A la TV, les femmes ne donnent pas leur avis
Pour les moins aguerries, l’intégration n’est pas toujours aussi fluide. Najet Rami est plutôt connue des supporters marseillais. La passionnée de foot fait partie des commentateurs stars des performances de l’OM sur Twitter. Depuis trois ans, elle est une des intervenantes régulières de l’émission hebdomadaire du Phocéen, site spécialisé du foot marseillais. La Corse d’origine a même déjà donné de la voix sur les ondes de RMC. Bien seule au milieu des commentateurs de sexe masculin.
« A la télé, on met les femmes à la présentation, regrette-t-elle, elles font le relais, lisent des tweets mais pas plus. On m’a déjà proposé ça, j’ai stoppé direct. » Najet, elle, donne son avis et sans mâcher ses mots. Peu importe si « t’as encore des gens qui arrivent à être étonnés en 2016 de voir une nana L’Equipe à la main ».
« Faut pas que je te présente mon mec »
La jeune femme de 29 ans en rigole. Mais n’oublie pas. « Quand je vois un [Christophe] Dugarry que j’aime beaucoup, qui avoue à l’antenne ne pas connaître la Série A et la phrase d’après, qui la descend en disant que c'est un championnat "minimaliste", je ne peux que me dire, moi je le connais ce championnat italien, je suis une femme et j’en sais plus que toi (...) Un mec, on dira toujours qu' il est con, c’est pas grave, une fille ce sera tout de suite : "Retourne à la cuisine". »
Et les principales discriminées ne sont pas les dernières à lâcher des énormités : « "Faut pas que je te présente mon mec", combien de fois je l’ai entendu », rit Najet.
Un peu comme il y a 20 ans, lorsqu’une « cagole » se faisait invectiver en virage. Mains aux fesses, « picole » mal vue, « un mec, quand il donne son avis sur un joueur, on l’écoute, on lui répond "ouais, t’as raison" même s’il dit des conneries, écrit avec dérision le site du groupe. Une cagole, si elle donne son avis sur un joueur, on la regarde en pensant : "Non mais de quoi elle se mêle celle-là ? Elle a préparé l’aïoli à son mec au moins ?", même si elle a raison. »
Deux décennies plus tard, Cécile n’ose plus qualifier le foot marseillais de macho. Najet, sûre d’elle, balaye les miettes. On ne sait pas qui prépare l’aïoli aujourd’hui, mais visiblement, la mayonnaise commence à prendre.