Meurtre de Magali Blandin : Quelles suites judiciaires après le suicide de Jérôme Gaillard ?

ENQUETE La mort du principal mis en cause vient « dégonfler » le dossier selon les avocats

Camille Allain
Le domicile de Jérôme Gaillard, mari de Magali Blandin, à Montauban-de-Bretagne, à l'ouest de Rennes.
Le domicile de Jérôme Gaillard, mari de Magali Blandin, à Montauban-de-Bretagne, à l'ouest de Rennes. — Mathieu Pattier / SIPA
  • Le corps sans vie de Jérôme Gaillard a été découvert lundi dans sa cellule de la prison de Rennes-Vezin.
  • Le père de famille avait reconnu avoir tué sa femme Magali Blandin, le 11 février 2021 à Montfort-sur-Meu.
  • Sa mort va creuser un vide dans ce dossier criminel, où trois personnes restent mises en examen.

Il se murmure que le juge d’instruction menant l’enquête au sujet de la mort de Magali Blandin était dans une colère froide. Lundi matin, le magistrat a appris la mort de Jérôme Gaillard, retrouvé pendu à la fenêtre de sa cellule de la prison de Rennes-Vezin après une grève de la faim de près de trois semaines. Incarcéré depuis le mois de mars quand il avait avoué avoir tué sa femme Magali Blandin avec une batte de base-ball, le principal suspect a emporté ses secrets avec lui.

Dans sa cellule, le personnel a découvert une lettre et un testament. Si le contenu des écrits n’a pas fuité, on peut penser que Jérôme Gaillard y demande la libération de ses parents, mis en examen et incarcérés pour complicité de meurtre. « C’était devenu sa raison de vivre », assure son avocat Me Jean-Guillaume Le Mintier. La mort du père de quatre enfants ne signe pas pour autant la fin de l’enquête. Dans cette affaire, ses parents et un voisin, un Géorgien âgé de 31 ans, sont toujours poursuivis. 20 Minutes fait le point.

Qui sont les personnes poursuivies ?

Elles sont trois. Monique et Jean Gaillard sont les parents de Jérôme Gaillard. Lundi, le couple de retraités a perdu son dernier fils. Il y a une dizaine d’années, leur autre garçon s’était donné la mort. Dans cette affaire, ils sont mis en examen pour « complicité de meurtre par conjoint » et « tentative de mort par conjoint ». Les enquêteurs les soupçonnent d’avoir versé 50.000 euros à leur fils afin de l’aider à faire tuer sa femme, avec qui il était en instance de divorce. Lors d’une confrontation réalisée le 12 octobre, le rôle des parents a été précisé. D’après les enquêteurs, Monique et Jean Gaillard auraient fourni un alibi à leur fils le jour du meurtre. Le père se serait rendu au domicile de Jérôme Gaillard à Montauban-de-Bretagne, utilisant Internet et le téléphone pour « simuler » la présence de son fils à son domicile. Le couple aurait également acheté de la chaux pour faire disparaître le corps de leur belle-fille.

D'importantes recherches avaient été menées en février et mars pour retrouver Magali Blandin. La mère de famille aurait été tué par son mari Jérôme Gaillard, avec la complicité de ses parents.
D'importantes recherches avaient été menées en février et mars pour retrouver Magali Blandin. La mère de famille aurait été tué par son mari Jérôme Gaillard, avec la complicité de ses parents. - Mathieu Pattier/SIPA/DR

L’autre mis en cause est un Géorgien de 31 ans. Voisin de Jérôme Gaillard, il lui aurait proposé son aide et ses contacts en vue d’assassiner Magali Blandin. Son téléphone a par ailleurs borné autour du domicile de Magali Blandin à Montfort-sur-Meu peu de temps avant le meurtre, survenu le 11 février. Sur son téléphone, les enquêteurs ont découvert une lettre d’extorsion écrite par un ami géorgien afin de faire chanter Jérôme Gaillard. Il est également accusé d’avoir désossé la voiture ayant servi à transporter le corps sans vie de la mère de famille de quatre enfants.

Le procès peut-il être « correctionnalisé » ?

Cette pratique est courante quand l’auteur principal d’un crime n’est plus présent pour l’audience. Au lieu de se tenir devant la cour d’assises, l’audience peut parfois être renvoyée devant le tribunal correctionnel, où sont jugés les délits. Les avis des avocats divergent sur ce point. S’il ne souhaite pas s’exprimer sur le dossier, l’avocat de la famille de Magali Blandin estime qu’il n’y a « aucun risque » que le procès soit correctionnalisé, selon Me William Pineau. « Ce n’est pas impossible. C’est même une probabilité car l’absence de Jérôme Gaillard va créer un vide abyssal dans ce dossier », estime Me Le Mintier, qui défendait le principal mis en cause.

Les troublantes similitudes avec l’affaire Anne Caudal

En 2011, une jeune femme nommée Anne Caudal avait été tuée par son amant à Bruz, près de Rennes. Comme Jérôme Gaillard, Christophe Piedoux avait reconnu être l’auteur du crime, après avoir participé aux recherches. Incarcéré après sa garde à vue, il s’était donné la mort dans sa cellule de la prison de Rennes-Vezin. Face à l’absence du principal suspect, la justice avait décidé de renvoyer l’affaire devant le tribunal correctionnel de Rennes. Sophie Piedoux, la femme du principal suspect, y avait été jugée seule mais uniquement pour « destruction de preuves ». Si elle avait bien aidé son ex-mari à se débarrasser du corps d’Anne Caudal, la justice n’avait pas retenu sa culpabilité de complicité de meurtre. Une différence majeure par rapport au dossier de la mort de Magali Blandin. Il ressort des auditions que les parents de Jérôme Gaillard, comme son voisin géorgien étaient au courant de la volonté de meurtre du défunt. L’instruction n’est toujours pas close.