Rennes : Le magicien condamné à dix-huit ans de prison pour les viols et agressions sexuelles de 27 enfants

Pédocriminalité Pendant plus de quinze ans, cet homme âgé de 36 ans s’est rapproché des parents avant d’abuser de leurs enfants

Camille Allain
L'entrée de la salle de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine à Rennes où se tenait le procès d'un magicien âgé de 36 ans jugé pour de multiples viols et agressions sexuelles.
L'entrée de la salle de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine à Rennes où se tenait le procès d'un magicien âgé de 36 ans jugé pour de multiples viols et agressions sexuelles. — C. Allain / 20 Minutes
  • Jugé depuis deux semaines par la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine, un ancien magicien a été reconnu coupable de viols et agressions sexuelles sur 27 enfants et condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle. 
  • Pendant plus de quinze ans, Sébastien C. a abusé d’enfants âgés de 3 à 15 ans dont il connaissait parfaitement les parents.
  • L’attitude froide et sans empathie a particulièrement marqué les victimes de ce procès qui s’est tenu à huis clos à Rennes.

La question de la culpabilité ne faisait aucun doute. Jugé pour des faits de viols et agressions sexuelles sur 27 enfants, Sébastien C. avait déjà reconnu « 90 % des faits » qui lui étaient reprochés avant même d’être entendu devant la cour d’assises des mineurs d’Ille-et-Vilaine. Pendant une quinzaine d’années, l’ancien magicien a commis les pires atrocités sur les enfants de ceux qui étaient ses amis, sur sa sœur ou encore sa cousine et sa nièce. Ce vendredi, la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine l'a condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté des deux tiers. Il sera également soumis à un suivi socio-judiciaire de dix ans à l'issue de sa peine. 

La veille, l’avocat général avait requis une peine de 15 à 18 ans, à la grande surprise de certains avocats persuadés que la peine maximale de vingt ans de prison serait prononcée. Parce que le nombre de victimes est effroyable. Parce que l’accusé agissait en récidive après une première condamnation en 2011. Et parce qu’il n’avait pas hésité à parler lui-même de son « mode opératoire » et de ses « pulsions » qui le poussaient à commettre ses crimes. A sa plus proche amie, il avait confié se considérer comme « un déséquilibré » en raison de son attirance pour les jeunes enfants. Il avait prononcé les mêmes mots aux policiers lorsqu’il s’était rendu au commissariat de Rennes en novembre 2017 pour confier ses abominables secrets.

« Il n’a aucune empathie, il est glaçant »

Pendant les quinze jours du procès, cet ancien magicien aujourd’hui âgé de 36 ans n’a pas éludé les questions. Cheveux rasés sur le côté, regard droit, il a répondu à chaque accusation, se souvenant de ses moindres faits et gestes avec une précision qui glaçait le sang. Dans les rangs des avocats des victimes, on évoque la froideur avec laquelle l’accusé a géré ces confrontations avec les parents de ces enfants. A la barre, les regards des témoins étaient fuyants pendant que l’accusé s’exprimait avec sérénité. « Il a une façon de s’expliquer un peu clinique, très détachée. Il n’a aucune empathie, il est glaçant », confiait Me Pierre-Yves Launay à la veille du verdict.


A chaque dossier, les jurés ont entendu les parents des jeunes victimes qui étaient âgées de 3 à 15 ans au moment des faits. Des hommes et des femmes pétris de remords de n’avoir « rien vu » des agissements de celui qui était leur ami, leur cousin, leur confident. Incarcéré depuis sa première garde à vue fin 2017, Sébastien C. en avait appelé certains juste avant de « se rendre ». Il leur avait expliqué qu’il s’apprêtait à aller en prison pour longtemps et parfois, il avait avoué ce qu’il avait fait endurer à leurs enfants. « Je n’ai jamais eu d’alerte, jamais rien vu. Les enfants le réclamaient, ils l’adoraient. Rien ne laissait présager d’une telle horreur », témoignait Sandra, dont les deux garçons ont été victimes d’attouchements.

Une « personnalité perverse » selon un psychiatre

Après s’être rapproché des parents jusqu’à devenir leur ami le plus proche, le magicien proposait de garder leurs enfants, s’invitant parfois à dormir, allant jusqu’à partager les mêmes vacances. Habile manipulateur de ballons et de tours de magie, il impressionnait ses victimes. Pendant des années, il a travaillé comme animateur en colonie malgré sa première condamnation. A chaque fois, il passait beaucoup de temps avec ses jeunes victimes avant de passer à l’acte. Très souvent, il leur donnait son téléphone pour les distraire et abusait d’elles. « Un état de dissociation hypnotique », selon une psychologue. Face à ces actes, tous les enfants sont restés muets. Pour ne pas se faire gronder ou provoquer le chagrin de leurs parents. Le psychiatre qui s’est penché sur le cas de l’accusé n’a pas hésité sur les termes. Pour lui, Sébastien C. est « une personnalité perverse ». « Aux États-Unis, on parlerait d’un psychopathe », glisse un avocat des parties civiles.

Les quinze jours de ce procès aux assises auront permis aux familles d’obtenir bon nombre de réponses à leurs questions. Mais ce procès à huis clos n’aura pas tout réglé. Pourquoi les parents de l’accusé ne l’ont-ils pas dénoncé quand leur fille a expliqué avoir été violée par son frère aîné ? Et pourquoi cet homme déjà connu de la justice n’a-t-il pas été entendu en janvier 2014 quand une nouvelle plainte pour agression sexuelle a été déposée par une maman ?

« J’ai posé la question à l’enquêtrice. J’ai été le seul. Et je n’ai pas eu de réponse », assure Me Pierre-Yves Launay. Il aura fallu attendre la fin 2017 pour que le dossier soit réactivé dans les services de la brigade des mœurs de Rennes. « Un énorme loupé ». Se sentant coincé, le magicien a préféré tout confesser. Depuis cette plainte de 2014 et jusqu’à son incarcération, Sébastien C. avait fait « des ravages » analysait un avocat. Dix-sept des 27 victimes ont été abusées pendant ces quatre années. Autant de jeunes vies brisées que la seule condamnation ne pourra soulager.

Pourquoi « 20 Minutes » ne donne pas de nom

Pour traiter ce procès, 20 Minutes ne citera que le prénom de l’accusé. Un choix assumé pour protéger l’identité des victimes de ce dossier.