La tête de pont du Web
—
Q uand on va rencontrer Loïc Le Meur, la question qu'on voudrait éclaircir, c'est de savoir pourquoi il est considéré comme le pape des blogueurs, notamment par les médias. Et quand on l'a rencontré, cette question n'a toujours pas de réponse. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'est pas là par hasard. Ce trentenaire qui se présente comme un serial entrepreneur – il est directeur pour l'Europe de Six Apart qui vend des blogs – a su surfer sur la vague « nouvelles technologies », créant des boîtes et les vendant quand il le fallait. Depuis plusieurs années, il s'est fixé une mission d'évangélisation du blog. C'est lui qui porte la bonne parole aux médias qui avaient besoin d'un personnage comme lui pour faire le relais avec un monde qu'ils ne maîtrisaient pas. Sans se demander une seconde s'il est représentatif de ces communautés émergentes. Même lui reconnaît certaines absurdités. « Je me retrouve à parler des squats de Cachan à la télé alors que je ne suis pas habilité à parler de ça. »
Désormais, sa vie lui échappe et son identité ne lui appartient plus tout à fait. « Je reçois plus de 300 mails par jour, je ne peux plus répondre à tous les commentaires (...) Ma vie est un fleuve, si je n'attrape pas ce qui passe devant moi, c'est trop tard. » Jean-Claude Van Damme appréciera. Sur les blogs, le nom de Le Meur est même devenu un verbe, « être lemeurisé » [être cité sur son blog], on parle de lui à travers ses initiales LLM, et on ne peut prononcer son nom sans provoquer de l'énervement. Surtout depuis qu'il a rallié la cause sarkozyste. « Ce n'est pas culturel en France de dire pour qui on va voter, se défend-il. Aux Etats-Unis, certains le mettent même sur leur plaque d'immatriculation. Les gens ont le droit de savoir. » La question, c'est : veulent-ils le savoir ? Lui en est persuadé. L'homme sait mener sa barque et la semaine prochaine, il va créer l'événement avec sa conférence « Le Web 3 », rassemblant entrepreneurs, investisseurs, blogueurs et journalistes du monde entier. Là, on le sent dans son univers. « Un monde où il n'y a plus de frontières », ajoute-t-il. Oui, mais toujours en ligne.
David Carzon