
En septembre 1943, les troupes allemandes entrent dans Grenoble, alors sous occupation italienne, instaurant une répression sans précédent. La ville et l'Isère commémorent, à partir de mardi, les 70 ans des événements de l'automne 1943. Parmi eux, la tragique journée du 11 novembre : 369 Isérois arrêtés ce jour-là, lors d'une manifestation, sont déportés dans les camps de concentration. Seuls 120 en reviendront, dont Edouard Bordet, l'un des 10 rescapés encore en vie. Ce fils d'un cheminot résistant avait alors 18 ans.
Buchenwald et Dora
«Une semaine avant le 11 novembre, la Résistance avait édité des tracts appelant à la grève et à une manifestation, raconte-t-il. Le matin, on est parti déposer une gerbe à la Porte de France mais le pont était barré par des gardes mobiles à cheval. On est parti vers la place Grenette, où on a conspué la milice, puis au monument des Diables Bleus [parc Mistral] en chantant La Marseillaise. Au moment de repartir, les Allemands nous ont pris en tenaille. » Sur 1500 manifestants, plus de 600 sont arrêtés. «Ils ont relâché femmes, enfants et jeunes de 16 ans car à 18 ans, on pouvait rejoindre le maquis. Après trois nuits à la Caserne de Bonne, on a été envoyé au camp de transit de Compiègne et le 17 janvier 1944, j'ai pris le convoi pour Buchenwald. En février, ils m'ont expédié au camp de Dora où on fabriquait les fusées V2. C'était terrible, beaucoup sont morts, notamment du typhus, et on travaillait 12 heures par jour.» Au bout de 13 mois, Edouard Bordet est évacué de Dora par les Allemands, qui fuient l'avancée des Alliés, et après moult péripéties, est libéré par les Russes, le 1er mai 1945, puis remis aux Anglais. «Je suis arrivé en juin à Grenoble, avec mes 40 kilos.»