Prisons: La moitié des Français estiment que les prisonniers «sont trop bien traités»
DETENTION Pourtant, la France est régulièrement épinglée par le Conseil de l’Europe pour les mauvaises conditions de détention dans ses prisons…
- La Fondation Jean Jaurès a publié ce lundi une enquête sur « les Français et la prison ».
- De nombreuses personnes interrogées souhaitent durcir les conditions de détentions des prisonniers.
- Pour l’Observatoire international des prisons, il s’agit d’une méconnaissance du milieu carcéral.
Un surprenant paradoxe. Alors que les Français sont conscients des mauvaises conditions de détention dans les prisons françaises, la moitié d’entre eux estiment que les prisonniers « sont trop bien traités ». C’est en tout que cas ce que révèle une enquête publiée ce lundi par la Fondation Jean Jaurès. Les Français, soulignent ses auteurs, Chloé Morin et Adrien Taquet, estiment même que les établissements pénitentiaires devraient être des lieux « de souffrance et de privation ».
Les Français, ajoutent-ils « n’ignorent nullement que l’aspect le plus alarmant de la situation des détenus est la surpopulation carcérale » qui est, pour « l’immense majorité » d’entre eux, la « principale raison des difficultés actuelles des prisons ». Elle atteint 120 % en moyenne dans les 188 prisons françaises, avec des pics à plus de 200 % dans certains établissements de la région parisienne. C’est dans les maisons d’arrêt qu’elle est la plus importante.
Surpopulation carcérale
Pour tenter de lutter contre cette surpopulation. Emmanuel Macron avait appelé, lors d’un déplacement à Agen fin mars, à « proscrire les peines de prison inférieures à un mois ». Il a aussi demandé que les peines comprises entre un et six mois puissent « s’exécuter hors des établissements pénitentiaires ». Pour autant, les Français ne sont que 47 % à souhaiter que le nombre de personnes en détention provisoire diminue.
Par ailleurs, seuls 4 Français sur dix se déclarent favorables à l’augmentation du budget des prisons pour améliorer les conditions de vie des détenus. « Si les gens étaient informés qu’une proportion importante de détenus est enfermée 23h sur 24 dans les cellules, qu’ils les partagent à deux ou trois, qu’ils n’ont que très peu d’activités, qu’il n’y a pas de programmes de réinsertion, peut-être qu’ils porteraient un regard différent sur la prison », souffle à 20 Minutes Cécile Marcel, directrice de l’OIP ( Observatoire international des prisons).
« Il y a une grande méconnaissance des gens »
« Plus les conditions de détention sont difficiles, plus l’impact sur les personnes détenues est négatif, plus on crée de récidive », ajoute-t-elle. Cécile Marcel rappelle que la France est régulièrement épinglée par le Conseil de l’Europe pour l’état de ses prisons et les mauvaises conditions de détentions. Mais de nombreux Français (41 %) estiment que « l’attitude des détenus » est responsable des difficultés actuelles dans les prisons. Un résultat, selon les auteurs de l’enquête, qui « s’enracine dans des perceptions plus profondément ancrées des détenus ».
« Il y a une grande méconnaissance des gens concernant les personnes détenues. Ils s’imaginent qu’elles sont toutes dangereuses, que ce sont des terroristes », regrette Cécile Marcel. Il faudrait, dit-elle, que les autorités expliquent aux Français « à quoi sert la prison, comment elle remplit son rôle protection de la société, de réinsertion des détenus », plutôt que d’encourager leur demande de « répression et de sécurité ». Et de conclure : « On a négligé le travail d’information et de pédagogie qu’il y a à faire sur cette question. »
*Enquête réalisée en mars dernier par Fondation Jean Jaurès avec l’Ifop, auprès d’un échantillon de 1.013 personnes.