Epargne : Le taux du livret A passe à 3 %, bien insuffisant pour lutter contre l’inflation
Banque Ce mercredi 1er février, le taux du livret A gagne un point, sans que ça ne suffise à le rendre vraiment rentable
- En un an, le livret A est passé d’un taux de 1 à 3 %. Il a gagné un premier point en août 2022, et le voilà donc avec un de plus en ce mercredi 1er février.
- Une hausse qui reste bien insuffisante face au rouleau compresseur de l’inflation.
- Pourtant, le compte épargne garde un succès fou auprès des Français et Françaises.
Ce mercredi 1er février, le taux du livret A passe à 3 %, soit un point de gagné. S’il fallait filer la métaphore sportive pour expliquer ce que représente cette augmentation, on pourrait évoquer un but magnifique inscrit à la 89e minute… par une équipe menée 3-0. Ca ne fait pas de mal, mais c’est insuffisant. Certes, cela faisait quinze ans qu'il n’avait connu une telle hausse. Mais « en rendement réel - c’est-à-dire ce que rapporte vraiment le livret A avec le coût de la vie et l’évolution des prix -, c’est l’un des pires niveaux depuis les années 1980 », avertit Philippe Crevel, économiste et président du Cercle des Epargnants.
Car c’est bien beau, un taux à 3 %, mais quand l’inflation s’établit en 5,2 % sur les douze derniers mois, cela reste léger. Voire contre-productif : « En épargnant sur le livret A, même à 3 %, on perd de l’argent. Techniquement, cela reste plus rentable de dépenser son argent dès maintenant que de l’épargner », explique notre expert. Supposons que vous vouliez acheter un produit à 100 euros. Si vous placez cette somme sur votre livret A durant un an pour épargner avant de l'acheter, vous aurez 103 euros en douze mois… Sauf que d’ici là, votre produit sera « en moyenne » passé à 105,2 euros. Vous perdez donc 2,2 euros par rapport à un achat immédiat.
Taux à perte mais succès grandissant
Maxime Chipoy, président de MoneyVox - guide internet d’explication et de comparatif sur la finance personnelle -, tire le même constat : le taux du Livret A reste bien faiblard dans un tel contexte : « Le gouvernement, anticipant une inflation un peu moins forte à l’avenir et ne voulant pas pénaliser les banques, n’a une fois de plus pas voulu faire de cadeaux aux épargnants. C’était pareil il y a six mois, quand il avait été augmenté d’un point pour passer à 2 %. »
Pourtant, le livret A affiche une santé incroyable, 2022 ayant été la deuxième meilleure année de sa longue carrière. La collecte annuelle a atteint, selon les données de la Caisse des dépôts et consignations, 27,23 milliards d’euros. Seule l’année 2012 avait fait mieux (28,16 milliards d’euros), marquée par le relèvement du plafond à 22.950 euros et par la crise des dettes souveraines.
Pourquoi un tel succès ? D'abord parce qu'à moins de claquer chaque mois tout votre salaire et de n'avoir aucun euro à épargner - ce qu’on ne vous souhaite ni vous conseille –, il reste plus rentable de placer son argent que de le laisser sur son compte courant. Oui, avec le Livret A, vous êtes perdant, mais vous perdez toujours moins qu’en ne faisant rien. « Face à l’inflation, il est indispensable de ne plus laisser un euro de trop sur ses comptes courants. Rappelons qu’y stagnent plus de 550 milliards d’euros, qui ne sont pas rémunérés du tout ! », déclare Maxime Chipoy.
Une période propice à l’épargne
Par ailleurs, les périodes de crises économiques sont particulièrement propices à l’épargne, abonde Philippe Crevel. Décembre dernier illustre bien le fait que les Français sont passés en mode cigale. Habituellement, les livrets A se vident un peu pour les fêtes, les cadeaux et les plaisirs de la table. Comptez cinq décollectes sur les dix dernières années. Mais fin 2022, les Français ont placé 1,45 milliard d'euros de plus sur le plus célèbre des livrets, preuve que la période est aux économies.
Et pourquoi ce compte-là et pas un autre ? En temps d’incertitudes, on aime les valeurs refuges, notamment ce bon vieux Livret, appuie Philippe Crevel. Le directeur cite une raison plus pragmatique : « La majorité des autres comptes épargne rapportent encore moins ». Seul autre épargne qui s’en tire à bon compte, le Livret d’épargne populaire (LEP), « dont le taux va être porté à 6,1 % et auquel plus de la moitié des Français pourraient prétendre. Un produit indispensable pour eux, mais hélas trop méconnu et peu mis en avant par les banques », souffle Maxime Chipoy.
Dernière possibilité, l’assurance-vie, dont les taux sont également revus à la hausse. Mais pas de quoi bousculer la hiérarchie. Qu’il soit vraiment rentable ou non, par période de crise ou de bonne santé économique, le Livret A confirme, année après année, sa suprématie sur l’épargne. Et ce n’est pas en 2023 que ça risque de changer.