Dialogue social: Valls consulte syndicats et patronat
Le Premier ministre, Manuel Valls, a présenté mercredi aux syndicats et au patronat ses options prudentes pour moderniser le dialogue social en entreprise et entend éviter au maximum le risque d'un nouveau recours à l'article 49-3 pour l'adoption de ce texte, après l'épisode du projet de loi Macron.
Les leaders de trois organisations patronales (Medef, CGPME, UPA) et de cinq syndicats (CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC) sont arrivés à 15H00 à Matignon.
Le Premier ministre leur dévoile «les grandes options» retenues pour cette réforme «essentielle», censée simplifier dialogue entre employeurs et représentants des salariés, souvent trop formel, et lever par là les verrous à la création d'emploi par les entreprises.
A son arrivée, le numéro un de Force Ouvrière, Jean-Claude Mailly, a estimé que la concertation sur cette réforme devrait se poursuivre avec le gouvernement, «on ne peut pas faire de 49-3 de manière permanente, surtout lorsque l'on parle de dialogue social», a-t-il prévenu.
Son homologue de la CFDT, Laurent Berger a également souhaité la poursuite de la concertation plaidant pour «une représentation pour tous les salariés» dans les entreprises.
Pour réformer le dialogue social, les partenaires sociaux ont montré leurs limites: incapables de s'accorder après quatre mois de négociations, ils ont laissé le champ libre à l'exécutif, qui est décidé à légiférer.
La logique du dialogue social reste le «fil rouge» des réformes, a assuré le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll.
Le gouvernement s'est inspiré de pistes déjà avancées lors des négociations: ainsi il va instituer une représentation externe pour les salariés des Très petites entreprises (TPE, moins de 11 salariés), qui en sont dépourvus actuellement.
Seule la CGPME est vent debout contre cette mesure ne voyant «aucune nécessité» à une telle représentation. .
Pour les plus grandes entreprises, le gouvernement prévoit la possibilité de regrouper les différentes instances. Une solution a minima, qui ne va pas jusqu'à la fusion totale proposée par le Medef, dont le projet de «conseil d'entreprise» n'avait pas convaincu les syndicats.
Le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, a prévenu que son syndicat refusait des propositions «copies conformes de celles du Medef».
Pour éviter de recourir une nouvelle fois à cette arme, le gouvernement devra rassembler sa majorité sur ce projet que portera le ministre du Travail, François Rebsamen, sans heurter les députés socialistes «frondeurs», très à l'écoute des syndicats.
Le gouvernement va donc jongler: il envisage l'extension pour les PME d'un mécanisme existant, la «Délégation unique du personnel» (DUP), qui permet déjà à l'employeur de regrouper deux instances (délégués du personnel, comité d'entreprise). Prévu pour les entreprises de 50 à 200 salariés, il sera étendu jusqu'à 300.
Cette délégation unique pourrait aussi avoir les attributions des Comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), une instance à la laquelle les syndicats sont très attachés. «Les prérogatives d'expertise et de recours en justice des CHSCT seront garanties», assure-t-on de source gouvernementale.
Mais, a déjà prévenu Jean-Claude Mailly mercredi sur France inter, «le CHSCT doit conserver sa personnalité morale». Pour FO, c'est «une ligne jaune et un point de friction».
La CFE-CGC affirme de son côté qu'elle «se bat depuis des mois pour conserver les prérogatives des CHSCT».
Leurs craintes sont relayées par l'un des principaux porte-voix des frondeurs socialistes, l'ex-ministre Benoît Hamon, pour qui «la fin des CHSCT» serait l'une des mesures contraires «à l'épopée du socialisme triomphant».
Le président de la CGPME François Asselin propose de son côté la réducion d'une «vingtaine» d'obligations supplémentaires pour les entreprises au franchissement du seuil du 50e salarié.
Le Premier ministre va se saisir aussi de cette rencontre pour évoquer d'autres sujets sensibles. La réforme de l'assurance chômage pourrait en faire partie. En fixant lundi leur agenda 2015, patronat et syndicats avaient toutefois signifié leur volonté de rester maîtres de leurs sujets.
Le projet de loi sur le dialogue social comportera en outre deux «cavaliers» législatifs: l'un sur le régime spécifique des intermittents du spectacle et l'autre sur la prime d'activité qui remplacera à partir du 1er janvier prochain la Prime pour l'emploi et le RSA-activité.