Présidentielle 2022 : A Marseille, Fabien Roussel drague « la France de la fiche de paie » pour élargir sa base

CAMPAGNE ELECTORALE Le candidat communiste à l’élection présidentielle tenait à Marseille ce dimanche son premier meeting d’envergure nationale

Mathilde Ceilles
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Fabien Roussel lors de son meeting à Marseille en février 2022
Fabien Roussel lors de son meeting à Marseille en février 2022 — Christophe Simon / AFP
  • Fabien Roussel tenait à Marseille son premier meeting d’envergure national.
  • Le candidat communiste a tenté de s’adresser aux déçus de la gauche pour élargir sa base électorale.

Il paraît que le diable est dans les détails. Dans la salle du parc Chanot, à Marseille, les équipes de campagne de   Fabien Roussel avaient disposé sur les petites chaises en plastique non pas ces drapeaux rouges siglés Parti communiste français, mais des petits drapeaux tricolores, et d’autres, multicolores, reprenant le slogan du candidat, « La France des jours heureux » Sur l’écran géant, un immense drapeau bleu, blanc et rouge flotte dans le vent imaginaire. A la tribune, pas la moindre trace d’un minuscule autocollant du   parti communiste.

Pour son premier meeting national d’envergure du candidat communiste, la démonstration est limpide : après un début de campagne poussif, Fabien Roussel joue la carte de l’élargissement, afin de poursuivre sur sa lancée. Et pour ce faire, la stratégie est simple : pas question de brandir le communisme comme un étendard. « L’enjeu est de reconquérir les électeurs de gauche qui ont été déçus, assume Ian Brossart, directeur de campagne de Fabien Roussel. Nous sommes dans un esprit de conquête, et pour cela, nous allons bien au-delà des rangs communistes. » Et de clamer : « Nous, on se revendique du meilleur du communisme français : les congés payés, la Sécurité sociale. On est pas la succursale d’autre chose. »

Objectif : conquérir les déçus

Aussi, à la tribune, qui voit se succéder des personnalités non affiliées PCF, peu sont ceux qui se risqueront à prononcer même le mot de communisme. Étonnamment, la première qui se lance… n’est pas communiste. A la surprise générale, une certaine Sophie Camard a en effet ouvert le meeting, et affichée publiquement son soutien à François Roussel, comme un témoin de la capacité du rassemblement du candidat à la présidentielle. Cette prise de guerre pour le PCF est plutôt belle : l’adjointe au maire de Marseille, membre de la gauche république et socialiste, est accessoirement la suppléante du député marseillais Jean-Luc Mélenchon, allié d’hier devenu le concurrent du moment.

Pour draguer cet électoral des déçus de la gauche, dont ces personnalités se font le symbole, Fabien Roussel multiplie dans son discours les appels du pied en faveur de la « France du salaire et de la fiche de paie », lui qui affirme être celui qui se revendique en candidat « du peuple qui connaît la France du peuple ». Cette France de « ceux qui n’ont pas d’autres choix, de pouvoir accéder aux grandes villes avec des voitures propres non polluants », cette France « des familles qui vivent à l’euro près, cette classe moyenne qui n’y arrive plus », à qui il propose, pêle-mêle, un Smic à 1.500 euros nets, le permis gratuit pour les moins de 25 ans ou encore la mise en place d’un revenu étudiant à partir de 850 euros.

Une campagne « coup de tonnerre »

Il s’agit aussi de se démarquer de ses concurrents de gauche, par des propositions claires, voire chocs, comme la suppression pure et simple des devoirs pour tous les écoliers, au nom de la lutte contre les inégalités. « On ne veut pas ouvrir un robinet d’eau tiède, confiait avant le meeting Ian Brossart. Il faut porter un discours cash, original. Si c’est pour dire la même chose que les autres, ça ne sert à rien. » Défenseur du développement de l’énergie nucléaire, Fabien Roussel enfonce le clou, clamant qu’il n’y avait « pas d’autre choix ». « C’est quand même grave que je sois le seul à défendre ça à gauche quand même ! »

De quoi permettre au communiste de continuer à surfer sur la vague de la hype dont il bénéficie depuis quelques semaines ? Crédité entre 3 et 4 % d’intention de votes dans les sondages, soit juste derrière Jean-Luc Mélenchon, François croit pouvoir atteindre rapidement les 5 % selon son entourage. « Imaginez un peu la tête de Macron ou de Pécresse, s’ils découvrent la semaine prochaine, au petit-déjeuner un nouveau sondage dans Le Figaro, avec ce titre : "une percée spectaculaire de Roussel" : ils vont avaler leur croissant de travers, ironise le candidat communiste ? Et la presse dira : "c’est un coup de tonnerre ! " Mais nous, on dira : ce n’est pas un coup de tonnerre, c’est juste un coin de ciel bleu qui s’ouvre. » La Marseillaise se lance… avant l’incontournable Internationale, qui fait frétiller les drapeaux rouges qu’avaient ramenés, quand même, les 4.000 militants présents.