Grenoble : Vingt et douze ans de prison requis contre les parents de la petite Hafsa

ASSISES Le verdict est attendu ce jeudi

C.G. avec AFP
Douze et vingt ans de prison ont été requis contre les parents de la petite  Hafsa décédée à 15 mois.
Douze et vingt ans de prison ont été requis contre les parents de la petite Hafsa décédée à 15 mois. — M.LIBERT/20 MINUTES
  • L’avocate générale de la cour d’assises de l’Isère a requis des peines de 12 et 20 ans de prison à l’égard à des parents de la petite Hafsa.
  • Le couple, qui s’était enfermé dans un salafisme radical, était poursuivi pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
  • Hafsa est décédée le 1er mars 2017, des suites d'une péritonite et d'un syndrome du bébé secoué.

Au septième jour du procès du couple salafiste accusé d’avoir causé la mort d’Hafsa, leur petite fille de quinze mois en mars 2017, des peines de 20 ans de prison ont été requises mercredi contre Sami Bernoui le père et 12 ans contre Noémie Villard la mère. Accusation et défense ont ferraillé toute la journée devant la cour d’assises de l’Isère, avant le verdict attendu jeudi.

« Vous l’aimez votre enfant, ce n’est pas contesté. Mais votre enfant est devenu un objet entre vos mains », a d’abord lancé l’avocate générale Gisèle Auguste en fin de matinée, à l’adresse des deux accusés, jugés pour violences volontaires ayant entraîné la mort de leur bébé sans intention de la donner, violences habituelles et privation de soins.

« Vous êtes parfaitement conscient de la situation… et vous ne faites rien »

« Les deux parents ont contribué à l’état de cette enfant jusqu’à son décès », a-t-elle poursuivi rappelant que le couple vivait à Grenoble dans un appartement sans eau, ni électricité, et devenu insalubre dans les derniers temps. Fustigeant « l’immaturité totale, l’irresponsabilité globale et complète » des deux accusés, elle a considéré que les jeunes parents, avaient « parfaitement conscience » de la violence commise et de la dégradation de la santé de leur bébé. « Et vous ne faites rien », s’est-elle indignée.

La mort de la petite Hafsa avait été causée par une péritonite et un syndrome du bébé secoué. La représentante du ministère public a reconnu aussi que la justice aurait pu mieux agir : un signalement au procureur dès janvier 2016 aurait dû être suivi par l’ouverture d’une information judiciaire, a-t-elle estimé. Malgré huit fractures costales décelées par le CHU de Grenoble quand la petite fille avait été hospitalisée à l’âge de deux mois, un classement sans suite avait été décidé.

Les violences volontaires contestées par la défense

« Noémie Villard a été élevée pour exécuter, pas pour décider. Depuis qu’elle est petite, elle fait ce qu’on attend d’elle », a plaidé Roksana Naserzadeh, l’avocate de la jeune femme de 22 ans décrivant une personne mal à l’aise dans le rôle d’arbitre qu’elle a considéré avoir auprès de son entourage, face notamment au conflit continu entre ses deux familles (l’une étant de confession musulmane, l’autre catholique).

C’est cette « phobie sociale », existante avant même sa conversion, qui l’a par la suite, via trois jeunes filles rencontrées à l’université, poussée vers le salafisme, a exposé l’avocate : « Alors qu’elle ne s’aime pas, qu’elle se trouve fade, le salafisme lui a paradoxalement permis de renoncer à sa singularité et de se confondre avec tout le monde ».

« Pas le procès de l’islam »

De son côté Roland Gallo, l’avocat de Sami Bernoui qui avait reconnu mardi être « tombé sur l’abdomen » de sa fille, a contesté les « violences volontaires » de son client. « Il a reconnu des violences à l’égard de sa fille, des claques, des coups de pied, et c’est déjà terrible. Oui, vous avez de quoi le condamner mais il y a une interrogation sur cette qualification de violences volontaires » a-t-il plaidé devant les jurés.

« Ce n’était pas du tout le procès de l’islam et des musulmans, c’est même le contraire », a tenu à souligner pour sa part Me Max Joly, l’avocat des parents de la mère, parties civiles, écartant ainsi la question de la radicalisation salafiste, apparue comme une sorte de troisième accusé au cours de débats.