Coupe du monde 2022 : une filiale de Vinci mise en examen
JUSTICE La filiale du groupe de BTP est mise en cause pour les conditions de travail sur des chantiers au Qatar
- Une filiale du groupe de BTP Vinci est soupçonnée de « travail forcé » et de « traite d’êtres humains » sur des chantiers au Qatar, qui accueille en cette fin d’année la Coupe du monde de football.
- L’affaire remonte à 2015, après une visite sur place de l’ONG Sherpa.
- Le groupe Vinci n’a eu de cesse de nier ces accusations.
A dix jours de l’ouverture du Mondial, l’annonce risque de ne pas passer inaperçue. Ce mercredi, à Nanterre, une filiale du groupe de BTP Vinci a été mise en examen dans le cadre d’une enquête sur les conditions de travail sur les chantiers au Qatar, a indiqué à 20 Minutes l’avocat de l’entreprise, Me Jean-Pierre Versini-Campinchi. Et ce dernier de préciser : « Vinci Constructions Grands Projets va immédiatement former un appel tendant à voir prononcer, par la chambre de l’instruction de Versailles, la nullité de cette mise en examen. »
L’affaire remonte à 2015 après une visite de l’ONG Sherpa, spécialisée dans la lutte contre les crimes économiques, et d’une délégation syndicale de la CGT au Qatar. Sur place, les responsables visitent plusieurs chantiers, notamment celui du métro aérien ou d’un hôtel de luxe, et notent de multiples infractions : des horaires de travail à rallonge dans des conditions particulièrement difficiles, des passeports confisqués pour empêcher les ouvriers de partir…
Une première plainte classée
Parmi les témoignages d’ouvriers indiens et népalais recueillis, beaucoup racontent travailler onze heures par jour sous un soleil de plomb, parfois sept jours sur sept, et être hébergés dans des baraquements sommaires et sans clim pour un salaire modique. L’un d’eux affirme s’être blessé à la jambe et souffrir d’une infirmité permanente, d’autres racontent des évanouissements liés aux conditions de travail. L’ONG fait également état de pressions auprès des travailleurs migrants pour les dissuader de réclamer une amélioration de leurs conditions de travail.
Une première plainte est déposée en 2015, dénonçant « l’utilisation par ces entreprises de menaces diverses pour contraindre une population vulnérable à des conditions de travail et d’hébergement indignes et à une rémunération dérisoire ». L’enquête préliminaire est finalement classée sans suite en 2018, faute d’éléments. En 2019, une nouvelle plainte, pour les mêmes motifs, est déposée. Cette fois avec constitution de partie civile, ce qui entraîne automatiquement l’ouverture d’une enquête par un juge d’instruction. Le comité contre l’esclavage moderne (CCEM), ainsi que de sept ex-employés indiens et népalais de ces chantiers, se joignent à la plainte.
Vinci, qui déplore que cette mise en examen intervienne à quelques jours de l’ouverture de la Coupe du monde, n’a eu de cesse de nier ces accusations, précisant notamment que le groupe de BTP était minoritaire dans la filiale visée. « La filiale en question est une société qatarie, c’est donc le droit local qui s’applique, insiste Me Jean-Pierre Versini-Campinchi. Une société minoritaire ne peut imposer ses standards et ses règles. »