Protection de l'enfant: l'Assemblée adopte une proposition de loi sénatoriale
L'Assemblée nationale a largement adopté dans la nuit de mardi à mercredi une proposition de loi sénatoriale sur «la protection de l'enfant», visant notamment à offrir aux enfants placés une vie plus stable.
Ce texte de Michèle Meunier, sénatrice PS, et Muguette Dini, ex-sénatrice centriste, avait été adopté en mars à l'unanimité au Sénat. La Haute Assemblée devra dans les prochains temps examiner en deuxième lecture la version issue du Palais-Bourbon.
A l'ouverture des débats mardi, la secrétaire d'Etat à la Famille, Laurence Rossignol, avait demandé aux députés de «mettre de côté les logiques partisanes» et de «ne pas se perdre dans de faux débats» sur le sujet hautement sensible de la famille, en écho à des amendements de tous les bancs.
La proposition de loi est perçue comme allant dans le bon sens par tous les groupes politiques, mais les élus UMP, face à «un sentiment d'inachevé», se sont partagés entre vote pour et abstention.
Le sujet «fâcheux» était selon leur porte-parole Isabelle Le Callennec l'interdiction, introduite en commission, des «tests osseux» pour déterminer l'âge des mineurs étrangers. Le gouvernement a fait voter dans l'hémicycle un compromis pour les limiter au maximum, sans les interdire, au regret de certains élus PS, EELV et du Front de gauche. Les socialistes ont en outre fait proscrire le recours à des tests génitaux.
La proposition de loi sénatoriale, «de bon sens et d'humanité», met «l'enfant au centre des préoccupations», a défendu Françoise Dumas pour les députés PS.
Près de 300.000 jeunes sont actuellement pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) des départements, la moitié étant placés en familles d'accueil ou foyers et l'autre moitié faisant l'objet de mesures d'«assistance éducative» à domicile.
La législation remontant à 2007 se heurte à de nombreux obstacles comme «l'absence de pilotage national» et la volonté de maintenir le lien avec les parents biologiques «à tout prix», et les parcours de ces «enfants souffrent souvent d'un manque de suivi global et d'anticipation», selon les auteures de la proposition de loi.
Celle-ci a été initiée après le report sine die par le gouvernement début 2014 d'un grand projet de loi sur la famille, trop risqué politiquement face à la mobilisation des défenseurs du modèle familial traditionnel.
- L'inceste dans le code pénal -
Le texte PS-centriste a pour ambition d'améliorer la gouvernance nationale et locale de la protection de l'enfance, de contribuer à la sécurisation du parcours de l'enfant protégé et d'adapter le statut de l'enfant placé sur le long terme.
En commission, les députés avaient ajouté un article qui inscrit l'inceste dans le code pénal, notion que les sénateurs avaient supprimée du texte initial. Actuellement, le code pénal punit les viols et agressions sexuelles, ainsi que les relations sexuelles avec des mineurs de moins de 15 ans mais ne définit pas l'inceste en tant que tel.
Par contre, Erwann Binet (PS), rapporteur en 2013 de la loi sur le mariage homosexuel, avait renoncé à déposer pour la séance un amendement afin d'autoriser les couples pacsés ou en concubinage à adopter un enfant.
Plusieurs amendements du gouvernement ont été adoptés mardi soir, visant notamment à améliorer le repérage des situations de danger ou à mieux préparer la sortie de l'ASE pour les jeunes majeurs.
Les propositions de l'UMP pour lutter contre l’absentéisme scolaire ou contre le «tourisme procréatif» ont été repoussées.
Le rejet d'un autre amendement de députés de l'opposition, qui aurait permis d'interdire l’exercice de toute profession au contact de mineurs en cas de condamnation pour des actes pédophiles, a provoqué de vifs échanges avec la majorité, compte tenu de récents scandales dans des écoles.
Mme Rossignol, qui y était défavorable, a promis pour plus de rapidité que la mesure pour obliger la justice à signaler les condamnations, annoncée début mai par le gouvernement, trouverait sa place dans un autre texte, qui doit passer à l'Assemblée le 1er juin.