L'Europe va se doter d'un mécanisme pour rattraper les pays en grande difficulté financière

ECONOMIE Pour se faire, les dirigeants de l'Union envisagent un nouveau changement de traité...

B.D. avec AFP
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Les dirigeants de l'UE  ont ouvert la voie dans la nuit de jeudi à vendredi à un changement «limité» mais néanmoins risqué du traité de Lisbonne, afin de permettre à  la zone euro de mieux résister aux crises financières à l'avenir, après  le coup de semonce grec. «Nous avons pris des décisions importantes pour renforcer  l'euro» et «tirer les leçons» du passé, a assuré le président de l'Union  européenne, Herman Van Rompuy, à l'issue d'un sommet à Bruxelles.

Lors de tractations qualifiées de «dures» par la chancelière  allemande Angela Merkel, les chefs d'Etat et de gouvernement se sont mis  d'accord pour engager des «consultations» en vue d'une révision du  traité. La décision finale sera prise lors d'un prochain sommet en  décembre. Et l'objectif est de boucler la modification du traité de  Lisbonne d'ici mi-2013, a précisé Herman Van Rompuy.

Filet de sécurité

L'objectif principal de la manoeuvre est la création d'un  filet de sécurité permanent pour les pays de l'Union monétaire qui  seraient en grande difficulté, comme la Grèce au printemps, avec le  souci de rassurer les marchés. Un tel Fonds de soutien a été créé en juin pour seulement trois ans, jusqu'à mi-2013.

«Tous les Etats ont accepté la nécessité d'un tel mécanisme»,  qui devrait aussi demander aux banques qui prêtent de l'argent aux  Etats de payer leur écot en cas de plan de sauvetage, a souligné Herman Van  Rompuy devant la presse. Une manière de les inciter à limiter leurs  prises de risque à l'avenir. Les dirigeants européens ne se sont toutefois résolus qu'à  contrecoeur à accepter de se lancer dans une nouvelle entreprise, par  essence aléatoire, de changement de traité. Alors que l'encre du traité  actuel de Lisbonne, qui a failli ne jamais voir le jour, est à peine  sèche.

Opposition de la plupart des pays européens

Ce texte, difficilement ratifié par l'Irlande et la  République tchèque, est en place depuis moins d'un an. Une modification  nécessitera à nouveau une approbation des 27 pays. Et même si les dirigeants européens espèrent que son  caractère très limité évitera d'en passer par des référendums dans les  Etats de l'UE, un accident de parcours n'est jamais exclu. «Limité... certes, mais on sait très bien dans l'UE qu'un  (processus) de changement de traité n'est pas limité» au vu de  l'histoire, met en garde un diplomate européen.

Berlin craint, sans changement de traité, un blocage de sa  Cour constitutionnelle car le traité de Lisbonne stipule qu'un pays  européen ne peut être sauvé de la banqueroute par ses partenaires. Angela Merkel a aussi insisté jeudi pour introduire des «sanctions politiques», privant les Etats trop laxistes de droits de  vote dans l'UE. Le sujet sera discuté, mais il a été diplomatiquement renvoyé à  plus tard, face à l'opposition de la plupart des pays européens. Il y a  très peu de chance qu'il se concrétise un jour.

Réforme historique de la discipline budgétaire

De manière plus consensuelle, les dirigeants de l'UE ont  approuvé jeudi soir une réforme historique de leur discipline budgétaire  commune pour éviter là encore que la crise de la dette en Grèce au  printemps se reproduise. «L'Europe doit être plus résistante aux  crises», a dit Herman Van Rompuy. Il est prévu d'imposer de nouvelles sanctions contre les pays  trop laxistes, qui s'appliqueront plus tôt et plus durement, même  lorsque la limite européenne de déficit annuel de 3% du PIB n'est pas  encore atteinte.

Les grands choix nationaux de politique économique seront  surveillés de beaucoup plus près par Bruxelles, pour pouvoir tirer la  sonnette d'alarme très en amont. Et les gouvernements pourront être  punis non seulement si leurs déficits dérapent, mais aussi si le niveau  de leur dette ne baisse pas assez vite.