Jeux vidéo: La France veut passer au niveau supérieur

SECTEUR Le gouvernement souhaite «construire un environnement favorable pour développer ce secteur en France»...

Céline Boff
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A côté des productions à gros budget, les jeux vidéo indépendants, réalisés par des équipes plus petites et pour des coûts très inférieurs, émergent sur les consoles, après avoir fait leur trou sur d'autres supports comme les appareils mobiles.
A côté des productions à gros budget, les jeux vidéo indépendants, réalisés par des équipes plus petites et pour des coûts très inférieurs, émergent sur les consoles, après avoir fait leur trou sur d'autres supports comme les appareils mobiles. — Franck Fife AFP

«Je le dis: j’aime les jeux vidéo.» Si le Premier ministre Manuel Valls clamait récemment son affection pour les entreprises, Axelle Lemaire, la secrétaire d’Etat en charge du Numérique, affirme quant à elle son goût pour l’industrie du jeu vidéo. Elle a adressé mercredi une véritable déclaration d’amour à ses patrons, réunis à Paris à l’occasion de la présentation du premier baromètre de leur secteur.

Et parce qu’il n’existe «que des preuves d’amour», la secrétaire d’Etat l’affirme: elle veut «construire un environnement favorable pour développer ce secteur en France». Qui est loin d’être anecdotique. Avec un chiffre d’affaires de 2,7 milliards d’euros, il s’impose comme la première industrie culturelle du pays.

Il dispose en outre de deux arguments massue en ces temps de chômage de masse et de déficit commercial. Primo, 56% de ses entreprises affirment qu’elles embaucheront en 2015 et que la moitié de ces recrutements se fera en CDI. Secundo, cette industrie réalise déjà 45% de son chiffre d’affaires à l’export… Ce que ne manque pas de relever Axelle Lemaire: «Il est temps de le considérer alors que nous nous faisons des nœuds au cerveau pour savoir comment rétablir notre balance commerciale

«Les années noires sont derrière nous»

Bien sûr, la crise n’a pas épargné cette industrie. En quelques années, la France est passée du 5e au 8e rang mondial en termes de production et a perdu plus de 5.000 emplois directs. Mais Axelle Lemaire veut «croire que les années noires sont derrière nous» et assure «vouloir donner à la France une feuille de route claire et ambitieuse».

Pour doper cette industrie, la secrétaire d’Etat a dans ses cartons deux armes de reconstruction potentiellement massive: la création d’un fonds de prêts participatifs destiné à renforcer les fonds propres des entreprises et la mise en place d’un nouveau crédit d’impôt jeu vidéo. Ces dispositifs, qu’Axelle Lemaire souhaite effectifs avant la fin de l’année, devraient «apporter au secteur un volume de financement de 50 à 60 millions d’euros».

«Le nouveau crédit d’impôt est une mesure très attendue», confirme Guillaume de Fondaumière, président du Syndicat national du jeu vidéo (SNJV). Car le secteur manque d’argent. «L’accès aux financements extérieurs est difficile: 75% des entreprises doivent autofinancer leur développement», assure Julien Villedieu, délégué général du SNJV. Résultat: la production de jeux –soit l’activité de 80% des entreprises– «peut ne plus suffire et les deux tiers des sociétés se lancent dans la prestation».

62% des patrons français estiment que la France est peu attractive

Pour survivre, les développeurs ont aussi revu à la baisse leurs budgets de production et, grâce à la dématérialisation, 72% d’entre eux commercialisent désormais leurs jeux directement auprès des consommateurs.

Autant dire que ces professionnels voient d’un bon œil la main tendue du gouvernement. Mais le chemin semble encore long. Si 85% des dirigeants croient en l’avenir de leurs entreprises, plus de la moitié (55%) se disent pessimistes pour le secteur dans son ensemble et 62% estiment que la France est peu attractive. «Ce manque de confiance pousse de plus en plus de studios à se développer hors de nos frontières, notamment au Canada», se désole Guillaume de Fondaumière.

D’après les patrons français, les pays les plus attractifs pour développer une entreprise de jeux vidéo sont le Canada, les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Ce dernier vient d’ailleurs de se doter d’un nouveau crédit d’impôt, d’ores et déjà plébiscité comme étant le plus avantageux en Europe par 47% des développeurs européens.