La mobilisation pour Fabien Azoulay, Français détenu en Turquie depuis 2017 et victime de sévices, s’intensifie

DIPLOMATIE Âgé de 43 ans et condamné par la justice turque, Fabien Azoulay demande son transfèrement en France

Hélène Sergent
— 
Fabien Azoulay, victime de sévices en détention en Turquie, réclame son transfèrement en France.
Fabien Azoulay, victime de sévices en détention en Turquie, réclame son transfèrement en France. — DR
  • Fabien Azoulay a été condamné en Turquie à 16 ans et 8 mois de prison pour avoir acheté du GBL, un solvant classé comme stupéfiant dans le pays.
  • Homosexuel et de confession juive, l’homme de 43 ans est victime, depuis son incarcération, de multiples sévices physiques et psychologiques.
  • Ses avocats et ses proches en appellent désormais au chef de l’Etat pour faire aboutir sa demande de transfèrement en France.

Pendant plus de trois ans, les proches et avocats de Fabien Azoulay ont gardé le silence. « On a joué le jeu de la justice et celui de la diplomatie. Mais rien ne bouge », fustige Me Carole-Olivia Montenot. Alors le 8 avril dernier, ils ont décidé de lever le voile sur le calvaire enduré par ce Français de 43 ans, incarcéré depuis septembre 2017 dans les geôles de Turquie. Condamné à 16 ans et 8 mois de prison pour avoir acheté du GBL, un solvant classé comme stupéfiant par les autorités locales lors d’un séjour à Istanbul, Fabien Azoulay a été victime de sévices physiques et psychologiques lors de sa détention.

« Son état est très inquiétant. Pour lui, c’est impossible de tenir une quatrième année », souffle Sophie Wiesenfeld, docteure en droit et présidente du comité de soutien du quadragénaire. Après sa condamnation, Fabien Azoulay a demandé son transfèrement en France. Mais selon ses proches, cette demande est restée lettre morte côté turc. « C’est une victime collatérale des mauvaises relations diplomatiques entre la France et la Turquie », analyse la présidente du comité de soutien. Pour mobiliser l’opinion publique, une pétition a été lancée la semaine dernière et son entourage en appelle désormais au chef de l’Etat.

« Il prend énormément de médicaments »

Fabien Azoulay n’aurait dû rester que quelques jours à Istanbul. Comme beaucoup de Français, ce gérant d’un spa à New York a fait le déplacement pour une greffe d’implants capillaires. À son arrivée à l’hôtel, il commande sur Internet du GBL. Ce solvant industriel, utilisé également comme excitant sexuel, a été classifié quelques mois auparavant comme stupéfiant par la Turquie. « Il ne le savait pas. Le produit a été intercepté par les douanes, les policiers ont suivi le colis et quand Fabien a voulu le récupérer, il a été interpellé », raconte Carole-Olivia Montenot, l’une de ses avocates. Le 27 février 2018, la justice turque le condamne à une peine de 20 ans de prison, ramenée à 16 ans et 8 mois.

Incarcéré à proximité de la capitale turque, Fabien Azoulay a fait l’objet de violences aggravées de la part de son codétenu. Homosexuel et de confession juive, le Français a été brûlé et son codétenu condamné pour les sévices qu’il lui a infligés. Depuis, Fabien Azoulay a été transféré dans une prison située à Giresun, à 800 kilomètres d’Istanbul. Mais son état et ses conditions de détention restent très préoccupants, dénonce la présidente de son comité de soutien : « Il prend énormément de médicaments, des antidépresseurs. Il envoie des lettres bouleversantes, insoutenables. Beaucoup d’islamistes sont détenus dans le même établissement, il est régulièrement sommé par ses codétenus de se convertir à l’islam », détaille-t-elle.

Fabien Azoulay est incarcéré depuis le 16 septembre 2017 en Turquie.
Fabien Azoulay est incarcéré depuis le 16 septembre 2017 en Turquie. - D.R

« Rien n’a bougé »

Inquiets pour sa vie, ses avocats réclament désormais une solution humanitaire. Officialisée depuis novembre 2019, sa demande de transfèrement « n’a connu aucune évolution », pointaient ses conseils dans leur communiqué de presse diffusé le 8 avril dernier. « On a été reçu au Quai d’Orsay qui nous a promis que ce dossier serait traité en priorité. Mais lors d’une dernière réunion en mars, on a constaté que rien n’avait bougé », justifie Carole-Olivia Montenot.

Contactée par 20 Minutes, une source diplomatique française assure de son côté que « les services du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères à Paris et notre ambassade en Turquie se sont pleinement mobilisés […] et dès le début de son incarcération, il a pu ainsi bénéficier de visites consulaires ». « Soucieuses de lui garantir de meilleures conditions de sécurité en détention, les autorités françaises sont intervenues rapidement auprès des autorités locales pour que notre compatriote puisse bénéficier d’un transfert vers une nouvelle prison turque en janvier 2020 », ajoute-t-elle, précisant que les services consulaires étaient « en contact régulier » avec les autorités turques « pour s’enquérir de sa situation et de l’évolution de sa demande de transfèrement en France ».


Depuis la médiatisation de cette affaire, la mobilisation s’intensifie en France. La pétition de soutien à Fabien Azoulay a d’ores et déjà recueilli plus de 40.000 signatures. Des élus de tous bords, des associations de lutte contre l’antisémitisme et de défense des droits des LGBTQ + se sont aussi émues de cette situation ce week-end sur les réseaux sociaux, appelant Emmanuel Macron à agir. « On veut des résultats concrets. On ne demande pas à la France de contester la peine rendue par la justice turque. Tout ce qu’on veut, c’est que Fabien puisse la purger en France, près des siens », conclut Sophie Wiesenfeld.