Christiane Taubira découvre un dimanche de permanence à la justice des mineurs

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Le vent du changement a soufflé dimanche au palais de justice de Paris où, guidée par un Pierre Joxe vêtu de sa robe d'avocat, la nouvelle garde des Sceaux, Christiane Taubira, a rendu visite aux services de la justice des mineurs.
Le vent du changement a soufflé dimanche au palais de justice de Paris où, guidée par un Pierre Joxe vêtu de sa robe d'avocat, la nouvelle garde des Sceaux, Christiane Taubira, a rendu visite aux services de la justice des mineurs. — Fred Dufour afp.com

Le vent du changement a soufflé dimanche au palais de justice de Paris où, guidée par un Pierre Joxe vêtu de sa robe d'avocat, la nouvelle garde des Sceaux, Christiane Taubira, a rendu visite aux services de la justice des mineurs.

Finie l'ère Sarkozy, lorsqu'on décidait que des délinquants récidivistes de 16 ou 17 ans devaient être jugés par des tribunaux correctionnels ordinaires, et non par des "tribunaux pour enfants", promet-elle.

L'ancien président de la République avait pour habitude de dire que les jeunes d'aujourd'hui n'ont plus rien à voir avec ceux de 1945, manière de constater que l'Ordonnance d'après-guerre sur la justice des mineurs n'était plus adaptée à leur cas.

La loi d'août 2011 a donc créé les tribunaux correctionnels pour mineurs, composés de trois magistrats professionnels, alors que les tribunaux pour enfants comprennent un juge des enfants et deux assesseurs citoyens, ayant une expérience des questions liées à l'enfance.

Les supprimer figure aujourd'hui parmi les priorités du gouvernement, a dit la ministre, rappelant les engagements pris par François Hollande, décidé à "réaffirmer la spécificité de la justice des mineurs" sur la base des principes de l'Ordonnance de 45.

Ces principes sont notamment la "primauté de l'éducatif sur le répressif", et la "prise en considération du parcours et de la personnalité du mineur, permettant l'individualisation et l'atténuation de la peine liée à la minorité", rappelait-il en avril dans une lettre à l'association des magistrats de la famille.

"Le président a présenté une feuille de route, nous aurons à coeur de l'appliquer", assure Mme Taubira dans le bureau de la "permanence éducative", après avoir visité la permanence parquet et avant de se rendre dans le bureau d'une juge des enfants.

Elle ajoute qu'il n'est pas question pour autant d'être indulgent avec les "petits caïds" qui sèment la peur dans les quartiers.

- Orientations -

On lui explique, pour le regretter, que les services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ont été "réorientés" ces dernières années vers une activité pénale, aux dépens de l'éducatif.

"Les orientations, quand elles désorientent, on peut les réorienter...", lâche Pierre Joxe, 78 ans, ancien ministre socialiste (Industrie, Intérieur, Défense) inscrit depuis 2010 au barreau de Paris.

Exerçant à temps partiel son activité d'avocat, il se consacre uniquement aux mineurs et aux commissions d'office (la défense des enfants dont les familles n'ont pas de ressources), expliquait-il en janvier lors de la sortie de son livre "Pas de quartier?" (Ed. Fayard), consacré à la justice des mineurs.

Il était de permanence dimanche. "J'étais aussi de permanence à Noël", souligne-t-il, assis à une petite table dans un hall donnant accès aux bureaux des juges des enfants. Hormis la petite troupe accompagnant la ministre, la salle est vide. "Mais il y a parfois une dizaine de mamans ici, avec des enfants qui pleurent. Très peu de pères", dit-il.

Une jeune substitut raconte de son côté l'activité de la nuit à Mme Taubira. Vols avec violence, dégradations... "C'est une nuit ordinaire?", demande la ministre, qui s'enquiert aussi du nombre de places en foyers.

Il en manque, lui répond l'équipe, en déplorant qu'on ait "un peu dégarni les établissements qui pouvaient accueillir des mineurs en grande difficulté".

On explique aussi à la garde des Sceaux qu'il y avait 14 juges des enfants, mais qu'un poste a été supprimé il y a trois ans, ce qui allonge les délais de comparution des mineurs. Encore une orientation à réorienter... "Nous allons y travailler", promet Christiane Taubira.