Massacre d’Ascq en 1944: Un ancien SS échappe aux poursuites de la justice allemande

JUSTICE Un dispositif des accords de Schengen empêche la justice allemande de poursuivre un ancien SS soupçonné d’avoir pris part au massacre d’Ascq en 1944…

G.D. avec AFP
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La place d'Ascq, le jour de l'enterrement des 86 massacrés, dans la nuit du 1er au 2 avril 1944.
La place d'Ascq, le jour de l'enterrement des 86 massacrés, dans la nuit du 1er au 2 avril 1944. — Société historique de Villeneuve d'Ascq

L’homme, âgé aujourd’hui de 95 ans, avait déjà été condamné à mort par contumace après la guerre. Le ministère public allemand de la justice a annoncé, ce mardi, l’abandon des poursuites contre Karl (ou Heinz) Münter, un ancien SS impliqué dans le massacre d'Ascq, dans le nord de la France en 1944.

« La procédure d’enquête sur un Allemand de 95 ans de Nordstemmen pour soupçon de complicité d’assassinat est abandonnée », selon un communiqué du procureur de Celle, une ville près Hanovre, en Allemagne. Les autorités allemandes suivent ainsi un avis récent de la justice française qui alimente les regrets de descendants des 86 personnes tuées dans cet « Oradour du Nord ».

A cause des accords de Schengen

Le ministère français de la Justice avait considéré que s’appliquait dans ce cas le principe selon lequel, en vertu des accords de Schengen, une personne ne peut être jugée deux fois pour les mêmes faits dans deux pays différents.

Or, Karl Münter, âgé de 21 ans au moment du massacre, a déjà été condamné à mort par contumace en 1949 par un tribunal militaire français.

Sollicité par l’AFP, l’arrière-petit-fils d’une des victimes, Alexandre Delezenne, à l’origine de la procédure en Allemagne, regrette cette décision. « Je suis très amer que grâce à un avis de la justice française, un nazi puisse ainsi échapper à la justice allemande qui était bien en marche pour le juger », a-t-il dit.

« Crimes de guerre » ou « crimes contre l’humanité »

La Chancellerie française a en outre estimé que le massacre relevait des « crimes de guerre », dont la prescription est de 20 ans, et non de crimes contre l’humanité, qui sont imprescriptibles.

« Les autorités judiciaires allemandes ont les mains liées même si en droit allemand les faits ne sont pas prescrits », précise le parquet de Celle qui dit considérer le massacre d’Ascq comme un crime de guerre. « Les nazis ne se sont pas acharnés contre des soldats, mais contre des innocents de 15 à 85 ans, réveillés en pleine nuit », a critiqué Alexandre Delezenne.

La 12e division SS de la « Hitlerjugend » (Jeunesse hitlérienne) avait mené une opération de représailles terrible sur le village d’Ascq, près de Lille, dans la nuit du 1er au 2 avril 1944. En quelques heures, une cinquantaine de ces soldats dont le train avait déraillé après une action de sabotage de la Résistance, avaient fusillé 86 hommes.

A Villeneuve d’Ascq, qui englobe désormais l'ancienne commune d'Ascq, on avait, comme tous les ans, commémoré dimanche, ce massacre.