Assurance chômage: Les allocations françaises dissuadent-elles vraiment de reprendre un travail?

EMPLOI La question de la générosité des indemnités versées aux chômeurs revient dans le débat public à l'approche des négociations sur les règles de l'assurance-chômage...

L.C.
Illustration : Pôle emploi et allocations-chômage.
Illustration : Pôle emploi et allocations-chômage. — ALLILI MOURAD/SIPA

Faut-il baisser les allocations-chômage ou les rendre dégressives dans le temps pour inciter au retour à l’emploi ? A l’approche de la renégociation des règles de l’assurance chômage, la remise en cause de la générosité des allocations françaises revient dans les débats. 20 Minutes fait le tour de la question.

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Les allocations-chômage françaises incitent-elles à l’oisiveté ?

Derrière cette première question se cache l’idée selon laquelle les chômeurs français seraient mieux indemnisés que leurs voisins européens. Avec une durée maximale d’indemnisation de 24 mois, la France est dans la fourchette haute, mais elle n’est pas la seule. L’Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas et l’Espagne ont fixé la même durée. Mais la durée moyenne d’indemnisation en France est de onze mois.

Il est véridique que les conditions d’obtention des allocations sont plus souples en France que dans d’autres pays d’Europe. De plus, le plafond mensuel maximal des allocations-chômage est le plus élevé d’Europe, avec 6.200 euros (à l’exception de l’Irlande qui ne plafonne pas les indemnités). Mais 43 % des demandeurs d’emploi perçoivent des allocations, soit 2,7 millions de personnes sur un total de 6,5 millions de chômeurs (catégories A, B, C, D et E) dans la France entière. Ils touchent en moyenne 1.119 euros bruts par mois « et moins de 6 % perçoivent plus de 1.500 euros par mois », précise à l’AFP Claire Vivès du Centre d’études pour l’emploi. Pour la chercheure, ces chiffres vont à l’encontre d'« une fausse représentation d’un chômeur qui peut refuser des emplois parce qu’il vit bien de ses allocations ».

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La dégressivité peut-elle inciter au retour à l’emploi ?

En période de chômage record, la baisse ou la dégressivité des allocations-chômage risque selon les experts de précariser les demandeurs d’emploi sans améliorer l’état du marché du travail. En 2001, une étude de l’Insee a conclu que la dégressivité des allocations mise en place entre 1992 et 2001 avait au contraire ralenti le retour à l’emploi. Pourquoi ? « Dans la conjoncture fragile actuelle, une réduction des allocations inciterait les chômeurs plus qualifiés à prendre des emplois moins qualifiés, rejetant les moins qualifiées dans un chômage plus long », craint Philippe Waechter, directeur de la recherche économique chez Natixis.

En outre, la diminution du pouvoir d’achat des chômeurs peut avoir un impact néfaste sur la consommation et in fine sur la croissance économique.

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Diminuer les allocations-chômage peut-il sauver les finances de l’Unédic ?

Selon plusieurs évaluations, la mise en place de la dégressivité des allocations-chômage permettrait d’économiser environ un milliard d’euros. Plus optimiste, l’Association française des entreprises privées (Afep) calcule qu’en diminuant de 25 % les indemnités des chômeurs inactifs depuis six mois, l’Unédic épargnerait 2 milliards d’euros. Des chiffres qu’il convient de comparer à la dette de 25,8 milliards d’euros du régime de l’assurance chômage. En comparaison, les CDD et contrats d’intérim coûteraient chaque année 11 milliards d’euros selon un collectif d’économistes.

« Structurellement, ce ne sont pas les droits qui créent le trou », estime Bruno Coquet, expert associé à l’Institut de l’entreprise. D’autant que les chômeurs n’ayant plus droit à l’assurance-chômage basculent vers d’autres mécanismes de solidarité comme l’allocation de solidarité spécifique (ASS) ou le Revenu de solidarité active (RSA).