L'histoire s'écrit douloureusement pour les héros du «Pacte», notre feuilleton

SERIE Retrouvez les épisodes de la semaine du feuilleton littéraire Le Pacte, à lire dans chaque numéro de «20 Minutes»...

Emily Chain et Anaël Verdier (Rocambole)
Assis sur un fauteuil faussement rembourré, l’écrivain guette l’oiseau bleu, signe d’une histoire fantastique
Assis sur un fauteuil faussement rembourré, l’écrivain guette l’oiseau bleu, signe d’une histoire fantastique — GettyImages

Dans chaque exemplaire de 20 Minutes, vous retrouvez désormais un feuilleton écrit par la team Rocambole. Rocambole, c’est l’app (Android, iOS) sur laquelle vous êtes déjà plus de 60.000 à aimer lire tous les jours ! Elle propose des histoires 100 % exclusives, en épisodes de 5 minutes, sur votre smartphone.

Dans « Le Pacte », écrit par Emily Chain et Anaël Verdier, quatre amis se font la promesse de tout faire pour réaliser leur rêve. Si vous avez raté le début, rendez-vous sur notre site ou téléchargez l’app Rocambole ! Voici les épisodes de la semaine du 28 juin pour celles et ceux qui les ont ratés…

Épisode 12 – Instabilité ou liberté ?

Le petit coup de mou d’il y a quelques jours est terminé. Antoine commence aujourd’hui une nouvelle mission et il a hâte.

Quand il voit le numéro de Carole s’afficher, il n’hésite pas : 

— Bonjour, comment tu vas ? 

— Antoine, tu réponds… 

Elle paraît soulagée, c’est mauvais signe. 

— Viens à l’agence dès que tu peux. 

— Impossible, tu m’as déniché un super job à l’association de… 

Elle le coupe. 

— Ils ne prennent plus personne. Trois cas COVID en quelques jours, ils ont décidé de tout fermer pendant deux semaines. 

— Oh… 

Impossible pour lui de tenir 2 semaines sans boulot et elle le sait très bien. 

— Mais ne t’inquiète pas ! On va trouver. 

Il inspire en essayant de garder loin de son esprit les réflexions de ses amis. 

”C’est incertain comme métier”, juge sans cesse Samia. 

”Aucune perspective de croissance”, argumente Louise. 

”Tu ne peux pas t’épanouir sans cadre”, insiste Assane. 

Pour une fois, les trois sont d’accord. 

— Tu as autre chose pour moi ? 

La voix d’Antoine n’est pas assurée. Il raccroche et marche jusqu’à la première station de bus pour ne pas perdre de temps. La pluie commence à tomber rageusement sur les pavés et il n’a plus le cœur à braver le froid. Comment Louise peut-elle mener à bien son travail et son projet de monter une maison d’édition, alors qu’il ne sait même pas si sa mission arrivera jusqu’au bout, ni même si elle débutera... C’est cette question qu’il se pose quand son téléphone vibre et affiche le nom d’Assane. 

Épisode 13 – Livraison de bonheur

Ce qu’ils sont beaux, se réjouit Louise en laissant sa main glisser sur le plastique tendu. Un livreur vient de déposer une palette de livres dans la cour de son immeuble. Le premier tirage de L’Affaire Bloominsky, sixième titre de son catalogue. 

Louise n’imaginait pas, quand elle a monté son projet de première année d’école de commerce, qu’elle le porterait aussi loin. À l’époque, quand le prof avait conseillé : “Choisissez un domaine que vous aimez. Ne cherchez pas LA grande entreprise de votre vie, c’est un exercice en situation réelle”, elle avait tout de suite pensé aux romans qu’elle dévorait sans compter.

Au départ, il était juste question de faire entrer la littérature dans l’école de commerce, mais à force de rencontres, l’idée avait grandi. En élève appliquée, Louise avait planché sur les chiffres, étudié les tendances et choisi le polar, moins par amour du genre que pour son potentiel commercial. Voilà comment cinq ans plus tard, elle dirigeait, seule depuis sa chambre, sa propre maison d’édition.

Je peux être fière, se félicite-t-elle en extirpant l’un des livres de la pile. Elle caresse sa couverture et s’emplit du parfum du papier tout juste sorti des presses. Le plaisir qu’elle ressent est presque charnel. Dans quelques jours, elle sera à la convention du polar avec Antoine, à qui elle compte bien transmettre quelques notions de business ! Elle sait déjà ce qu’elle dira pour le motiver : « Travailler à ta réussite, c’est ça, vivre vraiment. »

Épisode 14 – Quoi écrire ?

Avec Antoine pour complice, Assane a réussi à s’évader quelques jours loin de la ville et de son tumulte anxiogène. Après moult réflexions il en est venu à la conclusion qu’il n’arrivait pas à écrire à cause du lieu. Chaque grand écrivain a un endroit pour se ressourcer et c’était la corde qui manquait à son arc. Le voici donc assis devant une table en chêne massif, une fenêtre donnant sur un paysage bucolique et une bûche dans la cheminée. Le cliché idéal pour ne plus avoir de fausses excuses. Ses doigts effleurent le clavier, il se sent prêt à toucher son rêve.

« Il était… »

Il efface. Hors de question de commencer son roman par une phrase aussi banale. Mais comment démarrer le livre de l’année ?

« Pour débuter… »

Non !

« Lors de son enfance… »

À qui ?

Aucune trame ne se dessine devant lui et il commence à partager la frustration de ses élèves devant leur copie.

— Bon sang, ça ne doit pas être si compliqué pour un prof de français d’aligner les mots, non ? Un chapitre ce n’est qu’un bon millier de mots enchaînés !

Agacé, il se met à décrire ce qui l’entoure sans prendre la peine de cacher son sarcasme. 

« Assis sur un fauteuil faussement rembourré, l’écrivain guette l’oiseau bleu, signe d’une histoire fantastique, au lieu de cela, une grisaille persistante et un brouillard épais l’empêchent de regarder à l’extérieur. La bûche craque sans cesse, le faisant sursauter. Son écriture est aussi fumeuse que le bois dans la cheminée. » Fin.

— Si avec ça je ne gagne pas un prix !