VIDEO. Arrêté anti-pesticides : Villeneuve-d’Ascq avec ses 62.000 habitants veut « faire pression sur le gouvernement »

ENVIRONNEMENT Villeneuve-d’Ascq vient de rejoindre le groupe des maires qui entendent lutter contre l’utilisation de produits phytosanitaires, jugés dangereux, dans leur commune

Gilles Durand
Manifestation, le 22 août 2019, devant le tribunal administratif de Rennes, en faveur du maire de Langouët qui a interdit l'usage de pesticides dans sa commune.
Manifestation, le 22 août 2019, devant le tribunal administratif de Rennes, en faveur du maire de Langouët qui a interdit l'usage de pesticides dans sa commune. — AFP
  • Villeneuve-d’Ascq fait partie de la cinquantaine de communes françaises qui ont partiellement ou totalement interdit l’usage de pesticides et d’herbicides.
  • Dans le Nord, quatre communes de l’Avesnois qui ont pris ce genre d’arrêté risquent de faire face à un recours administratif de la part de la préfecture.
  • Entre 2009 et 2016, la consommation annuelle de pesticides est restée stable dans les Hauts-de-France, malgré les promesses de baisse.

Un allié de poids dans l’engagement contre les produits phytosanitaires. A son tour, la mairie de Villeneuve-d’Ascq a pris, la semaine dernière, un arrêté interdisant, cette fois, l’utilisation précise du  glyphosate sur le territoire de sa ville. Cette décision, illégale selon la préfecture, s’associe « au mouvement citoyen des maires et communes contre le glyphosate », indique, dans un communiqué, le maire (DVG) Gérard Caudron.

Selon une enquête de France Inter, une cinquantaine de communes sont engagées dans ce combat qui vise plus généralement les  pesticides, herbicides et autres fongicides, à l’image  du maire de Langouët, en Bretagne. Comme ce dernier, le maire de Villeneuve d’Ascq va-t-il se retrouver devant le tribunal administratif ?

Opposition de la préfecture

Dans le Nord, quatre communes de l’Avesnois attendent cette convocation judiciaire. En mai, elles étaient six avoir pris un arrêté contre l’utilisation de produits phytosanitaires à moins de 100 m des habitations et l’obligation de déclarer les traitements agricoles 48 heures à l’avance.

« Nous étions les premiers en France, explique François Louvegnies, maire de Trélon. J’avais pris la distance de 100 m car c’est celle exigée pour des installations classées genre poulailler agricole. J’estime que la nuisance de ces produits est identique. »

Le 4 juillet, la sous-préfecture d’Avesnes-sur-Helpe demandait la suspension de ces arrêtés, argumentant qu’un arrêté préfectoral de 2016 fixait déjà une distance minimale de 5 ou 50 mètres des lieux « sensibles », en fonction des cultures. Deux communes ont obtempéré. Pas les autres. « Il y a urgence à protéger la santé des personnes susceptibles d’entrer en contact avec ces produits de traitements », précise le maire de Trélon.

Mauvaise évaluation des pesticides

En ralliant le mouvement, Villeneuve-d’Ascq (62.000 habitants) entend « faire pression sur le gouvernement dont c’est la compétence de prendre des mesures légales nécessaires pour protéger nos populations », écrit Gérard Caudron. Ce dernier s’appuie sur la Charte de l’environnement – qui date de 2004 – évoquant que le principe de précaution est nécessaire « lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état actuel des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement ».

Il se base aussi sur un rapport rendu en 2015 par le Centre international de recherche contre le cancer (CIRC) qui avait classé le glyphosate comme « cancérogène probable ». En 2017, le Parlement européen avait déjà demandé aux états membres d’interdire l’utilisation de cette substance par les particuliers.

« La mémoire collective a oublié les décès causés par les champignons toxiques, comme l’ergot du seigle », déplore pour sa part Jean-Christophe Rufin, vice-président du syndicat agricole FDSEA dans le Nord, pour qui ce sont des arrêtés « inapplicables » relevant du « populisme en période électorale ».

Bons usages des phytosanitaires ?

De son côté, Générations futures, dénonce « la mauvaise évaluation des pesticides en Europe ». « Les rapports ne prennent pas en compte toutes les données scientifiques disponibles, bien que le règlement européen l’exige, souligne un communiqué de l’association de défense de l’environnement. L’évaluation ainsi faite conduit à une sous-estimation de la dangerosité de ces produits. »

Par ailleurs, dans l’affaire des maires de l’Avesnois, le sous-préfet a promis l’élaboration d’une charte sur les « bons usages des phytosanitaires », prévue par la récente loi Egalim​.

Le hic, c’est que, malgré les différentes promesses de l’agriculture dite raisonnée, ces dernières années, les Hauts-de-France sont passés, entre 2009 et 2016, d’une consommation annuelle de pesticides de 9.297 tonnes à 9.216 tonnes. Une baisse, certes, mais de moins de 1 %. Bien loin des objectifs affichés.