La France peut-elle se passer d'ArcelorMittal?

DECRYTAGE Le bras de fer entre le géant de la sidérurgie et le gouvernement s'est durci lundi après qu’Arnaud Montebourg a déclaré vouloir bouter Mittal hors de France: coup de bluff ou petite révolution?...

Claire Planchard (avec agence)
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Le siège d'ArcelorMittal à Paris, le 1er octobre 2012.
Le siège d'ArcelorMittal à Paris, le 1er octobre 2012. — ANTONIOL ANTOINE/SIPA

«Nous ne voulons plus de Mittal en France». C’est la dernière bombe lâchée lundi matin par le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg dans Les Echos. A une semaine de l'expiration du délai accordé au gouvernement pour trouver un repreneur aux deux hauts fourneaux et à l'aciérie du site mosellan, qu'ArcelorMittal veut fermer, la tension monte d’un cran, avec au cœur des débats, la préservation de plusieurs milliers d’emplois. 

ArcelorMittal compromet-il le projet de reprise de Florange?

«Le problème des hauts fourneaux de Florange, ce n'est pas les hauts fourneaux de Florange, c'est Mittal», estime Arnaud Montebourg.

Le géant mondial de l'acier, qui a annoncé le 1er octobre l'arrêt définitif des hauts fourneaux et avait accepté de donner deux mois à l'Etat pour trouver un repreneur, ne veut se séparer que de ses «activités à chaud» et refuse toujours de céder l'activité transformation de l'acier, comme le réclame le gouvernement pour faciliter une reprise.

Le groupe s’est expliqué vendredi, dans un communiqué, en assurant que «la vente des activités aval de Florange mettrait en péril la viabilité du reste des activités d'ArcelorMittal en France». Selon lui, ces activités qui consistent à transformer les brames d'acier en bobines, sont à «forte valeur ajoutée» et  leur localisation à Florange,  à proximité des usines des constructeurs automobiles allemands, est stratégique pour le groupe.

Combien d’emplois menacés?

La querelle de chiffres bat son plein. Selon le ministre du Redressement productif, la reprise de l’ensemble des activités de Florange assurerait le maintien des quelque 2.800 emplois du site. 

De son côté, ArcelorMittal prétend que s’il devait être forcé de se séparer également de ses activités de transformation, ce ne sont plus seulement les 650 emplois de la partie chaude de Florange qui seraient en jeu mais les 20.000 du groupe en France. 

L'Etat pourrait-il se substituer au groupe sidérurgique?

Dans les Echos, le ministre du Redressement productif a confirmé travailler sur un «projet de nationalisation transitoire» de Florange. Un projet également évoqué ce week-end par le ministre du Travail Michel Sapin et appelé de leurs vœux par les élus de Moselle, droite et gauche confondues, dans une lettre ouverte adressée samedi au président de la République.

Selon Les Echos, l'idée «serait une association avec un industriel, minoritaire, le temps de stabiliser l'activité» à Florange.

Sur France Inter, l'ancien ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo a apporté son soutien à cette idée dans le cadre d'une réorganisation de la filière sidérurgique française. «L'idée qui consiste à dire la filière française sidérurgique doit vivre - il y a 2.200 personnes sur le site, 22.000 (chez ArcelorMittal) en France et la filière globale c'est 75.000 - et que l'Etat, avec le FSI, avec des partenaires comme Eramet, Ascometal, réfléchisse à un contrôle public transitoire (...) ne me paraît pas inadaptée», a-t-il dit.

Pour le président du nouveau parti centriste UDI, la condition est «de reprendre toute la sidérurgie, tout Mittal et pas simplement la partie en difficulté.» Il fait valoir qu'un tel «outil technique provisoire» a déjà été utilisé, notamment pour rebâtir la sidérurgie aux Etats-Unis.

La famille Mittal, elle, n’a pas tardé à réagir lundi matin:  dans une interview accordée au Monde, dans son édition datée de mardi, ils se disent «extrêmement choqués» par les propos d’Arnaud Montebourg.