Pharmacie: Allergan snobe Valeant pour se marier avec Actavis
Allergan, le fabricant de l'antirides Botox qui se refusait au canadien Valeant, a accepté lundi de se vendre à son compatriote américain Actavis pour 66 milliards de dollars, poussant son premier courtisan à jeter l'éponge.
La transaction, qui se fait en actions et en numéraire, est un cinglant revers infligé au milliardaire américain Bill Ackman, premier actionnaire d'Allergan, qui soutenait les appétits de Valeant.
Contacté lundi par l'AFP, l'entourage de Bill Ackman, l'une des voix les plus influentes de Wall Street, n'a pas souhaité faire de commentaires dans l'immédiat. M. Ackman détenait 9,69% d'Allergan au 30 septembre, selon un document boursier.
Valeant, qui espérait gagner la confiance des actionnaires d'Allergan lors de leur assemblée générale le 18 décembre prochain, a pour sa part renoncé.
«Nous avons vu l'annonce que Allergan et Actavis ont faite, et même si nous allons examiner cet accord (...), Valeant ne peut pas justifier auprès de ses actionnaires de payer plus de 219 dollars par action par Allergan», a déclaré Michael Pearson, PDG du groupe canadien.
- 66 milliards contre 53 milliards -
Connu pour son traitement Namenda contre la maladie d'Alzheimer et de Parkinson, Actavis propose 219 dollars par titre Allergan (129,22 dollars en numéraire et 0,3683 de ses propres actions) pour s'offrir le groupe californien, ce qui valorise l'entreprise à 66 milliards de dollars.
Cette somme est supérieure à l'offre de 53 milliards de dollars déposée sur la table depuis plusieurs mois par Valeant. Fin octobre le groupe canadien avait annoncé envisager de la relever à 60 milliards de dollars.
Valeant compte désormais se concentrer sur sa croissance à l'interne, tout en évaluant les occasions d'acquisitions qui pourraient se présenter, et ce de façon «prudente, disciplinée», a expliqué lundi M. Pearson.
Valeant dépose les armes après près de sept mois de conflit avec Allergan au cours desquels les dirigeants des deux groupes n'ont pas hésité à se lancer des noms d'oiseaux par communiqués interposés. La tension était telle que des procédures judiciaires sont en cours de part et d'autre.
Allergan dénonce la stratégie de développement de Valeant essentiellement fondée sur des acquisitions et des réductions de coûts au détriment de la recherche et le développement (R&D) de nouvelles molécules.
Or fait-elle valoir son «pipeline» - médicaments en développement - très prometteur dans l’ophtalmologie, est ce qui fait sa force.
Basé en Irlande depuis le rachat l'an dernier du laboratoire irlandais Warner Chilcott où il bénéficie d'une fiscalité plus faible qu'aux Etats-Unis, Actavis s'est engagé lundi à consacrer environ 1,7 milliard de dollars à la R&D.
- Plus gros coup de l'année -
Le groupe pharmaceutique, qui espère générer au moins 1,8 milliard de dollars de synergies à partir de 2016, réalise la plus grosse acquisition de l'année aux Etats-Unis, éclipsant les rachats de Direct TV par AT&T (48,5 milliards de dollars) et de Comcast par Time Warner (45,2 milliards de dollars). C'est la cinquième plus grande acquisition de tous les temps dans l'histoire de la pharmacie, selon le cabinet spécialisé Dealogic.
Actavis avait approché Allergan pour la première fois en septembre, en lui faisant une offre d'achat de 50 milliards de dollars. Mais il avait été repoussé, Allergan cherchant un chevalier blanc pouvant lui proposer un prix plus élevé pour échapper à Valeant, selon des sources proches du dossier.
Dans un contexte de recomposition du paysage pharmaceutique américain, Actavis est revenu à la charge pour ne pas être distancé par les gros acteurs comme les numéros un et deux américains de la profession Pfizer et Merck. Ces derniers sont en quête de nouveaux relais de croissance pour faire face à l'expiration des brevets de leurs médicaments phare et à la concurrence des fabricants de génériques comme Teva ou encore Mylan.
Une entité Allergan-Actavis aura un portefeuille diversifié composé de médicaments sous protection et de génériques, notamment dans la dermatologie, la gynécologie, l'urologie et l'ophtalmologie. Elle devrait générer environ 23 milliards de dollars de ventes par an, ce qui la ferait entrer dans les dix premiers groupes pharmaceutiques mondiaux. Elle sera dirigée par l'actuel directeur général d'Actavis Brent Saunders.