Chlordécone : Fin des investigations sur l’empoisonnement aux Antilles, le non-lieu se dessine
POLLUTION La grande majorité des faits dénoncés étaient déjà prescrits dès l’ouverture du dossier en 2007
Grande déception pour les collectivités et associations plaignantes. Les juges d’instruction du pôle santé publique du tribunal judiciaire de Paris ont prononcé le 25 mars la fin des investigations dans l’enquête sur l’empoisonnement des Antilles au chlordécone. Aucune mise en examen n’a été prononcé, ce qui oriente l’enquête vers un non-lieu, selon des sources proches du dossier.
Cet avis de fin d’information ouvre toutefois un délai permettant aux parties à la procédure de signifier leur intention de faire des observations, demander des actes, etc., avant les réquisitions du parquet de Paris et la décision finale des juges d’instruction.
Possible prescription des faits
En 2006, plusieurs associations martiniquaises et guadeloupéennes avaient déposé plainte pour empoisonnement, mise en danger de la vie d’autrui et administration de substance nuisible. Mais en 2021, Rémy Heitz, alors procureur de Paris, avait estimé dans un entretien au quotidien France-Antilles que « la grande majorité des faits dénoncés était déjà prescrite » dès le dépôt des plaintes en 2006.
Le chlordécone, un pesticide interdit en France en 1990 mais qui a continué à être autorisé dans les champs de bananes de Martinique et de Guadeloupe par dérogation ministérielle jusqu’en 1993, a provoqué une pollution importante et durable des deux îles. Plus de 90 % de la population adulte en Guadeloupe et Martinique est contaminée par le chlordécone, selon Santé publique France, et les populations antillaises présentent un taux d’incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde.
« La tournure que prend cette scandaleuse affaire est préoccupante car on s’achemine vers un déni de justice », dénoncent mardi dans un communiqué les avocats de l’association « Pour une écologie Urbaine », Me Raphaël Constant, Corinne Boulogne Yang-Ting, Ernest Daninthe et Georges Louis Boutrin. « Après quinze ans d’instruction et en l’état actuel du droit en vigueur, aucune mise en examen n’a été prononcée ce qui laisse à craindre une forte probabilité d’une décision de non-lieu », s’inquiètent-ils.