Loire : Un an de prison pour avoir frappé et insulté le maire d’une petite bourgade

CONDAMNATION Le prévenu avait tenté le 15 août de foncer sur une place interdite à la circulation avant de s’en prendre aux habitants et au maire de Saint-Alban-les-Eaux

Caroline Girardon
Le maire d'une commune portant son écharpe. (Illustration)
Le maire d'une commune portant son écharpe. (Illustration) — POUZET/SIPA
  • Un homme de 30 ans a été condamné mercredi à 18 mois de prison dont un an ferme pour avoir frappé le maire de Saint-Alban-les-Eaux.
  • Dans son réquisitoire, le procureur de la République a vertement dénoncé « les attaques quotidiennes portées aux valeurs de la République ».
  • Il a également dénoncé une « banalisation de la violence ».

A Roanne, Caroline Girardon

« La République est souillée tous les jours par des individus qui s’arrogent le droit de ne rien respecter ». Dans la salle d’audience du tribunal correctionnel de Roanne, les mots d’Abdelkrim Grini, procureur de la République résonnent. Jugé en comparution immédiate, Halim A., 30 ans, secoue la tête en signe de dénégation, tentant de contrer l’implacable réquisitoire du ministère public. Cet habitant de  Saint-Alban-Les-Eaux, petite bourgade paisible de la Loire, a été condamné mercredi à 18 mois de prison dont un an ferme pour avoir notamment  frappé et menacé de mort Pierre Devedeux, le maire de la commune le 15 août. Une peine assortie d’un an d’interdiction de résider dans le village.

Le 15 août en question, la place principale est fermée à la circulation. Un concert doit s’y dérouler le soir. Des barrières ont été installées à l’entrée pour interdire l’accès aux voitures. Halim A. ne l’entend visiblement pas de cette oreille. Le trentenaire tente de pousser la barrière avec l’avant de son véhicule. Mal lui en prend. L’objet tombe, se retourne, bloque une roue de la voiture et finit par abîmer salement les pneus et la carrosserie. Le conducteur descend, se saisit violemment de la barrière qu’il balance rageusement avant de remonter au volant et foncer sur la place. Plusieurs habitants lui font remarquer qu’il n’a pas à se trouver là. Le ton monte, les choses s’enveniment.

« Petit caïd du village »

« On est en présence d’un individu qui déverse sa haine sociale dans les rues en jouant le rôle du petit caïd du village de province qui bouscule les personnes âgées à la boulangerie », attaque Fabien Lambert, l’avocat du maire. Décrit comme « hystérique » par plusieurs témoins, l’individu hurle, multipliant les insultes et les menaces de mort à l’encontre de ceux qui tentent de le raisonner. L’un se prend un poing en pleine figure et réplique par une gifle. Le maire, qui déjeunait, est appelé en urgence pour ramener le calme. Lui aussi reçoit un coup au visage et tombe au sol. L’homme se retourne, prend une clé à molette qu’il brandit à l’encontre de la foule puis repart en marche arrière à toute vitesse. « Il a vraiment eu de la chance que personne ne soit blessé ce jour-là », souligne Fabien Lambert.

A la barre, le prévenu réfute toute agression, jurant qu’il n’a frappé personne et encore moins le maire. Et sanglote la main sur le cœur. « Quand vous avez un prénom comme le mien, c’est dur de s’intégrer dans un village tel que Saint-Alban », tente-t-il maladroitement de se défendre, se disant « victime d’un complot » pour le faire partir. Des arguments qui peinent à convaincre le procureur de la République. « Pourquoi n’avez-vous pas fait demi-tour pour aller vous garer plus loin ? », questionne-t-il. « Je n’ai pas réfléchi. Et cette histoire, ça ne me fait pas rire », répond le principal intéressé. Le tribunal, non plus, n’a pas envie de sourire.

« Les règles, on les respecte »

« Vous avez 30 ans, pas 14. Les règles, on les respecte. Vous avez le sentiment et la conviction d’être dans votre droit alors que vous ne l’êtes absolument pas », sermonne Abdelkrim Grini. Et d’ajouter : « Il n’y a pas un jour sans que l’on voie à la télévision, sans que l’on entende à la radio ou lise dans la presse, des attaques contre les valeurs de notre République. On ne respecte même plus les pompiers qui sont là pour aider et pour soigner ».

Dénonçant la « banalisation de la violence » dans la société actuelle, le procureur enfonce le clou. « Vous ignorez tout des fondements de la République, vous vous affranchissez du respect. Vous avez du mal à vous remettre en question et ne supportez pas la contradiction, ni la frustration, ni l’interdiction. Vous considérez que vous pouvez tout vous permettre mais vous n’êtes pas au-dessus des lois… Et vous n’avez aucune excuse », martèle le procureur ayant requis trois ans de prison, dont deux ferme et une interdiction à vie de revenir dans la bourgade de Saint-Alban-les-Eaux.

Dix jours pour faire appel

Dans le box des accusés, le prévenu ne semble toujours pas comprendre la raison de sa présence au tribunal. « Il n’aurait jamais dû pousser cette barrière. On n’en serait pas là », concède Marie-Harmony Belloni, son avocate insistant dans sa plaidoirie sur « la qualification juridique des faits ». Lui persiste : il n’a rien fait. « On m’a attaqué et craché dessus », lâche-t-il pour finir sans parvenir à convaincre l’assistance.

L’intéressé, qui avait déjà écopé de 18 mois de prison ferme pour violence en 2012, dispose de dix jours pour faire appel.