A Lyon, la start-up WeCount démocratise l’accès au bilan carbone

COMPORTEMENT D’ici 2050, les entreprises doivent viser la neutralité carbone pour respecter les Accords de Paris. À Lyon, la start-up WeCount propose des bilans collectifs pour permettre à chacun de passer à l’action

Mathilde Beaugé
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Les trajets des collaborateurs sont une source considérable de gaz à effet de serre, mais ce n'est évidemment pas la seule ni la plus importante au sein d'une entreprise ou d'une institution.
Les trajets des collaborateurs sont une source considérable de gaz à effet de serre, mais ce n'est évidemment pas la seule ni la plus importante au sein d'une entreprise ou d'une institution. — GibsonPictures / Getty Images

Jus de fruits bio, viennoiseries locales et capsules de café recyclables : dans une salle de l’incubateur lyonnais H7, Antonin Guy, patron de la jeune start-up WeCount, reçoit pour le petit-déjeuner les participants de sa première « Promotion Climat » . Trois mois après la fin de leur formation dédiée à l’élaboration d’un bilan carbone, plusieurs entreprises lyonnaises sont invitées à se retrouver pour faire le point. Ce matin-là, les profils sont éclectiques : une représentante du fonds d’investissement Axeleo discute avec l’équipe du club de jazz Le Périscope pendant que la directrice de l’Auditorium de Lyon partage son expérience avec des membres de l’Ecole normale supérieure ou des brasseries Ninkasi.

Le cofondateur de la startup WeCount, Antonin Guy.
Le cofondateur de la startup WeCount, Antonin Guy. - M. Beaugé / 20 Minutes

« Près de 80 % des dirigeants d’entreprises sont conscients de l’urgence climatique, mais combien réfléchissent à un plan d’action pour 2030 ? », questionne Antonin Guy. Avant de créer WeCount, le trentenaire a commencé par faire un tour du monde en voiture électrique, puis s’est lui-même formé à la méthodologie carbone. Il accompagne aujourd’hui les entreprises sur deux volets : une plateforme technologique et des programmes de formation collective. « Donner l’outil pour être capable d’établir un bilan carbone, c’est bien, mais ce n’est pas suffisant. Il faut mettre en mouvement, former, accompagner », explique l’entrepreneur. Son objectif ? Amener ses clients à réduire leurs émissions de 25% d’ici 2030.

Antonin Guy sur la plateforme de calcul de bilan carbone qu'il met à disposition des entreprises, associations, clubs ou institutions formées par WeCount.
Antonin Guy sur la plateforme de calcul de bilan carbone qu'il met à disposition des entreprises, associations, clubs ou institutions formées par WeCount. - M. Beaugé / 20 Minutes

Les structures culturelles pionnières

Pour les profanes, la question de l’empreinte carbone est plutôt technique, « voire illisible » sourit Anabelle Bourotte, administratrice des salles de concert chez Ninkasi. Pourtant, la jeune femme n’envisage pas d’exercer son métier sans se préoccuper des sujets liés au développement durable : « En tant qu’entreprise culturelle, nous devons prendre nos responsabilités. Notre sensibilité était déjà là, on a eu envie de la quantifier pour mesurer notre impact et mettre nos énergies sur les bons combats ».Un travail de collecte et d’analyse de données qu’elle a mené au cours de la formation puis en interne, pour aboutir à des actions concrètes : repenser la logistique pour éviter certains déplacements, consigner les bouteilles ou réduire la part de viande sur la carte, par exemple.

Sans être les entreprises les plus émettrices de CO₂, les structures culturelles consacrent une place importante à ces sujets dans leur stratégie de développement. « Nous sommes subventionnés, il est de notre devoir d’être exemplaires », défend Garance Amieux, chargée de coordination au Périscope. Nichée derrière la gare de Perrache, la salle de jazz est labellisée Scène de musiques actuelles par le ministère de la Culture, ce qui lui permet de rayonner auprès d’autres structures, jusqu’à l’échelle européenne. Cette coopération permet par exemple de réfléchir à un système de « slow touring », où les artistes se rendent d’une salle à l’autre sans jamais prendre l’avion.« Notre impact le plus fort reste celui des déplacements : les nôtres, ceux des artistes, et ceux du public. Nous devons travailler avec tout notre secteur pour limiter le bilan carbone des salles rurales ou sensibiliser les producteurs. On ne peut pas être dans la compétition, il faut se partager les informations », poursuit Garance.

Pour réduire son impact carbone, Le Périscope, salle de concert culte de Lyon, prévoit de végétarianniser une grande partie de la carte de son espace de restauration.
Pour réduire son impact carbone, Le Périscope, salle de concert culte de Lyon, prévoit de végétarianniser une grande partie de la carte de son espace de restauration. - M. Beaugé / 20 Minutes

Une transition adaptée à chaque secteur

Se rencontrer, échanger sur des enjeux communs, embarquer son secteur d’activité : dès le 24 novembre, une dizaine d’organisations culturelles de la région Auvergne-Rhône-Alpes se réuniront pour une nouvelle Promotion Climat spécialement dédiée. Au programme, la gestion des tournées d’artistes, l’écoconception des œuvres, le traitement des déchets ou le financement d’une transition écologique. « Aujourd’hui, nos promotions sont mélangées, le Crédit Mutuel réalise son bilan carbone aux côtés d’Adecco ou d’une cantine de quartier. À terme, nous souhaitons sectorialiser les formations pour aller plus loin dans les échanges », évoque Marine Fouquet, cofondatrice de WeCount.

Dans le domaine de la culture, les directions semblent prêtes à s’investir pour intégrer le sujet aux réunions d’équipe : « C’est la bonne temporalité pour intégrer ces questions, le contexte y est favorable », raconte Elisabeth Tugaut, directrice des publics de la Biennale de Lyon et future participante de la Promotion Climat, en évoquant les subventions de la nouvelle mairie écologiste. De quoi inciter d’autres secteurs d’activité à se fédérer, pour une transition bas carbone à grande échelle.