Les enseignants dans la rue contre le projet d'évaluation de Luc Chatel

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Plusieurs milliers d'enseignants ont manifesté jeudi en France contre le projet de réforme de l'évaluation des professeurs, qui conduit selon eux à une gestion "managériale" de leur profession, et motivait une grève moyennement suivie.
Plusieurs milliers d'enseignants ont manifesté jeudi en France contre le projet de réforme de l'évaluation des professeurs, qui conduit selon eux à une gestion "managériale" de leur profession, et motivait une grève moyennement suivie. — Mehdi Fedouach afp.com

Plusieurs milliers d'enseignants ont manifesté jeudi en France contre le projet de réforme de l'évaluation des professeurs, qui conduit selon eux à une gestion "managériale" de leur profession, et motivait une grève moyennement suivie.

Dans les écoles primaires, les enseignants étaient 11,2% à faire grève selon le ministère, et plus de 21% selon le SNUipp-FSU, principal syndicat de la profession.

Dans les collèges et lycées, le ministère a dénombré 16,4% de grévistes, et le Snes-FSU (principal syndicat) 47%.

La manifestation à Paris a réuni entre 3.200 et 7.500 personnes selon les sources. Des cortèges ont aussi défilé à Marseille (2.000 à 3.000), à Lyon (1.100 à 2.000), à Toulouse (800 à 1.700), à Nice et Saint-Etienne (700 à 1.000). Plusieurs centaines de manifestants ont été dénombrés à Montpellier, Rouen, Bordeaux, Bayonne, Angoulême, Poitiers, Rennes, Nantes, Lille ou encore Clermont-Ferrand.

"Chatel tu perds ton triple A", ont scandé les manifestants niçois et parisiens. "Non aux agences de notations", "l'ère Chatel, clientélisme, arbitraire", "Papa Noël, apporte-moi un vrai ministre de service public", pouvait-on lire sur les pancartes à Marseille.

Le projet que le gouvernement souhaite voir mis en oeuvre dès la rentrée 2012 prévoit la fin de la traditionnelle double notation des enseignants (le chef d'établissement et l'inspecteur régional) qui seraient évalués lors d'un entretien par leur "supérieur hiérarchique direct". Cette évaluation déterminerait l'évolution des salaires.

A Toulouse, Aurélien, lycéen de 16 ans qui se destine à être professeur de mathématiques, refuse que les principaux de collèges valident les enseignants, car "ils ne sont pas spécialisés dans une matière". Pour Sarah Boudes, professeur d'EPS depuis 10 ans, "il doit y avoir une réforme, mais celle-ci n'est pas la bonne" car le principal va "plus juger le travail administratif du professeur que le côté didactique et pédagogique".

Le ministre de l'Education nationale Luc Chatel a assuré mercredi soir, sur France 3, "vouloir améliorer le système (d'évaluation) pour qu'il soit plus juste".

Si les syndicats estiment que le dispositif actuel est effectivement "injuste" et "inefficace", ils craignent cependant que la réforme n'accentue les défauts du dispositif. Ils dénoncent "la conception managériale" du projet.

"L'idée, c'est qu'on donne des responsabilités, ce n'est pas un gros mot, de management aux chefs d'établissement", a souvent expliqué le ministre.

 "Il faut retirer le décret Chatel car on est en train d'introduire des modes de gestion privée. L'Education nationale n'est pas L'Oréal", a déclaré Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de Force Ouvrière.

"On est dans une logique de concurrence entre les établissements et d'éclatement des équipes", a déploré Christian Chevalier, du SE-Unsa.

Le Snalc "préconise le renforcement des corps d'inspection, le maintien d'une vraie évaluation individuelle sur les critères des savoirs et de la capacité à transmettre des savoirs, c'est-à-dire l'essentiel de la mission des professeurs".

"On espère que le ministre retirera ce soir (jeudi) son projet et qu'il ouvrira des discussions sur de nouvelles bases", a dit à l'AFP Frédérique Rolet, cosecrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat du secondaire.

François Hollande a affirmé jeudi à Bondy (Seine-Saint-Denis) que, s'il était élu en mai 2012, il reviendrait sur le projet gouvernemental, lors de "discussions avec les syndicats" pour "trouver des formules plus originales, y compris collectives".