Lyon : Le réseau social MYM, une success-story née entre Rhône et Saône

TENDANCE Originaires de la Loire, Pierre Garonnaire et Gaspard Hafner ont lancé à Lyon le premier réseau social payant MYM, qui recense 6 millions d’abonnés et génère un chiffre d’affaires de 60 millions d’euros

Caroline Girardon
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Gaspard Hafner et Pierre Garonnaire sont les deux fondateurs du réseau social MYM
Gaspard Hafner et Pierre Garonnaire sont les deux fondateurs du réseau social MYM — C. Girardon / 20 Minutes
  • Lancé en 2019 sur le marché, le réseau social MYM révolutionne les pratiques et connaît une ascension fulgurante.
  • Présenté comme un « fan-club privé » et revendiquant 6 millions d’abonnés, il permet aux créateurs de délivrer des contenus exclusifs et payants à leurs abonnés, y compris des photos érotiques ou des vidéos pornographiques. De quoi susciter quelques controverses.
  • Derrière ce modèle très lucratif : Pierre Garonnaire et Gaspard Hafner, deux amis d’enfance originaires de la Loire.

Les réseaux sociaux ? « Je sais à moitié faire une story sur Instagram. A la maison, ils sont même prohibés », confesse-t-il, l’œil amusé. Car c’est là tout le paradoxe de la situation. Gaspard Hafner, 34 ans, et son ami d’enfance Pierre Garonnaire, 36 ans, ont fait une entrée fracassante sur le marché. En deux ans seulement, à peine. Au point d’en bousculer les codes, d’en révolutionner les pratiques. Et de susciter la controverse.

MYM (Me.You.More), réseau qu’ils ont lancé en 2019 sans aucun financement, fait déjà fureur en France. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le site recense 6 millions d’utilisateurs dont 5.000 se connectent chaque jour. Soit une progression de 900 % entre 2019 et 2020. Le concept, qui consiste à partager du contenu exclusif et personnalisé avec ses fans, a rapidement séduit. En premier lieu, les mannequins, influenceuses et starlettes issues de la téléréalité qui alimentent 60 % des contenus proposés sur le site.

« Fan-club privé »

Ce que l’on sait moins, en revanche, est que le concept est né d’une amitié, scellée il y a une vingtaine d’années dans les contrées verdoyantes ligériennes. Du côté de Saint-Etienne. « A Feurs, précisément, rectifie non sans une douce fierté Pierre Garonnaire. Nos parents étaient amis. Nous nous sommes connus lorsque nous avions 10 ans ». Leurs parcours respectifs vont pourtant les éloigner, un temps. Pierre s’en ira entre Rhône et Saône, étudier à l’EM Lyon avant d’entamer un cursus juridique à la fac et de filer travailler dans une agence à Paris. Gaspard lui arrêtera l’école à sa majorité. « J’ai raté deux fois le bac, avoue-t-il en riant. J’avais appris à développer de sites Internet dès l’âge de 13 ans alors j’ai lancé à 18 ans ma propre entreprise de business en ligne. »

Leurs trajectoires professionnelles vont se recroiser un soir d’été 2018 à Lyon, d’où tout est parti « par hasard ». L’idée germe par l’intermédiaire d’une amie mannequin « aux 50.000 followers » sur Instagram. « On s’est fait la réflexion qu’elle avait beaucoup d’abonnés, elle était très sollicitée par ses fans mais cela ne lui générait aucun revenu, poursuit Pierre Garonnaire. On a pensé à ce concept : un fan-club privé dans le but de convertir la communauté gratuite en communauté payante. »

Jusqu’à 150.000 euros par mois

Une idée qui va s’avérer juteuse très rapidement. Contre la promesse de pouvoir échanger en privé avec leurs modèles, d’avoir accès à des contenus exclusifs, les fans sont prêts à débourser 12 ou 24 euros par mois. Parfois, 100 euros. Le prix est librement fixé par le créateur qui récupère ainsi entre 75 et 80 % des revenus. Les plus débrouillards peuvent ainsi gagner « 150.000 euros par mois sans aucun placement de produits ». Le reste tombe dans les poches de la start-up.

Visites de coulisses, tutoriel de maquillage, conseils en diététique, séances de coaching, dédicaces, conversations privées… Tout se monnaie. Y compris les photos dénudées ou les vidéos « pour adultes » qui représentent 20 % des contenus en ligne. « On assume, tranche Pierre Garonnaire. On ne voit pas les raisons pour lesquelles on les interdirait. Dans le cadre de la loi, chacun peut publier ce qu’il veut du moment que la majorité est requise et que l’accès est payant. Ces contenus-là ne sont pas accessibles sur un moteur de recherche, il faut connaître le compte et pseudonyme du créateur pour cela et s’y abonner. »

Comité d’éthique indépendant

« Il n’y a aucun contenu pornographique en libre accès », insiste Gaspard Hafner, souhaitant ainsi contrecarrer les critiques dont l’application est régulièrement la cible. Création d’un comité d’éthique indépendant, modération des contenus, vérification des informations délivrées par les créateurs, certification des comptes, protection des mineurs… « Tout est fait pour le site soit le plus sain possible », assurent à l’unisson les deux pères de famille.

« Sans certification, le créateur ne peut être rémunéré et ne peut poster de nouveaux contenus ou converser avec ses abonnés. Les échanges de coordonnées personnelles ne sont pas autorisés. Toute allusion ou proposition de rencontre de la part du créateur entraîne la suspension immédiate du compte. Les utilisateurs malveillants sont bloqués et bannis », complètent-ils.

« L’industrie est en plein boom. Elle génère du cash et forcément, ça fait parler. Cela suscite des jalousies », estime Gaspard. Depuis 2019, la start-up croque le marché à pleine dent. Trois millions de chiffres réalisés cette année-là, dix fois plus l’année suivante. Et 60 millions prévus pour la fin de l’année 2021. Les ambitions du duo ne s’arrêtent pas là : un chiffre d’affaires de « 120 millions d’euros au minimum » pour 2022. Pour cela MYM s’apprête à dégainer un argument imparable : développer avant la fin de l’année des contenus en live payant comme des concerts ou autres performances scéniques. « Une vraie demande qui émane des artistes », encore relativement peu présents sur le site. Mais aussi un moyen pour les Français de conquérir le reste de la planète.