Guerre en Ukraine : Tout comprendre à « l’ultime bataille » de Marioupol et à l'assaut attendu dans l'Est

GUERRE Les soldats ukrainiens tentent désespérément de défendre la ville portuaire et stratégique de Marioupol au milieu des destructions alors que l’ennemi russe a brandi la menace de l’arme chimique et de l’assaut à l’Est

Marion Pignot
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Guerre en Ukraine : Marioupol pourrait bientôt tomber? — 20 Minutes
  • La fin de la résistance à Marioupol, dans le sud-est de l’Ukraine, semble imminente, les forces ukrainiennes considérablement affaiblies annonçant se préparer à la chute de ce port stratégique.
  • Kiev a également annoncé s’attendre sous peu à une offensive majeure dans la région du Donbass, dans l’est de l’Ukraine.
  • 20 Minutes fait le point sur ces combats dans l’Est qui devraient être « un moment crucial » de la guerre opposant l’Ukraine et la Russie depuis plus de quarante jours comme l’a déclaré le chef de cabinet du président ukrainien, Andriï Yermak.

L’étau se resserre toujours un peu plus ce mardi sur les dernières troupes ukrainiennes qui défendent Marioupol, assiégée par l’armée russe depuis plus de sept semaines. Dans cette ville portuaire, largement détruite, la situation humanitaire est dramatique alors que plus à l’Est encore, des civils continuent de fuir les régions de Lougansk et Donetsk, d’où six trains d’évacuation doivent partir aujourd’hui.

Les forces russes ne comptent pas lâcher Marioupol et « l’ultime bataille » est proche selon les combattants ukrainiens, tandis que celle « pour les régions de Donetsk et Lougansk va être un moment crucial de la guerre », a déclaré sur Telegram le chef de cabinet du président ukrainien, Andriï Yermak. 20 Minutes fait le point sur ces deux zones de combats et sur ce qui s’annonce être un nouveau virage dans la guerre qui oppose l’Ukraine à la Russie depuis plus de quarante jours.

Où en sont les forces russes à Marioupol ?

Les forces du Kremlin maintiennent ce mardi leur pression sur Marioupol. Sur Twitter, le conseiller présidentiel ukrainien Mykhaïlo Podoliak a fait savoir que « les soldats ukrainiens sont encerclés et bloqués » et que « des dizaines de milliers » de personnes ont péri et que « 90 % des maisons » ont été détruites. De son côté, le chef des séparatistes prorusses de Donetsk, Denis Pouchiline, a affirmé en direct sur la chaîne russe Pervy Kanal que ses forces avaient conquis entièrement la zone portuaire de Marioupol : « Concernant le port de Marioupol, il est déjà sous notre contrôle. »

L’armée russe aurait, selon ses dires, fait échouer une tentative de percée d’une centaine de militaires ukrainiens avec des blindés qui se trouvent dans une usine du nord de Marioupol, et qui tentaient de la fuir. Leur sortie a été repoussée à coups « de frappes aériennes et de tirs d’artillerie », selon Moscou, qui dit avoir notamment détruit trois chars et tué une cinquantaine d'« ennemis », et que 42 se sont rendus.


Enfin, Edouard Basurine, porte-parole de la république autoproclamée prorusse de Donetsk (DNR), a expliqué pour sa part qu’il n’excluait pas de recourir à l’arme chimique pour attaquer les positions ukrainiennes dans l’usine d’Azovstal, nouvel enjeu des combats. En effet, la prise de la Marioupol bute notamment sur celle du complexe industriel regroupant plusieurs usines, dont la mythique Azovstal, qui donne sur le port.

Les forces ukrainiennes peuvent-elles encore résister ?

Les forces de Kiev « continuent de défendre Marioupol », a assuré l’armée de terre ukrainienne sur Telegram, assurant être toujours en contact avec les unités qui « tiennent héroïquement la ville ». « Les Russes ont temporairement occupé une partie de Marioupol. Les soldats ukrainiens continuent de défendre le centre et le Sud, ainsi que les zones industrielles », a précisé ce mardi le maire-adjoint, Serguiï Orlov.

Sur Facebook, la 36e brigade de la marine nationale a dit se prépare à livrer « une ultime bataille » contre les forces russes : « Nos munitions s’épuisent. Ce sera la mort pour certains d’entre nous et la captivité pour les autres. Nous sommes en train de disparaître lentement […] Nous ne savons pas ce qui va se passer, mais nous vous demandons vraiment de vous souvenir [de nous] avec un mot gentil », a-t-elle écrit dans un message relayé par l’agence Reuters et Radio Canada. « Pendant plus de quarante jours de combats intenses, l’ennemi nous a progressivement repoussés […], nous a encerclés et tente maintenant de nous détruire », précisent encore les soldats, assurant qu’environ la moitié de leurs effectifs ont déjà été blessés dans les combats.

Contrôle russe dans et autour de Marioupol aux 9, 16, 23 et 30 mars.
Contrôle russe dans et autour de Marioupol aux 9, 16, 23 et 30 mars. - LAURENCE SAUBADU, KENAN AUGEARD / AFP

Enfin, sur YouTube Oleksiï Arestovitch, un conseiller de Volodymyr Zelensky, a déclaré : « Je suis le premier à trouver la force de dire » que les forces ukrainiennes ne peuvent pas libérer Marioupol, « c’est désormais impossible militairement ».

Pourquoi Moscou veut absolument faire tomber Marioupol ?

Très tôt, bien avant le début de l’offensive russe, Marioupol s’est imposée comme un véritable enjeu stratégique des séparatistes prorusses. La raison ? Située à environ 55 kilomètres de la frontière russe et à 85 kilomètres du fief séparatiste de Donetsk, c’est la plus grande ville encore aux mains de Kiev dans le bassin du Donbass, qui comprend les régions de Donetsk et de Lougansk.

Carte montrant la ville de Marioupol, que les forces russes encerclaient le 5 mars.
Carte montrant la ville de Marioupol, que les forces russes encerclaient le 5 mars. - SIMON MALFATTO, JEAN-MICHEL CORNU

Sa conquête permettrait donc aux Russes de consolider leurs gains territoriaux sur la bande côtière le long de la mer d’Azov en établissant un corridor terrestre entre les régions du Donbass, dont elle reconnaît la souveraineté, et la péninsule de Crimée, annexée par Moscou en 2014.

Et où en est l’assaut dans l’Est ?

Moscou a fait de la conquête totale du Donbass son objectif prioritaire et Kiev a annoncé, par la voix du porte-parole du ministère ukrainien de la Défense, Oleksandre Motouzianik, s’attendre à une attaque « très prochainement ». A Washington, un haut responsable du Pentagone a confirmé que les forces russes se renforçaient notamment près de la ville d’Izioum. A une colonne de chars s’ajouteraient un bataillon de soutien de maintenance d’hélicoptères et des unités de logistique pour l’infanterie.

Carte de l'Est de l'Ukraine situant les régions administratives (
Carte de l'Est de l'Ukraine situant les régions administratives ( - Simon MALFATTO, Sabrina BLANCHARD, Kenan AUGEARD, Valentin RAKOVSKY

L’état-major de l’armée ukrainienne a indiqué s’attendre à ce que les Russes lancent prochainement des offensives sur des villes comme Popasna et Kourakhove pour « prendre le contrôle de l’ensemble de la région de Donetsk ». « La bataille pour les régions de Donetsk et Lougansk est un moment crucial de la guerre », a pour sa part déclaré sur Telegram le chef de cabinet de Volodymyr Zelensky, Andriï Yermak. « Elle durera plusieurs jours, et pendant ces jours nos villes pourraient être complètement détruites », a renchéri Serguiï Gaïdaï, le gouverneur ukrainien de la région de Lougansk.

En visite mardi à Vostochny (premier déplacement du chef du Kremlin connu en dehors de Moscou depuis le 24 février), Vladimir Poutine a salué la lutte « courageuse, professionnelle, efficace » des officiers russes qui « participent à l’opération militaire spéciale au Donbass ». Cette offensive est, selon lui, nécessaire et inévitable pour « assurer la sécurité de la Russie » face à une Ukraine qui « a commencé à être transformée en place forte antirusse, à cultiver le nationalisme, le néonazisme ».