Etudiantes prostituées: un mauvais fantasme

Bastien Bonnefous
— 

C'est un livre sorti en début d'année qui a relancé la polémique. Laura D., 19 ans, étudiante en langues vivantes, y raconte comment pendant quelques mois, elle s'est prostituée via Internet pour payer ses études*. Un témoignage qui a de nouveau posé le problème de la précarité étudiante, alors que 100.000 étudiants sur deux millions vivent sous le seuil de pauvreté - moins de 650 euros par mois - selon l'Observatoire de la vie étudiante. Au point que le PS se saisisse du sujet, et publie le 16 janvier un communiqué dans lequel il n'admet pas que «la vente de services sexuels soit un petit boulot étudiant». 

Déjà, au printemps 2006, le syndicat SUD-Etudiant avait affirmé que près de 40.000 étudiant(e)s se prostituaient en France. Un chiffre considérable et alarmant... qui n'a jamais pu être vérifié à cette heure. «Aucune étude statistique sérieuse n'a été menée», explique Eva Clouet. Cette chercheuse en sociologie, auteur d'un ouvrage sur le sujet**, considère même ce nombre de 40 000 comme «un chiffre choc fait pour interpeller». 

L'Institut national de la prostitution va plus loin, estimant qu'«il n'y a pas un phénomène de prostitution étudiante spécifique en France» et le compare à une «Arlésienne » dont on entend parler mais qu'on ne voit jamais. Selon l'organisme, «il y a un phénomène de prostitution occasionnelle, favorisé par le Web, où de nombreuses femmes proposent leurs services à un prix élevé, quitte à n'avoir qu'un client par semaine», et parmi ces occasionnelles, «il y a évidemment une part d'étudiantes». 

Mais dans des proportions impossibles à chiffrer, explique le commissaire divisionnaire Jean-Marc Souvira. Le policier qui dirige l'Office central pour la répression des trafics d'êtres humains (Ocreth) indique que cette prostitution «volontaire et cachée» échappe aux contrôles policiers et aux réseaux de proxénétisme. «On évalue à environ 18.000 le nombre de personnes majeures qui se prostituent en France. Alors, si 40.000 ou même 20.000 filles et garçons étudiants étaient sur le marché, on finirait bien par le savoir et les proxénètes aussi!»    

* Mes chères études, Max Milo. 

** La Prostitution étudiante,  Max Milo.