Achat en ligne: les risques restent importants

Thibaud Vadjoux
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 La cybercriminalité - les escroqueries et abus de confiance sur    Internet - progressent fortement, comme en témoignent les professionnels de    la sécurité sur Internet et la police. Pourtant aucune statistique fiable    n'est disponible sur ce phénomène. Le ministère de l'Intérieur a rendu    public, lundi 19 janvier, le bilan 2008 sur la délinquance mais la montée en    puissance des attaques des pirates demeure inchiffrable. La faute à un outil "statistique    obsolète", explique un responsable de l'Observatoire National de    la Délinquance (OND).  

 Une estimation grossière est cependant possible. Les actes    malveillants sur Internet sont regroupées au sein de la catégorie "escroqueries    économiques et abus de confiance". Ces derniers ont explosé en    2008. Selon    l'OND, les escroqueries économiques ont augmenté de 20%, soit la plus    forte progression de tous les chiffres de la délinquance en 2008. 214.402    actes ont été recensés. Sur cinq ans, cet indice a augmenté de 47%. Il est    donc possible d'imaginer un effet cybercriminalité sur cette flambée    récente. "La diffusion du haut-débit a permis d'augmenter le temps    passé et les activités sur Internet mais aussi le nombre de victimes    potentielles", explique Pascal Lointier, président du Clusif, club de    la sécurité de l'information sur Internet, qui a vient de dresser un    panorama de la sécurité sur le Net en 2008.  

 L'association souligne les défaillances sur les achats en ligne alors    que ceux-ci ont explosé. "En règle générale, la conservation des    données personnelles (mot de passe, identifiant et numéro de cartes bleue)    pose problème. Les sites de e-commerce demandent aux clients de s'identifier    à l'aide d'un mot de passe et d'un identifiant sur une page non sécurisée.    Seule la transaction est protégée (visible grâce au code "https"    ou au cadenas apparaissant en logo). Si on peut encore faire confiance à la    protection "https" qui utilise le certificat MD5 et même s'il a    déjà été cassé, il n'est pas normal que la demande d'information personnelle    ne soit pas sécurisée", poursuit Pascal Lointier. Les pirates    peuvent recueillir ces données personnelles non sécurisées assez facilement.  

 De plus, un client d'un site de e-commerce ne connait pas la    destination des ces données bancaires. "Elles peuvent très bien    être détruites, conservées, ou sous-traitées. Le client ne dispose d'aucune    visibilité sur les pratiques du commerçant car aucun standard ou règle    n'existe", ajoute t-il.  

 Aux Etats-Unis, en mars, la chaîne de supermarché Hannaford a ainsi    découvert une fraude aux cartes bancaires. 4,2 millions de références ont    été piratées (numéro de la carte, date d’expiration) après l'intrusion des    pirates dans des serveurs situés outre-Atlantique.  

 Les fraudes sur Internet ont créé un marché si lucratif que la vente    des services des pirates est devenue très accessible. A Hambourg, un    journaliste allemand a réussi à marchander avec des pirates la vente de plus    de 21 millions de références bancaires pour 12 millions d'euros.  

 La revente à des tiers de services de piratages est devenue si    fréquente que les prix ont beaucoup baissé sur ce marché noir. "Des    cartes bleues peuvent être achetée pour une poignée d'euros sur des sites en    ligne. Des sites russes proposent également aux Internautes leurs services    pour 80 dollars par jour. Ils sabotent un site internet concurrent (virus,    spam, saturation du serveur…) ou peuvent faire échouer une enchère Ebay à la    dernière minute pour ne faire profiter que la dernière enchère, celle de    leur client complice.  

 Les banques sont "très vigilantes et réactives au piratage",    estime P. Lointier. Les défaillances proviennent, selon lui, soit du manque    de vigilance des Internautes soit du manque de sécurité des sites en ligne.