Rhône-Alpes : La clairette-de-Die veut-elle copier le cerdon ?
VIGNOBLES Les producteurs du Bugey reprochent à leurs homologues de la Drôme de vouloir s'implanter sur le marché du vin rosé pétillant...
La guerre des vignes était-elle déclarée ? En tout cas les producteurs de cerdon (Ain) s’inquiètent grandement de la nouvelle idée des vignerons de Die (Drôme) : produire une clairette rosée pétillante en mode ancestrale… comme le cerdon, en somme. Or jusque-là, la clairette provenait uniquement de cépage blanc et non de gamay.
« Obtenir une AOC (appellation d’origine contrôlée) demande un savoir-faire, une histoire. Il faut prouver une antériorité. On ne peut pas modifier un cahier des charges comme cela », indique le syndicat des vins du Bugey.
« Attaques injustifiées »
« Nous ne sommes pas allés chercher notre gamay dans d’autres exploitations, à droite et à gauche. Nous ne l’avons pas planté il y a seulement trois ans puisque nous en cultivons depuis 300 ans. Un dixième de nos vignobles est composé de muscat rouge qui résulte de la mutation génétique du muscat blanc », répond Marie Lafargue du syndicat de la Clairette-de-Die, parlant d' « attaques injustifiées ».
« L’utilisation du cépage gamay ne leur est pas réservée. Nous ne sommes pas des industriels qui visent le marché du rosé », insiste-t-elle. Les viticulteurs de Die ambitionnent de fabriquer entre 8.000 et 9.000 hectolitres de leur nouveau breuvage, soit 10 % de leur production totale du vignoble.
« Nous ne pesons pas lourd face à eux »
« Il n’est pas question de supplanter le blanc. Il s’agit de volumes complémentaires. Notre objectif n’est pas non plus de mettre à mal l’économie du cerdon même si le cerdon n’a pas le monopole du rosé », précise Marie Lafargue. Des arguments qui ne rassurent guère les producteurs du Bugey fournissant 15.000 hectolitres de cerdon par an.
« Nous sommes un petit vignoble, nous ne pesons pas lourd face à eux », réagit l’un des viticulteurs du Bugey. « Avant il y avait une concurrence saine. Ils ont beau dire que nous ne sommes pas sur les mêmes créneaux, c’est faux. Comment vont réagir les clients dans les rayons lorsqu’ils verront deux vins produits de manière ancestrale ? Ils prendront le moins cher. Or, on sait que les producteurs de Die pratiquent une politique des prix très agressive ».
L’INAO en arbitre
L’INAO, institut national de l’appellation d’origine doit désormais arbitrer ce différend. « Il ne peut pas laisser faire ça. Cela risque de créer un précédent, s’inquiète un producteur du Bugey. On ne peut pas créer une couleur avec l’apport de nouveaux cépages non historiques. Cela serait lourd de conséquence pour tout le monde. Cela introduirait une sorte de libéralisme au sein de l’AOC. » La réponse est attendue avant la fin de l’été.