Un scénariste québécois plagié reçoit 4,6 millions de dollars

J. Bx avec AFP
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 Une dizaine de sociétés et de personnes, dont un célèbre dessinateur français,    ont été condamnées mercredi 26 août par un tribunal de Montréal à verser    quelque 4,6 millions de dollars américains à un scénariste québécois pour le    plagiat d'un dessin animé à succès, "Robinson Curiosité"    devenu "Robinson Sucroë".  

 La Cour supérieure du Québec a estimé que Christophe Izard, père de 'L'Ile aux    enfants" et du dinosaure orange Casimir, et les dirigeants de CINAR et    de France-Animation -- les sociétés canadienne et française qui ont    coproduit "Robinson Sucroë" -- se sont inspirés du projet de    Claude Robinson pour réaliser cette série pour enfants.  

 Les deux oeuvres en question sont des adaptations parodiques du Robinson    Crusoë écrit en 1719 par Daniel Defoe. La défense arguait notamment que M.    Izard n'avait aucunement eu besoin du projet de M. Robinson car il s'était    inspiré de l'oeuvre de l'écrivain anglais et de ses séries "Le    Village dans les nuages" et "L'Ile aux enfants".  

 Diffusé en France sur Canal +, France 2 et France 5, "Robinson Sucroë"    met en scène un journaliste naufragé volontaire sur une île occupée par une    tribu d'indigènes et par des pirates loufoques. En tout, le dessin animé a    gagné les écrans d'une centaine de pays, sans que M. Robinson ne touche le    moindre droit d'auteur.  

 Jugement de 240 pages 

 Dans un jugement historique de 240 pages, le tribunal canadien condamne donc    la dizaine de prévenus, incluant également le producteur français Christian    Davin, la société de production allemande Ravensburger et RTV Family    Entertainment AG, à verser à M. Robinson 5,2 millions de dollars (4,6 M USD,    3,19 M EUR)), dont 1,7 million représentants une partie des profits touchés.  

 "Ce que (le juge) a écrit, c'est tout à fait la réalité, c'est tout à    fait juste en plus", a déclaré à la presse Claude Robinson, à sa sortie    du Palais de justice de la métropole québécoise. Il clamait depuis 1995    qu'il avait été spolié par CINAR et France-Animation à qui il avait présenté    son projet lors des salons internationaux spécialisés, en 1986 et 1987.  

 "Ces gens-là sont des bandits à cravate. Ils ont menti. Ils ont trafiqué    des documents, ils ont fait toutes sortes de choses. Ça a été 14 ans à    détricoter les tricots qu'ils faisaient de mensonges", a-t-il    poursuivi  

 Son avocate, Me Florence Lucas, a souligné à l'AFP que la cour "avait    reconnu que les éléments essentiels de cette série appartenaient à M.    Robinson" et ordonné aux prévenus "de lui remettre les    exemplaires contrefaits de la série Robinson Sucroë".  

 Par ailleurs, le tribunal, suivant une requête de la défense, ordonne à M.    Robinson de détruire l'ensemble des épisodes et de ne pas poursuivre la    série, a précisé Me Lucas. La défense s'est de son côté déclarée "déçue"    et "surprise" du jugement, indiquant qu'elle était en train de    consulter ses clients.  

 Jugement interjeté 

 "Etant donné les montants impliqués une analyse précise sera faite pour    déterminer s'il y aura appel ou pas", a précisé Me Pierre    Lefebvre, avocat principal des inculpés. M. Izard a déjà fait savoir qu'il    allait interjeter appel de ce jugement.  

 Fondée à Montréal en 1984, la société CINAR a connu une ascension fulgurante    en produisant nombre de séries pour enfants à succès, tel "Caillou"    puis "Arthur", une émission très regardée aux Etats-Unis.  

 Mais les années suivant son entrée à la bourse de New York, en 1995, vont    marquer le déclin de la société, poursuivie par la justice canadienne pour    malversations et fraudes fiscales. En 2004, CINAR est finalement vendue à    des investisseurs torontois qui la rebaptisent Cookie Jar.